Stéphane Robidas a beau être techniquement un entraîneur recrue, il débarque à Montréal avec un bagage. Le nouveau responsable des défenseurs du Canadien a travaillé au développement des joueurs des Maple Leafs de Toronto de 2015 à 2021.

Il a donc vu tout l’engouement qui peut entourer de jeunes talents, particulièrement en défense, sa spécialité. En 2018, par exemple, les Leafs avaient fait de Rasmus Sandin leur choix de 1er tour, au 29rang. Deux ans plus tard, Sandin était nommé défenseur par excellence au Championnat du monde junior.

Voici Robidas à Montréal. Parmi les joueurs qu’il encadrera, on retrouve Kaiden Guhle, choix de 1er tour décrit comme très proche de la LNH. Il a joué pour Équipe Canada junior, il a aidé son club à atteindre la Coupe Memorial, il a été nommé joueur par excellence des séries de la Ligue junior de l’Ouest (WHL). Bref, il a excellé à tous les niveaux.

« C’est d’y aller un jour à la fois, a rappelé Robidas, dimanche, après le match intraéquipe du Canadien au Centre Bell. Il a joué un match à Buffalo, il a fait le camp. Là, il va jouer des matchs. Oui, il y a beaucoup de “hype” dans des places comme Montréal et Toronto, et des fois, ça peut affecter les joueurs mentalement. »

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Kaiden Guhle

Un autre joueur repêché tôt, Justin Barron, devrait lui aussi voir de l’action cette saison. Jordan Harris, un choix de 3tour qui a connu du succès dans les rangs collégiaux, est également attendu à Montréal cette saison, à temps plein ou à temps partiel.

Ces jeunes suscitent de l’enthousiasme, notamment parce que le Tricolore n’a pas été un modèle de développement récemment. Parmi les défenseurs repêchés sous Marc Bergevin, Victor Mete a disputé le plus de matchs (185) avec l’équipe. Alexander Romanov (133) était en voie de le rattraper, mais a été échangé. On tombe ensuite à Noah Juulsen et Cale Fleury. Mikhail Sergachev a disputé plus de matchs que tout ce beau monde, mais on commence à savoir comment ça s’est terminé…

Bref, difficile de blâmer ceux qui s’emballent devant la relève. Sauf que cet enthousiasme crée des attentes, et c’est ce que Robidas doit gérer avec ses jeunes défenseurs.

« Quand les attentes sont là, dit-il en plaçant sa main à la hauteur de sa tête, tu peux être déçu. Mais si le joueur ne les atteint pas, ce n’est pas sa faute. C’est une pression de plus. Moi, j’arrivais comme choix de 7tour, j’avais zéro pression et tout ce que je pouvais faire, c’était de dépasser les attentes. Des fois, on va juger un joueur par rapport aux attentes et c’est une erreur, il faut faire attention à ça. »

Sans pression

Comme Robidas à l’époque, Corey Schueneman se trouve à l’autre bout du spectre des attentes. Jamais repêché, embauché comme joueur autonome il y a deux ans, il a fait ses premiers pas dans la LNH la saison dernière… à 26 ans.

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Corey Schueneman et Gabriel Bourque

Mais il a bel et bien sa place dans la lutte pour un poste cet automne. Dimanche, il formait de nouveau un duo avec Chris Wideman, son principal partenaire de la saison dernière. Le fait de le jumeler à un vétéran dont le poste est virtuellement assuré constitue en soi un indicateur encourageant pour lui.

Pour un arrière pas réputé pour son jeu offensif, Schueneman a réalisé une belle manœuvre pour préparer un but d’Anthony Richard dans le match intraéquipe. Dans son point de presse, Robidas a d’ailleurs évoqué ce jeu.

Schueneman arrive toutefois loin dans les discussions, derrière les Guhle, Barron et compagnie.

« Que les caméras soient sur moi ou non, ça ne changera pas mon approche, affirme l’Américain. Je ne suis pas un jeune de 21 ans non plus. J’ai du vécu, je comprends comment ça marche et j’ai été dans cette situation pas mal toute ma vie, donc ça ne me dérange pas. »

Avec son âge et son profil, Schueneman est fait sur mesure pour un rôle de sixième ou septième défenseur. L’état de santé de Joel Edmundson, de nouveau embêté par une blessure au dos, pourrait déterminer en partie son sort. Sauf que sans Edmundson, Schueneman devient le quatrième défenseur du Canadien en matière d’ancienneté… avec 24 matchs d’expérience ! Seuls Wideman, David Savard et Michael Matheson en ont joué plus que lui. Madison Bowey aussi, mais ce dernier est blessé et il est de plus en plus étiqueté Ligue américaine.

Les 24 matchs de l’an dernier, « ça aide beaucoup, reconnaît Schueneman. Ça permet de voir ce qu’est la LNH, la vitesse, l’exécution. »

Cette situation permet aussi de constater le paradoxe des attentes. Il y en a peut-être au point de vue individuel, mais collectivement, ce groupe d’arrières sera en pleine croissance cette saison, au sein d’une équipe à qui plusieurs prédisent la dernière place de la division.