Kent Hughes n’a pas tourné autour du pot : les nouvelles de l’état de santé de Carey Price sont « décourageantes ». Au point qu’il est déjà acquis que le gardien vedette n’amorcera pas la saison 2022-2023. Et qu’il est probable qu’il ratera l’entièreté de la prochaine campagne.

Devant les médias, jeudi soir, le directeur général du Canadien n’avait pas le cœur à la fête. Il venait pourtant d’acquérir l’attaquant Sean Monahan, des Flames de Calgary, contre ces fameuses « considérations futures » – aussi bien dire gratuitement. Les Flames avaient besoin d’espace sous le plafond salarial après avoir fait un pont d’or à Nazem Kadri, et Hughes s’est fait un plaisir de les soulager d’un joueur coûteux, en exigeant à la clé un choix de premier tour en 2025.

Toutefois, si le Canadien peut se « payer » Monahan, qui empochera 6,375 millions la saison prochaine, c’est parce que Price se trouvera sur la liste des blessés à long terme dès la première minute du camp d’entraînement. Kent Hughes ne voit pas comment le numéro 31 pourrait revenir au jeu sans nouvelle opération. La rééducation, à l’évidence, a montré ses limites.

Aussi « décourageante » que soit cette révélation au sujet de l’athlète de 35 ans, elle est loin d’être étonnante.

Indices

Le premier indice est apparu il y a plus d’un an, en juin 2021. Marchant sur les eaux, Carey Price venait de transporter son équipe jusqu’en finale de la Coupe Stanley. Or, quelques jours plus tard, à la surprise générale, le DG de l’époque, Marc Bergevin, l’a laissé sans protection à l’approche du repêchage d’expansion précédant l’arrivée dans la LNH du Kraken de Seattle.

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Carey Price lors du dernier match de la finale de la Coupe Stanley, le 7 juillet 2021, à Tampa Bay, en Floride

L’idée, paraît-il, venait de Price lui-même, pour permettre à son équipe de garder Jake Allen. Le défi était lancé au Kraken et à son directeur général Ron Francis : feraient-ils de Price, probablement le meilleur gardien de sa génération, le visage de la 32franchise du circuit ?

Francis, ont rapporté différents médias, a longuement hésité. « Ce n’est jamais facile de passer son tour » lorsqu’un joueur de ce calibre est disponible, avait-il dit à Athlétique. Mais après avoir évalué différents facteurs, dont son gargantuesque contrat et ses antécédents de blessure, le Kraken a, effectivement, passé son tour.

La suite des évènements est devenue une longue enfilade de mises à jour qui n’ont fait que donner raison à Ron Francis.

En juillet 2021, Price a été opéré au genou. On évaluait alors qu’après une rééducation de 10 à 12 semaines, il serait prêt à amorcer la saison 2021-2022 en pleine santé.

Le 23 septembre, à l’ouverture du camp d’entraînement, on s’attendait à ce qu’il dispute « au moins un match présaison ». Les jours ont passé, mais jamais le gardien ne s’est joint à ses coéquipiers pour un entraînement complet.

Régressions

Au début du mois d’octobre, tout juste avant que ne s’amorce la saison, le Canadien a révélé que Price se prévalait du programme d’assistance aux joueurs de la LNH aux prises avec une dépendance aux substances. Quelques semaines loin de la glace ont alors entraîné une première régression dans sa rééducation.

En novembre et en décembre, il a repris le collier, principalement en gymnase. Avant Noël, il est réapparu sur la glace, le temps de quelques entraînements en solitaire. Un congé forcé par une éclosion de COVID-19 au sein de l’équipe l’a envoyé de nouveau à la maison. Deuxième régression, deuxième retour à la case départ.

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Carey Price sur la glace le 1er décembre 2021

À la fin du mois de janvier, Price s’est adressé aux médias et a insisté sur le fait qu’il visait un retour avant la fin de la saison.

En mars, il a poursuivi son travail loin du groupe principal, alors que s’intensifiait la rumeur d’un retour. Après quelques semaines additionnelles de travail intensif sur la glace, il a finalement retrouvé son filet le 15 avril.

À ses deux premiers matchs, il a bien paru, arrêtant 45 des 49 rondelles dirigées vers lui. Au cours des deux matchs suivants, il a toutefois accordé 12 buts sur 60 tirs. Le 23 avril, à Ottawa, il semblait décidément incommodé. Déjà, un congé de deux rencontres était nécessaire.

La fin

Le 29 avril, lors du tout dernier duel de la saison, il a livré ce qui ressemblait drôlement à son dernier match dans l’uniforme du CH. Dans les dernières minutes d’un match sans enjeu – son équipe l’a emporté 10-2 contre une version diminuée des Panthers de la Floride –, il a salué sa femme et ses enfants, alors que la rondelle tournait encore autour de lui.

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Carey Price, lors de son dernier match, le 29 avril dernier

Le lendemain, au bilan de fin de saison du club, le gardien a mis cartes sur table : chaque fois qu’il enfilait son équipement, son genou enflait. « Certains aspects du travail d’un gardien sont difficiles à faire pour moi », a-t-il avoué, précisant ne pas se voir jouer de manière « durable » si cet état des choses perdurait. Le match de la veille pourrait avoir été son dernier, mais il chercherait d’autres « opinions ». Une nouvelle opération n’était pas exclue.

Pendant la saison morte, Kent Hughes a répété à quel point il avait hâte d’avoir de la « clarté » au sujet de l’état de santé de son gardien. Une visite chez un spécialiste de Pittsburgh et une injection de plasma riche en plaquettes, une intervention censée faciliter la guérison de son genou, n’ont donné ni à Price ni à ses patrons les réponses espérées.

Le véritable test viendrait sur la glace, a prévenu Hughes. À la mi-juillet, il espérait être fixé avant le mois d’octobre.

La précision souhaitée est venue un peu plus vite que prévu. Mais elle n’est certainement pas allée dans le sens que le gestionnaire aurait souhaité.

La rééducation n’a montré « aucune amélioration » la saison dernière, a rappelé Hughes, jeudi. L’injection au genou, effectuée en juin, « n’a pas aidé ».

Au sujet d’un retour en 2022-2023, le DG parle encore au conditionnel. Les examens que subira Price avec le personnel médical du club, au seuil du camp d’entraînement, le mois prochain, donneront l’heure juste.

Une opération est-elle inévitable ? a demandé un journaliste. Hughes n’a pas voulu être catégorique ; on en saura davantage au camp, a-t-il répété. « Mais je peux répondre qu’avec [uniquement] de la rééducation, on ne croit pas que Carey est capable de revenir au jeu. »

Il n’y a pas eu de suite à sa phrase.