(Roberval) Trois kilomètres de rues bondées de milliers de partisans – tellement qu’on peinait à s’y frayer un chemin. Des chandails de l’Avalanche du Colorado à perte de vue. Des cris, beaucoup de cris. Et des sourires, beaucoup de sourires. Tout ça, pour une seule personne : le « petit gars de Roberval ».

C’est la scène à laquelle on a eu droit, dimanche après-midi, sous un soleil de plomb à Roberval. Ce serait un euphémisme d’affirmer que c’était jour de fête dans la petite municipalité située au sud-ouest du lac Saint-Jean. À croire que tous les résidants, sans exception, s’étaient donné rendez-vous pour accueillir Samuel Girard et la coupe Stanley en héros.

Il était prévu que le défenseur se présente d’abord dans une petite rue à l’entrée de la ville, où l’attendaient 150 jeunes joueurs de hockey, presque tous vêtus d’un chandail identifié « Girard ». Certains étaient même maquillés. Plusieurs avaient préparé des pancartes. On pouvait aussi apercevoir de fausses coupes Stanley.

« C’est mouvementé dans mon cœur. Ça va être le fun », soufflait Vincent Collin, 12 ans, une heure avant l’arrivée du hockeyeur. « Je ne sais pas beaucoup de choses de Samuel, mais je sais que c’est un Robervalois et qu’on le soutient tous ici. »

PHOTO KATHERINE HARVEY-PINARD, LA PRESSE

De gauche à droite : Yoshtin Siméon, Mathieu Perron, Jean-Samuel Lapierre, Vincent Collin, Luca Larouche et Mason Siméon

Le groupe a explosé de joie aux alentours de 15 h 15, quand Girard est apparu, la coupe Stanley au bout des bras. « Go, Sam, Go ! Go, Sam, Go ! », se sont époumonés les enfants.

« Ça fait du bien d’être avec la famille, les partisans. Ça fait vraiment du bien. C’était important pour moi de venir. Je suis content d’être à Roberval », a lancé le champion à La Presse avant de rembarquer dans un bateau accroché à un camion. Bateau où s’entassaient ses parents, ses frères, sa sœur et plusieurs autres membres de sa famille.

Et ainsi a commencé le défilé, mené et fermé par des camions de pompiers. Le groupe de jeunes suivait derrière. Dès le premier virage, la foule s’est fait entendre. Tout le monde s’approchait, voulait toucher ne serait-ce qu’une parcelle du gros trophée.

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Les rues de Roberval étaient bondées de milliers de partisans.

À quelques reprises, Girard a demandé à ce qu’on immobilise le camion. Une première fois afin d’aller chercher son grand-père en bordure de la route, qui a fièrement soulevé la coupe. Une deuxième fois pour aller à la rencontre d’un jeune homme à mobilité réduite.

Le défilé, qui devait durer 45 minutes, s’est finalement étiré sur deux longues heures. La musique jouait à pleine tête ; les gens ont crié, dansé, chanté jusqu’à ce que le camion fasse son arrivée à la marina de Roberval vers 17 h 15. Encore des centaines de personnes l’y attendaient et ont accueilli le hockeyeur et sa famille en bonne et due forme.

Fierté familiale

Alors que son fils présentait la coupe Stanley à la foule, Guylaine Dion a rencontré La Presse, le visage rougi après deux heures complètes au gros soleil.

« Quand on a vu tous les gens qui étaient dans les rues pour accueillir Samuel, c’était juste du bonheur », a d’abord laissé entendre la mère de famille, émotive.

C’est un rêve. C’est le rêve d’un enfant qui a toujours voulu gagner. On est tellement fiers de lui.

Guylaine Dion, mère de Samuel Girard

Mme Dion était présente à Tampa Bay quand l’Avalanche est venue à bout du Lightning, le 26 juin. Son fils, blessé au sternum au début des séries éliminatoires, n’a pas joué en finale. Mais il a rejoint ses coéquipiers sur la patinoire quand le cadran a annoncé la victoire ultime.

« Quand il a levé la coupe, qu’il est passé devant nous, j’ai revu toute son évolution au hockey, a raconté Mme Dion. Quand il était pré-novice, qu’il n’était pas capable de freiner et qu’il rentrait dans la bande, quand son chandail était tellement grand que c’était presque une jaquette… Ce sont de beaux souvenirs. »

PHOTO GIMMY DESBIENS, LE QUOTIDIEN

Le défilé, qui devait durer 45 minutes, s’est étiré sur deux heures.

Les sacrifices de la famille Girard ont été maintes fois racontés ; le frère aîné de Samuel, Jérémy, a dû renoncer à jouer dans le midget AAA pour permettre à Samuel de vivre son rêve. La famille avait les moyens de payer une seule inscription, pas deux.

Mais dimanche, il n’était pas question de sacrifices.

« Peu importe qui a fait les sacrifices – mon frère, ma sœur, mes parents –, c’est mon petit frère qui a gagné [la coupe Stanley], a insisté Jérémy. C’est lui qui le mérite. La famille a travaillé pour lui. Oui, c’est le nom de famille Girard qu’il a dans le dos, mais ça reste qu’il a tellement travaillé fort toute sa vie pour arriver là. »

On était tout petits et on jouait sur le lac tous les deux. Ça n’a pas de bon sens de savoir que la coupe est ici.

Jérémy Girard, frère de Samuel

Une inspiration

Ce n’est pas tous les jours que la coupe Stanley est de passage au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Pour tout dire, Girard est le premier depuis Mario Tremblay en 1986 à l’y amener.

Il suffit d’une petite promenade dans les rues de Roberval pour comprendre à quel point le hockeyeur a son influence. Même le restaurant de la marina affiche clairement ses couleurs avec un mur complet rempli de photos du défenseur et des cadres aux couleurs de l’Avalanche.

« C’est un petit gars de Roberval ! De Roberval ! C’est tellement magnifique ! », a lancé Carole Lavoie, arrivée avec ses amis trois heures avant le début du défilé.

PHOTO GIMMY DESBIENS, LE QUOTIDIEN

C'était la fête à Roberval !

Selon Pierre-Luc Perron, membre du conseil d’administration du hockey mineur, Girard est un modèle pour tous ces jeunes hockeyeurs qui rêvent à la grande ligue.

« Sam est un petit travaillant, souligne-t-il. Il y a des gens qui ont douté de lui et il a tout le temps fait taire ses détracteurs. Regarde où il est rendu. On est bien fiers de lui au hockey mineur. Aujourd’hui, c’est notre façon de lui dire merci.

« On ne se le cachera pas, il n’y a pas beaucoup d’élus là-dedans, mais ça permet à des petits jeunes de rêver. »

Marc-Olivier Tremblay, originaire de Saint-Félicien, est justement papa d’un des jeunes hockeyeurs qui a été là du début à la fin du défilé.

« C’est comme un signe d’espoir pour tous les jeunes qui rêvent de devenir professionnels au hockey, peu importe le niveau, affirme-t-il. Se rendre là, ça prend des efforts, du courage, du cœur, du travail. À la grosseur qu’il a, il a montré que ça se fait, peu importe les conditions. »