(Rochester, État de New York) « On rentre à la maison ! »

Toute la soirée, c’était bruyant dans un Blue Cross Arena bien rempli, où régnait une véritable atmosphère de hockey des séries, avec les habituels cris contre les arbitres et le gardien adverse. C’était bruyant, puis c’est devenu tranquille.

Tranquille, sauf évidemment dans le corridor du vestiaire des visiteurs, le Rocket de Laval en l’occurrence. Les uns après les autres, les joueurs venaient porter leur sac d’équipement – parfois en ayant l’air un brin épuisés – sur le chariot en vue d’un voyage de retour qui se fera plus rapidement qu’espéré. C’est pourquoi Carl Gagnon, secrétaire de route du Rocket, pouvait crier que tout le monde « rentre à la maison », ce que l’équipe a fait en pleine nuit, en autobus.

Le Rocket l’a emporté 6-5 en troisième période de prolongation, mercredi, pour balayer les Americans de Rochester 3-0 au troisième tour des séries de la Coupe Calder.

Jean-Sébastien Dea a inscrit le but gagnant sur le 60e tir du Rocket, en avantage numérique, après 1 min 51 s en troisième prolongation. Le même Dea qui, à l’entraînement matinal, disait vouloir faire regretter à l’organisation mère des Americans, les Sabres de Buffalo, de l’avoir laissé filer au terme d’un séjour de deux ans. Il a répondu en inscrivant deux buts et une aide.

« C’est pour des moments comme ça qu’on joue au hockey. C’est le fun de finir ça de cette façon. Je ne peux pas demander mieux. Quel effort d’équipe ! », s’est exclamé le héros du jour.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE TWITTER @AMERKSHOCKEY

Jack Quinn félicite Jean-Sébastien Dea après le match.

Ce but, et les 41 minutes de prolongation qui ont précédé, ont toutefois bien failli ne jamais se dérouler mercredi soir, car le Rocket était mené 5-4 en troisième période. Mais comme ce fut le cas dans le match ultime au tour précédent, les hommes de Jean-François Houle ont forcé la tenue de la prolongation au tout dernier moment. Jesse Ylönen a marqué le but égalisateur avec 67 secondes à écouler à la troisième période.

« Plusieurs gars en sont à leurs premières séries, et tranquillement, ça va mieux, a rappelé Dea. On a bien joué dans le cinquième match contre Syracuse et là, on vient de jouer trois bons matchs. »

Le bon mélange

Même s’il a accordé cinq buts, Cayden Primeau a encore eu son mot à dire dans ce triomphe, réalisant 34 arrêts. « Il a tenu le fort. Il a fait un très gros arrêt quand c’était 2-0 pour eux, ils ont eu une échappée et ç’aurait pu être 3-0. Il nous a permis de revenir dans le match », a souligné Houle.

C’est la première fois depuis 2011 qu’un club-école du Canadien atteint le carré d’as de la Ligue américaine. Mais à l’exception de Primeau, cette équipe ne regorge pas de futurs grands espoirs de la LNH, comme en 2011 d’ailleurs. Ce sont plutôt les vétérans qui mènent la charge.

Ça se voit sur la feuille de pointage, avec les trois points de Dea, les deux points et le jeu assuré de Xavier Ouellet, les nombreuses présences dominantes de Danick Martel, un autre qui a marqué dans la victoire.

Et puis, il y a ces petits moments qu’on ne voit pas. Par exemple, en deuxième prolongation, Brandon Gignac s’est retrouvé seul devant Aaron Dell. Le rapide attaquant avait la victoire au bout de son bâton, mais son tir de revers était trop haut.

« J’ai un bon coéquipier, Alex Belzile, qui m’aide à rester concentré. Il m’a dit de me calmer ! Il est bon pour les gars. Il m’a aidé à ne plus y penser, à me concentrer pour avoir une autre échappée et à marquer », a raconté Gignac.

Sans même qu’on ne l’évoque dans la question, Houle a lui-même identifié Belzile parmi ses éléments-clés.

« On a plusieurs bons vétérans qui font tout un travail de garder les gars calmes. Belzile a gagné deux coupes dans l’ECHL, ça paraît. Ouellet et [Gabriel] Bourque ont aussi de l’expérience. Nos plus vieux mènent la charge présentement. »

Long duel

Au prochain tour, Laval se mesurera au gagnant de la série entre les Checkers de Charlotte et les Thunderbirds de Springfield. Les Thunderbirds mènent la série 2-0. Le prochain match de cette confrontation aura lieu samedi. Il s’agit d’une série 3 de 5.

Voilà une bonne nouvelle pour le Rocket, qui pourra donc se remettre d’une éreintante période de 48 heures, qui a consisté en un trajet de six heures d’autobus entre Laval et Rochester, un match de 102 minutes, puis un trajet retour Rochester-Laval.

On essayait de se crinquer, de se parler, de se dire que tout est mental. J’essayais de me parler. Les jambes n’avançaient plus ben ben. Rendu là, c’est mental, ça se joue sur une erreur.

Jean-Sébastien Dea

Et le coach dans tout ça ? Devait-il encore s’adresser à ses joueurs, une fois rendu au cinquième entracte ?

« Non, j’ai ouvert la porte, j’ai dit : “Let’s go get that goal !” Il n’y a plus de parlage, les joueurs ne pensent plus ! » La recette lui a souri.

Parlant de Houle, en voilà un qui se retrouve dans une situation inattendue. Embauché un brin en catastrophe en plein été, après le départ particulier de Joël Bouchard, le voici en demi-finales, à sa toute première expérience comme entraîneur-chef dans la Ligue américaine. La vie fait parfois drôlement les choses.