(Syracuse, État de New York) Sur papier, ce n’est qu’une victoire. En réalité, c’est bien plus que ça.

Après avoir permis au Rocket de Laval de vaincre le Crunch de Syracuse par la marque de 3-2, samedi, Cayden Primeau semblait incapable d’arrêter de sourire.

En répondant aux questions des journalistes dépêchés à l’Upstate Medical University Arena (!), le gardien affichait son flegme habituel. Des réponses courtes, jamais pour parler de lui, toujours pour rendre hommage à ses coéquipiers. Mais ce sourire en coin, il ne mentait pas.

Cette victoire est bien sûr infiniment importante pour le Rocket. Dans une courte série trois de cinq, rentrer à la maison avec une égalité de 1-1, c’est dire mission accomplie. Elle l’est encore davantage pour Primeau. Car elle confirme qu’il est bel et bien de retour.

La tempête a soufflé si fort cette saison chez le Canadien qu’elle a emporté avec elle le jeune homme. D’un naturel si calme devant son filet, Primeau n’était plus que l’ombre de lui-même. Sur les neuf départs qui lui ont été confiés, de novembre à février, il n’a terminé le match que quatre fois. Sa confiance était à néant. Mais on le gardait à Montréal, faute d’autres options.

Quand le Tricolore l’a finalement renvoyé à Laval, il a poussé un soupir de soulagement. « Je n’étais plus le même gardien », a-t-il expliqué en février. À Laval, il souhaitait « construire » son jeu. Le reconstruire, devrions-nous dire.

Et c’est ce qu’il a fait. Or, ses statistiques en deuxième moitié de saison n’étaient pas flamboyantes. Une fiche de 8-6-2. Un peu plus de trois buts alloués par rencontre. À la fin de la saison, il est allé réchauffer le bout du banc de nouveau à Montréal, ce qui a forcément brisé son rythme.

Grande étoile

Il n’y avait donc rien d’étonnant à ce que le vétéran Kevin Poulin se voie confier le filet pour le premier match de la série, vendredi soir. C’est lui qui avait monté la garde pratiquement toute la campagne. Et comme l’avait expliqué l’entraîneur Jean-François Houle, on privilégiait la victoire avant le développement – Poulin, 30 ans, a un contrat uniquement de la Ligue américaine, tandis que Primeau, 22 ans, est un espoir du Canadien.

Comme le Rocket s’est incliné en lever de rideau et que le deuxième match était disputé dès le lendemain, Houle n’a étonné personne en se tournant vers Primeau. Son gardien lui a donné raison.

D’un calme olympien, malgré quelques gestes précipités en première moitié de rencontre, Primeau a été la grande étoile de son équipe, bloquant 37 rondelles. Il aurait certainement préféré mieux paraître sur le deuxième but du Crunch, qui créait l’égalité 2-2. Mais étant donné la manière dont il avait sorti son équipe du pétrin, notamment grâce à un arrêt quasi miraculeux de la jambière en fin de deuxième période et en sortant la mitaine face à Cole Koepke, qui s’était échappé en troisième, personne ne lui en tiendra rigueur.

Il a été excellent. Il nous a gardés dans le match. Je suis très fier de son effort.

Jean-François Houle, entraîneur du Rocket, au sujet de Cayden Primeau

« Il était vraiment confiant et il a joué un super bon match. Je suis content pour lui », a renchéri l’attaquant Gabriel Bourque.

Primeau, on l’a dit, n’aime pas s’épancher sur ses propres succès. Il a vanté ses coéquipiers qui ont bloqué des tirs et il a parlé du but « énorme » de Brandon Gignac en toute fin de match.

Son sourire s’est encore fait voir lorsqu’un journaliste a souligné que la bataille contre Syracuse se poursuivrait maintenant à Laval et que la Place Bell connaîtrait son baptême des séries éliminatoires, jeudi prochain, à la cinquième année d’existence du Rocket.

« Les partisans nous ont soutenus toute la saison quand ils le pouvaient, a-t-il rappelé. On sent leur énergie, on s’en nourrit. Leur donner un match de séries, ce sera incroyable. »

Rien n’assure que Primeau sera l’homme masqué en action ce soir-là. Mais dans le grand ordre des choses, cela importe peu. Sa victoire la plus importante de la saison, il l’a déjà remportée.

En bref

PHOTO GRAHAM HUGHES, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Jesse Ylönen

Jesse Ylönen a marqué le premier but du Rocket sur un tir absolument foudroyant. Les partisans du Canadien en avaient eu un avant-goût lors des quelques matchs qu’il a disputés cette saison avec le grand club, mais le lancer qu’il a servi au gardien Maxime Lagacé du cercle de mise en jeu droit, en première période, était du grand art. Un tir de la LNH, à n’en point douter. Et un bon.

Brandon Gignac a joué les héros avec moins de deux minutes à écouler en brisant l’égalité de 2-2. Le natif de Repentigny s’est fait oublier derrière la défense locale et, après avoir reçu une rondelle envoyée par Ylönen, il s’y est pris par deux fois pour déjouer Lagacé d’un tir du revers. « Ça fait une couple de semaines qu’il compte de gros buts, a fait remarquer Jean-François Houle. C’est un but très important, j’espère que ça va lui donner confiance. » « Au début, j’ai eu peur qu’il l’arrête ! s’est quant à lui esclaffé l’auteur du but gagnant. Après le retour, il a fallu que j’y aille dans la lucarne. Je suis vraiment content ! »

La série ne compte que deux matchs, mais le niveau d’intensité est déjà très, très élevé. Samedi, les mises en échec percutantes se vendaient treize à la douzaine. Une séquence, tôt en troisième période, s’en est fait l’illustration parfaite, alors que Devante Smith-Pelly, du Rocket, a violemment frappé Frank Hora, quelques secondes après que Daniel Walcott, du Crunch, eut fait de même à l’endroit de Nate Schnarr. « Toute la saison, Syracuse nous a donné du hockey de séries, a rappelé Cayden Primeau. C’est ce genre d’équipe. C’est le fun ! »