« Avez-vous entendu l’anecdote de Bryan Trottier ? », a demandé François Legault aux journalistes, tout sourire, au sortir des funérailles de Mike Bossy. Elles avaient lieu jeudi après-midi, à Sainte-Thérèse.

Les journalistes n’étaient pas admis à l’intérieur de la salle de 300 places des Résidences funéraires Goyer. On lui a donc répondu par la négative.

« Eh bien, d’abord il a chanté, a raconté le premier ministre. Il a chanté On the road again. Mais il l’a fait en français, parce que Mike le lui avait montré. C’était extraordinaire. »

Nous y reviendrons.

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« Mais il a raconté une anecdote que je n’avais jamais entendue, a continué François Legault. Dans les derniers moments, je pense que c’était une game contre le Minnesota. Mike Bossy avait très mal au dos. Ils étaient dans la même chambre. Mike n’était même pas capable de mettre ses bas et ses souliers. C’est Bryan Trottier qui a mis ses bas et ses souliers. Il est arrivé à l’aréna. Mike n’était pas capable de mettre ses patins. C’est Bryan Trottier qui les lui a mis, et qui les a attachés. Et cette journée-là, Mike Bossy a fait trois buts. C’est quand même wow ! Très sympathique, Bryan Trottier. »

Et comment.

La cérémonie a duré près de deux heures. Trottier, arrivé à Sainte-Thérèse sans moustache – mais avec sa guitare –, avait été le dernier à s’adresser aux convives venus saluer pour la dernière fois la légende des Islanders de New York.

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Bryan Trottier et sa conjointe

C’est peut-être grâce à ses chansons et à ses anecdotes que l’ambiance feutrée précédant l’évènement avait laissé place à des sourires et à des rires dans le hall d’entrée.

« Mike était mon cochambreur, s’est rappelé Trottier, plus grand complice de Bossy sur la glace et à l’extérieur. Quand on était sur la route, je chantais On the road again de Willie Nelson. »

Il a chantonné la mélodie en nommant la chanson.

Il me disait toujours : “Ah, toi et ton Willie Nelson !” Alors je me suis dit que si je la faisais [On the road again] en français, ça ne le dérangerait pas de l’entendre aussi souvent. On était sur la route tellement souvent.

Bryan Trottier

Bryan Trottier a alors raconté le processus.

« Je lui demandais : “Comment on dit : On the road again ?” Il répondait : “Sur la route encore.” »

En roulant ses r.

« Comment on dit : I just can’t wait to get on the road again ? Il répondait : “Je veux retourner sur la route encore.” OK, bien. Comment on dit : The life I love is playing hockey with my friends ? “La vie que j’aime, c’est de jouer au hockey avec mes boys.”

Il la chantait avec moi lorsque nous étions cochambreurs. En français. C’est pourquoi je l’ai chantée pour lui, ici, une dernière fois. Pour partager ce souvenir avec tout le monde.

Bryan Trottier

Bryan Trottier vit aujourd’hui à Pittsburgh. Mais il ne faisait pas de doute qu’il viendrait rendre hommage à son ancien coéquipier, jeudi.

« Nous honorons nos amis, a souligné Trottier. Mike était probablement le meilleur de mes amis. Clark Gillies, Denis Potvin, Billy Smith et lui étaient le cœur et l’âme de cette équipe des Islanders. »

La conversation a été interrompue par une femme venue le remercier pour ses chansons.

« J’ai un talent de guitariste limité, nous avait-il souligné un peu plus tôt. […] La musique peut être thérapeutique, elle peut aider le moral. Je crois que d’avoir pu chanter quelques chansons pour Mike et sa famille, ça leur a fait du bien. »

« Un gars foncièrement bon », selon Legault

« C’était important pour moi de venir rendre hommage à Mike Bossy, avait déclaré François Legault à son arrivée au salon funéraire, plus tôt dans la journée. […] C’était probablement le meilleur buteur de l’histoire de la LNH, et surtout, c’était un être humain sympathique. Gentil. »

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Le premier ministre François Legault et sa conjointe ont assisté aux funérailles.

Il a raconté l’avoir rencontré à quelques reprises. Ils s’étaient échangé leurs numéros de téléphone « et s’envoyaient des textos de temps en temps ».

« On avait jasé de toutes sortes d’affaires, s’est souvenu le premier ministre. On parlait d’éducation, de comment on aide les personnes âgées. C’était un gars foncièrement bon. Un bon gars, comme on dit. »

Le gouvernement Legault souhaite rebaptiser l’autoroute 50 en l’honneur de Guy Lafleur. Est-ce que le nom de Mike Bossy pourrait aussi être immortalisé de cette façon ?

« C’est quelque chose qu’on regarde, a répondu Legault. Est-ce que ce sera à Laval ? Avant d’avoir brûlé le livre des records de la LNH, il avait fait la même chose dans la LHJMQ à Laval. On regarde ça actuellement. »

« Rendez hommage à l’équipe »

Il y a peut-être une embûche de taille face à un tel projet : le refus de Mike Bossy de recevoir des honneurs individuels.

Parlez-en au copropriétaire des Islanders, Jon Ledecky, présent jeudi.

« Plusieurs personnes nous demandent ce que nous pouvons faire pour honorer Mike de façon permanente, a expliqué le sympathique Ledecky. Les gens aimeraient que nous érigions une statue en son honneur. Mais avec toutes les discussions que j’ai eues avec Mike au fil des ans, je sais qu’il n’approuverait jamais une telle chose !

[Mike] disait : “Si vous voulez faire quelque chose au nouvel aréna, vous devriez le faire en honorant toute l’équipe. Ne me rendez pas hommage, rendez hommage à l’équipe. Faites construire une sculpture de nous qui gagnons la Coupe tous ensemble.”

Jon Ledecky, copropriétaire des Islanders de New York

Pour Jon Ledecky, « c’est ça, Mike Bossy ».

« Il ne voulait pas que l’attention soit portée sur lui. Il voulait toujours la ramener vers ses collègues, sa famille et son équipe. »

Son humilité remarquée par Calvillo

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Anthony Calvillo

Normand Brathwaite. Vincent Damphousse. Ses collègues de TVA Sports. Ils étaient nombreux à être venus rendre un dernier hommage à Mike Bossy, jeudi. Mais la présence d’Anthony Calvillo était particulièrement surprenante. « Je l’ai rencontré quelques fois », s’est souvenu le légendaire quart-arrière des Alouettes. Ils s’étaient notamment vus alors que Bossy travaillait pour Humpty Dumpty, au milieu des années 2000. « Il m’a fait venir pour me faire signer quelques ballons de football pour ses employés. J’avais eu une belle conversation d’une heure avec lui. On s’est croisés à quelques reprises par la suite. » Ce qui l’a marqué de ces rencontres ? « Il était accessible, sans arrogance. Parfois, les gens avec une telle réputation arrivent devant toi avec un air de supériorité. Mais lui, pas du tout. Il était très humble. »