(Sherbrooke) Ça se passe quelque part l’été dernier. Stéphane Julien, entraîneur-chef du Phœnix de Sherbrooke, se rend à l’aéroport de Dorval pour ramener un défenseur de 18 ans qui débarque de la République tchèque.

À l’approche du pont Champlain, le jeune homme reconnaît les environs. « On passe devant L’Île-des-Sœurs, il a dit : “Ah, j’ai habité là !” Il s’en souvenait », nous raconte Julien.

Si son nouveau joueur s’en souvenait, c’est parce que Montréal a été sa maison il y a une douzaine d’années. Son nom : David Spacek. Son père : Jaroslav Spacek, sympathique bonhomme qui a joué deux ans et demi à Montréal.

Aujourd’hui, c’est au tour du fils de se produire au Québec. David Spacek, défenseur comme le paternel, protège la ligne bleue du Phœnix et espère se faire repêcher par une des 32 équipes de la LNH à l’été.

« On a habité au même endroit pendant les trois ans, c’était bien situé entre Brossard et le centre-ville, nous raconte Jaroslav Spacek au bout du fil. C’était bien pour la famille, c’était bien pour se promener à vélo, c’était propre et les gens étaient gentils. »

David étant alors à l’âge d’aller à l’école, il a passé trois ans dans le réseau scolaire québécois. Il dit qu’il parlait et comprenait le français, des souvenirs corroborés par le père.

« À l’école, il apprenait le français et l’anglais. Il suivait aussi des cours privés. On avait également une gardienne, et après trois mois, il lui a dit qu’elle pouvait lui parler français ! C’est dommage qu’il ne s’en souvienne pas… J’espère que ça va lui revenir avec les francophones dans son équipe. »

PHOTO FOURNIE PAR JAROSLAV SPACEK

David et Jacob Spacek, pendant le séjour de Jaroslav Spacek avec le Canadien

S’il a oublié la langue, il a gardé de bons souvenirs du Centre Bell, mais pas ceux auxquels vous vous attendez, comme le printemps 2010.

« J’allais à la plupart des matchs au Centre Bell, mais je regardais seulement la première période et j’allais ensuite au salon des conjointes. Je jouais au mini-hockey avec les enfants de Brian Gionta, c’était pas mal plus amusant là ! », lance-t-il en ricanant.

Les gènes de qui ?

Au premier coup d’œil, on croit reconnaître les traits du père. Il n’en a évidemment pas la carrure, mais à 6 pi, il pourrait lui ressembler à terme. « Il ressemble plus à sa mère, corrige Jaroslav Spacek. Mais il commence à avoir des joues, donc il s’en vient comme moi ! »

Pendant sa carrière de 880 matchs dans la LNH, Spacek était considéré comme un défenseur relativement complet, capable d’appuyer l’attaque tout en étant responsable défensivement. Trois fois, il a surpassé la marque des 40 points.

« Il y a quelques similitudes entre nos styles, avance David Spacek. Mais je suis droitier et il était gaucher. »

Ce détail-là fascine le père.

Nos deux fils sont droitiers. Je crois que c’est l’effet miroir. Tes enfants te regardent et veulent t’imiter, mais ils le font à l’envers. Plusieurs de mes amis ont des fils qui ne tirent pas du même côté qu’eux. Je suis content que mes gars soient droitiers, mais c’est parfois dur de leur enseigner des choses, par exemple comment jouer le long de la rampe.

Jaroslav Spacek

En progression

Ignoré au repêchage à sa première année d’admissibilité, en 2021, David Spacek est revenu sur les radars des recruteurs notamment grâce à une récolte de 44 points en 48 matchs cette saison, qui lui vaut le 10rang des défenseurs du circuit Courteau.

« Tout a été annulé en République tchèque l’an passé, donc ça ne m’a pas aidé, estime David Spacek. J’ai joué une dizaine de matchs et à partir de la mi-novembre, c’était seulement des entraînements. J’ai aussi joué quelques matchs au Championnat du monde des moins de 18 ans, mais je n’avais pas un très gros rôle. »

C’est pourquoi, l’été dernier, Spacek a renoué avec Jocelyn Thibault, son ancien coéquipier des Blackhawks de Chicago et des Sabres de Buffalo et, accessoirement, un des actionnaires du Phœnix. Ils s’étaient parlé une première fois quand David avait 16 ans, mais « avec les quotas de deux joueurs internationaux par équipe, ce n’est pas évident », rappelle le père.

PHOTO MAXIME PICARD, ARCHIVES LA TRIBUNE

David Spacek (18)

Le voici à 18 ans, plus mature et prêt à occuper un rôle majeur au sein d’une des puissances de la LHJMQ.

« Il m’impressionne. C’est un bon défenseur, bon en relance, bon défensivement, énumère Stéphane Julien. Il est dur à battre à un contre un. Il a un tir de pro. On lui donne 27, 28 minutes par match. C’est une bonne personne aussi, un peu comme son père. Beaucoup de recruteurs l’avaient déjà sur leur liste, mais il va remonter. Depuis les Fêtes, il joue du gros hockey. Nos succès, c’est beaucoup grâce à nos deux Européens.

« Il n’a pas joué beaucoup l’an passé et n’a pas eu un bon tournoi U18, enchaîne Julien. Si je ne l’avais pas connu avant, j’aurais eu plus de doutes. À cause de la pandémie, les recruteurs ne l’ont pas beaucoup vu. Je pense qu’on aura une belle surprise au repêchage. »

Spacek venait au 81rang du classement de mi-saison des patineurs nord-américains de la Centrale de recrutement de la LNH. Il est né à Columbus, il garde de bons souvenirs de Montréal et il dit aimer regarder Drew Doughty et Cale Makar. Est-ce à dire qu’il aimerait être repêché par les Blue Jackets, le Canadien, les Kings de Los Angeles ou l’Avalanche du Colorado ?

Je n’ai pas vraiment d’équipe de choix, mais mon père a été repêché par les Panthers et ça semble être bien de jouer en Floride !

David Spacek

Jaroslav Spacek, lui, a joué pour sept équipes. Mais ce qui est assez particulier, c’est qu’il a joué entre 145 et 205 matchs pour 5 de ces équipes. Il n’y a donc pas une équipe en particulier à laquelle on l’associe.

« J’ai aimé toutes mes équipes. Ce serait bien si une de mes équipes le repêchait, lance-t-il. Ce qui est amusant, c’est que j’ai commencé en Floride et ensuite, je ne faisais que monter vers le nord. S’il y avait eu une équipe au pôle Nord, j’aurais joué là ! Je veux juste qu’il soit repêché par une équipe où il aura sa chance. »