Au moment du congédiement de Trevor Timmins, le 28 novembre, Cole Caufield demeurait un espoir à l’avenir encore incertain aux yeux de plusieurs.

Ce premier choix du CH en 2019, 15e au total, avait amassé seulement trois points à ses quinze premiers matchs de la saison et avait même dû passer quelques semaines à Laval pour retrouver sa confiance.

La veille du coup de balai qui allait emporter Marc Bergevin et Timmins, Dominique Ducharme avait utilisé Caufield à peine une dizaine de minutes contre les Penguins.

Martin St-Louis a été embauché le 9 février et Caufield s’est transformé en monstre. Avec son but en prolongation dimanche soir à Philadelphie, en plus de sa brillante passe pour une aide sur le but de Suzuki, le jeune homme de 21 ans a porté son total de points à 17, dont huit buts, en seulement 14 rencontres depuis l’arrivée de son nouveau mentor.

Caufield pourrait bien constituer le plus bel héritage de Timmins. Mais il aura eu besoin de l’arrivée de Martin St-Louis pour rehausser la valeur de son espoir. Sans lui, Caufield serait peut-être à Laval aujourd’hui, à la droite d’un trio complété par Jean-Sébastien Dea et Rafaël Harvey-Pinard.

Voyez les coulisses du CH lors du repêchage de Cole Caufield

Timmins a poliment refusé une demande d’entrevue ce week-end. Il préfère garder un profil bas. Il continue à épier les jeunes joueurs en prévision du repêchage dans sa région, à Ottawa, dans l’espoir de se trouver du boulot rapidement.

L’ancien directeur du recrutement amateur chez le Canadien ne retrouvera jamais son poste, mais les prochaines années pourraient lui permettre de beaucoup mieux paraître, grâce à St-Louis, Gorton, Hughes et compagnie.

Prenez Artturi Lehkonen, son choix de fin de deuxième ronde en 2013. Un joueur de quatrième trio incapable de marquer dans un filet de soccer avant son départ, désormais avec six buts et huit points à ses six derniers matchs, et courtisé par un nombre grandissant d’équipes aspirantes à la Coupe Stanley.

Le repêchage et le développement des jeunes ne sont pas l’affaire d’un seul homme. Le recruteur doit trouver les joueurs de talent, les bons entraîneurs doivent les placer dans des conditions gagnantes. Ils ont besoin l’un de l’autre.

Il y a eu de mauvais choix. David Fischer, le premier choix de 2006, était mauvais à l’Université du Minnesota avant même d’approcher le moindre membre de l’entourage du CH. Louis Leblanc avait une production modeste à sa dernière (et première) année dans les rangs juniors pour un choix de de première ronde de 20 ans.

Mais Jesperi Kotkaniemi, que les Hurricanes de la Caroline s’apprêtent à mettre sous contrat pour huit ans et 38 M$, serait peut-être le deuxième centre de l’équipe derrière Nick Suzuki sous la tutelle de St-Louis. Ryan Poehling se serait peut-être développé plus rapidement.

L’ère de Trevor Timmins se définit en trois étapes. Une première, entre 2003 et 2007, qui a vu émerger des pièces importantes, et permis au CH d’atteindre deux carrés d’as en plus d’une finale : Carey Price, Max Pacioretty, P. K. Subban (échangé pour Shea Weber).

Il y a eu un long creux de vague entre 2008 et 2015. De mauvaises décisions, un moins grand nombre de choix, un peu de malchance (Juulsen) et un club-école très mauvais dans le développement des jeunes.

Puis les dernières années, à compter de 2016, nettement meilleures, mais dont on ne peut pas tirer encore de conclusions.

La présence de St-Louis et d’une direction moderne risque cependant de bien faire paraître l’héritage de Timmins. Caufield ne dérougit pas. Nick Suzuki, obtenu pour l’un des meilleurs choix de l’ère Timmins, Max Pacioretty, est en train de s’établir à titre de centre numéro un de premier plan.

Si St-Louis continue de transformer en or tout ce qu’il touche, les espoirs sur le point de joindre l’organisation d’ici quelques années auront un impact.

Déjà, Alexander Romanov, choix de deuxième ronde en 2018, pas assez mature au goût de l’ancienne direction pour jouer en séries l’été dernier, est en train de s’établir comme un solide top quatre. Il n’a jamais joué moins de 19 minutes sous St-Louis, et plus de 20 minutes lors de dix matchs sur quatorze.

Jordan Harris, choix de troisième ronde en 2018, le défenseur défensif de l’année dans la NCHC, n’aurait jamais signé de contrat avec l’ancienne administration, avec un DG qui n’arrivait pas à l’appeler par le bon prénom. Il serait surprenant qu’il ne termine pas la saison à Montréal.

Le capitaine de l’équipe canadienne junior, Kaiden Guhle, ne devrait pas tarder à s’établir avec le Canadien. Logan Mailloux possède lui aussi un beau potentiel.

À l’attaque, Sean Farrell, un joueur de petite taille comme St-Louis, Jan Mysak, Jesse Ylonen, Joshua Roy, la surprise de l’année dans les rangs juniors avec 84 points en 43 matchs, Blake Biondi et quelques autres seront les prochains à cogner à la porte.

Trevor Timmins pourrait avoir bien du plaisir à regarder les matchs du CH ces prochaines années. Comme il a sans doute gloussé de joie dimanche soir en voyant Caufield « la garnotter top net » pour donner la victoire au Canadien en prolongation…

Ces choix coincés derrière les choix de première ronde…

Tous les points de presse de Martin St-Louis sont fort instructifs. L’entraîneur du Canadien a raconté dimanche après le match comment un joueur tel Rem Pitlick avait pu se retrouver au ballottage à 24 ans. Pitlick, 16 points en 23 matchs avec le Canadien, dont neuf à ses neuf derniers matchs, a été évincé de la formation du Wild avec le rappel du choix de première ronde de l’équipe, Matthew Boldy. Celui-ci connait d’ailleurs un début de carrière étincelant avec 24 points en 27 matchs, en plus de mettre à profit son physique imposant.

St-Louis a rappelé avoir vécu pareille situation à Calgary au début des années 2000, avec le rappel de deux choix de première ronde, sixième au total. Le coach du Canadien a éventuellement vu son contrat racheté pour donner toute la place aux principaux espoirs de l’organisation. Dans le cas des Flames, cependant, le pari a été catastrophique. St-Louis a connu une carrière qui lui a permis d’accéder au Temple de la renommée. Les deux espoirs des Flames ? Daniel Tkaczuk, repêché devant Sergei Samsonov et Marian Hossa, entre autres, a joué 19 matchs dans la LNH. Il a terminé sa carrière en Angleterre à 31 ans. Rico Fata en a disputé davantage, mais seulement 22 pour les Flames, avant d’être soumis, et perdu, au ballottage. Il s’est retrouvé en Europe à 26 ans pour y terminer sa carrière.

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