« Je crois que la game est honnête. » Ainsi s’exprimait Dominique Ducharme au terme de son deuxième match à la barre du Canadien, une défaite de 2-1 en prolongation à Winnipeg, duel que ses hommes avaient dominé 41-21 aux tirs au but.

On donnait alors la chance au coureur, même si l’idée d’envoyer Phillip Danault et Joel Armia pour amorcer la prolongation avait fait bien des sceptiques.

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Nous voici trois semaines plus tard, avec l’impression que c’est le jour de la marmotte. Ducharme dirigeait son 12e match comme entraîneur-chef du Tricolore. Et pour la cinquième fois, il a vu sa troupe s’incliner au bris d’égalité. Cette fois, les Canucks l’ont emporté 3-2 en prolongation, sur un joli but de J. T. Miller.

Cinq défaites en bris d’égalité sous Ducharme, neuf depuis le début de l’année. Mais surtout, aucune victoire. Donc, aucun but en maintenant 29 min 55 s de jeu à 3 contre 3, une situation où le jeu est pourtant ouvert comme le buffet Vichy à Montréal-Nord à l’époque.

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Tyler Toffoli

Alors, la « game » est-elle réellement honnête, tout bonnement ? Ou faut-il lui donner le goût de l’être ?

La fatigue

Il importe ici de saluer l’honnêteté de Ducharme. Après chacune des cinq défaites, il a pris le temps d’expliquer sa ligne de pensée.

Claude Julien aurait répondu que « ça s’appelle du coaching », et il avait bien le droit ; les entraîneurs n’ont pas non plus l’obligation de rendre des comptes comme un ministre ! Michel Therrien se serait fermé, bouillant comme il était après les défaites.

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Jake Allen

Ducharme, lui, trouve une façon d’expliquer où il s’en va, même si on devine qu’il aimerait digérer la défaite avec un entourage différent que les journalistes. Bref, il est transparent, et ce faisant, on comprend que ses décisions sont réfléchies, et non pas de simples intuitions.

Alors, le temps passé à tourner en rond en zone neutre, à revenir sur ses pas ? « C’était une question de prendre de la vitesse, du mouvement. Mais à un moment donné, on aurait pu amener la rondelle plus vite en zone adverse, a concédé Ducharme. Avec la vitesse et le mouvement, on veut créer de la confusion. »

Jonathan Drouin, un des attaquants employés en quatrième période, a ajouté : « : On essayait de les fatiguer, de les forcer à garder les trois mêmes joueurs sur la glace. On a eu une chance de marquer. Ils n’ont pas contrôlé la prolongation. On n’a pas marqué sur notre chance, ils ont marqué sur la leur. »

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J.T. Miller et Thatcher Demko

L’approche n’a visiblement pas fonctionné. Josh Anderson a certes eu droit à une échappée, mais il a fallu que Drouin commette de l’obstruction en zone neutre pour la rendre possible. Et surtout, le but a été marqué par Miller, un desdits joueurs que le CH essayait de fatiguer. Miller était en effet sur la patinoire depuis le tout début de la prolongation ! La fatigue ne l’a pas empêché de se moquer tour à tour de Tomas Tatar, Nick Suzuki et Jake Allen pour mettre fin au match.

Même si les victoires se font rares, les joueurs continuent à appliquer ce que leur demande leur entraîneur.

« Oui, c’est frustrant, a admis Drouin. Personne ne va rentrer à la maison satisfait d’avoir un seul point. Des fois, on se frustre, je suis le premier à le faire. C’est de suivre le processus et ça va bien aller. »

L’entraîneur n’a pas tort quand il souligne que « si on marque ce soir, tout le monde dit à quel point qu’on a du caractère, après avoir créé l’égalité en fin de match ». Toujours pour être de bonne foi, il importe de reconnaître que son duo de Danault et Paul Byron en début de prolongation a rempli sa mission, soit d’assurer au CH la possession de la rondelle. D’ailleurs, Byron n’est resté que 25 secondes sur la patinoire avant de céder sa place.

Mais une chose apparaît claire : le hockey n’est pas juste. À plus forte raison dans une saison écourtée de 56 matchs, où chaque point perdu en prolongation revient à un adversaire direct dans la course aux séries. En disant que le hockey était honnête, Ducharme avait ajouté que les points allaient revenir au Tricolore, tôt ou tard.

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Jake Allen et Shea Weber

Près d’un mois plus tard, ces points ne reviennent toujours pas. Ducharme devra trouver une façon qu’ils reviennent, que ce soit en revoyant les responsabilités de Shea Weber, en espérant que le but égalisateur de Suzuki lui redonne confiance, et que le but dont il a été témoin en prolongation ne la lui enlève pas. Bref, de trouver des façons que son équipe gagne plus souvent en 60 minutes.

Mais Ducharme devra trouver une façon de forcer le hockey à être plus juste avec son équipe, car au rythme auquel s’accumulent les défaites, la saison pourrait se finir plus tôt que prévu.

En hausse : Alexander Romanov

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Alexander Romanov

Il a drôlement repris confiance, comme en font foi ses quelques jolies séquences en possession de la rondelle. Deux d’entre elles ont d’ailleurs provoqué des punitions aux Canucks.

En baisse : Joel Armia

Il a eu droit à une première sentence en troisième période, pendant laquelle il n’a joué que 2 min 12. Sa deuxième est tombée en point de presse, quand Dominique Ducharme a laissé entendre qu’il avait perdu son homme sur le deuxième but des Canucks.

Le chiffre : 6

Jake Allen a subi une sixième défaite de suite. Le pauvre n’a eu que neuf buts de soutien offensif dans cette séquence, pour une moyenne de 1,50 par match.

Dans le détail

Armia sur le 4e trio

On va se le dire, ça ne va pas super bien pour Joel Armia. En premier, il y a le léger détail qu’avant le match de vendredi soir, l’attaquant n’avait pas marqué depuis le 6 mars… Eh bien, Armia a de nouveau été blanchi de la feuille de pointage lors de cette défaite face aux Canucks de Vancouver au Centre Bell. Si on fait le calcul, ça lui donne donc aucun point à ses cinq derniers matchs, et aucun but à ses 7 derniers matchs. C’est sans doute pourquoi Dominique Ducharme a fini par perdre patience, et en cours de soirée, on a vu Armia qui s’est retrouvé avec le quatrième trio de l’équipe. Il ne faudrait pas se surprendre de le retrouver quelque part dans les gradins dans un avenir plus ou moins rapproché…

Drouin au centre !

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Jonathan Drouin (92)

Dans le but de trouver la combinaison magique, Dominique Ducharme a brièvement inséré Jonathan Drouin au poste de centre vers la fin de la deuxième période. Ça n’a pas duré et Drouin est ensuite retourné à l’aile lors de la troisième période… Le joueur québécois n’a pas récolté de point en ce beau vendredi soir au Centre Bell, comme plusieurs de ses coéquipiers d’ailleurs, mais il a tout de même connu un fort match, avec 4 tirs au but. Nick Suzuki est l’autre attaquant du CH qui a lancé 4 fois lui aussi vendredi soir, lui qui a marqué son sixième but de la saison. À peu près au même moment, Max Pacioretty enfilait ses 15e et 16e de la saison pour les Golden Knights…

Arbitrage à géométrie variable


Les deux arbitres en poste vendredi soir au Centre Bell (on ne les nommera pas pour éviter de faire honte à leurs proches), ont connu une soirée assez difficile merci, et on a pu entendre les joueurs des deux équipes chahuter plusieurs de leurs décisions depuis les bancs à de multiples reprises lors de la soirée. Entre autres, les joueurs au banc des Canucks se sont levés d’un trait quand Jonathan Drouin a clairement commis de l’obstruction en prolongation, pour permettre à Josh Anderson de filer seul vers le gardien Thatcher Demko. C’est souvent le plus gros problème avec l’arbitrage dans la Ligue nationale de hockey : la constance… ou plutôt, le manque de constance ! Le match de vendredi soir en a été une autre belle preuve.

Ils ont dit

On se compliquait la vie avec la rondelle. Ce n’était pas notre meilleur match. Dans les deux premières périodes, on ne mettait pas assez de pression, pas assez d’échec-avant.

Jonathan Drouin

Je suis déçu de la défaite. Mon but importe peu car je n’ai pas réussi le jeu à la fin.

Nick Suzuki

On ne veut jamais se retrouver à accorder un avantage numérique comme on l’a fait comme ça à la fin d’un match. Ils ont marqué, mais on a pu trouver une façon de gagner le match en prolongation. Les bonnes équipes trouvent une façon de gagner ces matchs serrés et c’est ce qu’il faut faire.

Nate Schmidt

Mon but en prolongation n’était pas parfait… disons que ça faisait longtemps que j’étais sur la glace, mais leurs joueurs ne faisaient pas grand-chose, ils tournoyaient avec la rondelle, et je savais que j’allais être opposé à un attaquant sur le long de la bande… c’est un gros but pour nous.

J. T Miller

Ce fut un bon effort d’équipe, on a joué un bon match sur la route, c’est le genre de style de jeu qu’on doit afficher pour avoir du succès.

Travis Green

Avec Richard Labbé, La Presse