L’auteur Patric Laprade signera la biographie de l’ancien capitaine du Tricolore

Émile « Butch » Bouchard a attendu 10 ans après la fin de sa carrière pour être admis au Temple de la renommée du hockey. Il a été fait chevalier de l’Ordre national du Québec en 2008. Un an plus tard, à 90 ans, il a finalement vu son chandail hissé au plafond du Centre Bell par le Canadien.

L’ancien défenseur est un habitué des honneurs tardifs, et il en sera de même pour la parution de sa biographie, dernière grande marque de reconnaissance qui lui manquait.

Patric Laprade, mieux connu pour ses biographies de Maurice « Mad Dog » Vachon et du Géant Ferré, a annoncé lundi qu’il se lançait dans l’écriture de la vie de Butch Bouchard. L’ouvrage paraîtra chez Libre Expression, idéalement à l’automne 2022, soit 10 ans après la mort de l’ancien capitaine du Canadien. Laprade fera le tout avec la collaboration de la famille du défunt.

Et à entendre parler l’auteur, il ne manquera pas de matériel pour raconter la vie de l’ancien numéro 3. On demande tout bonnement à Laprade de nous faire son argumentaire, et il conclura sa réponse – sans question de relance – une dizaine de minutes plus tard.

« Butch Bouchard a été l’un des meilleurs défenseurs de l’histoire du Canadien, et l’un de ses meilleurs capitaines, lance Laprade, descripteur de la lutte à TVA Sports. On le surnommait le roc de Gibraltar du Canadien. Gordie Howe disait qu’il était le cornerstone [le pilier] de l’équipe. Il a été capitaine pendant les grosses années de Maurice Richard, et ils sont rapidement devenus proches.

« Bouchard a aussi été le premier capitaine canadien-français, comme on les appelait à l’époque, qui prenait sa place dans le vestiaire et sur la glace. Il est arrivé en 1941, à une époque où les Québécois n’avaient pas encore connu un énorme succès avec le Canadien.

« Ceux dont on se souvient le plus, ç’a été ceux qui ont suivi : Richard, Béliveau, Plante, Geoffrion. Mais les figures marquantes étaient des Franco-Ontariens, comme Newsy Lalonde et Aurèle Joliat. Sylvio Mantha avait peut-être été le seul capitaine franco-québécois de renom. »

PHOTO PIERRE-YVES LÉTOURNEAU, ARCHIVES LA PRESSE

Jean Béliveau et Émile Bouchard en avril 1968

On a aussi tendance à l’oublier, mais au moment où Bouchard se joint au Canadien, l’équipe ne compte que quatre Coupes Stanley, et aucune depuis 1931. Le défenseur en gagnera quatre, et prendra sa retraite en 1956, après la première de cinq conquêtes de suite des Montréalais.

« Au moment où il arrive, le Canadien se cherche une identité, mais le Québec francophone aussi, souligne Laprade. Des leaders francophones auxquels les gens pouvaient s’identifier, il n’y en avait pas une tonne. Il est devenu un de ces leaders positifs. »

La vie hors glace de Bouchard devrait aussi amener de l’eau au moulin. Apiculteur, propriétaire d’un célèbre restaurant, président des Royaux de Montréal pendant quatre ans, ami de Tommy LaSorda, fondateur de l’équipe de baseball des Ducs de Longueuil, échevin (conseiller municipal) de cette même ville…

« Il était différent du joueur de hockey typique qui travaillait chez Molson l’été ou après sa carrière », ajoute l’auteur.

Appel à tous

Laprade ne s’en cache pas : raconter la vie d’un défunt est un défi, surtout quand plusieurs des contemporains du sujet sont également morts. C’est pourquoi la collaboration de la famille sera précieuse, tout comme celle des personnalités qui l’ont connu après sa carrière de joueur.

Et l’auteur n’a aucune gêne à faire un appel à tous, si des gens du grand public souhaitaient lui raconter des histoires sur Butch Bouchard.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Patric Laprade lancera en 2022 une biographie d’Émile Butch Bouchard.

« La campagne qui avait été faite [par Ron Fournier et Jean Bouchard, un de ses fils] pour le retrait de son chandail va beaucoup m’aider. À cette époque-là, il restait encore pas mal de contemporains d’Émile, donc leurs témoignages ont été recueillis. Gordie Howe, Jean Béliveau et Henri Richard, par exemple, sont tous morts depuis.

« Le défi d’écrire sur une personne morte, c’est d’aller chercher le détail. Pour aller chercher le plus de détails, tu dois faire une recherche exhaustive dans les journaux de l’époque, et tu dois parler au plus de personnes possible de son entourage. Bouchard a pris sa retraite dans les premières années de la télévision. Et c’était un homme assez réservé. Il donnait des entrevues, mais ce n’était pas un Kid Kodak. »

Cela dit, Laprade est un habitué de cette démarche, puisque Mad Dog Vachon et le Géant Ferré étaient également morts depuis longtemps quand il s’est lancé dans leur biographie.

Butch Bouchard est un bon sujet, car il fait le pont entre mes livres de lutte et un premier livre sur le hockey. J’ai écrit sur des personnes décédées et qui ont vécu à une époque que je n’ai pas connue, et je m’en suis bien tiré.

Patric Laprade

Et justement, ce sera une belle occasion pour Laprade de diversifier son profil. Marc Blondin l’a vécu à une autre époque ; le monde de la lutte vient parfois avec une catégorisation dont il est difficile de se défaire…

« Avant de connaître l’histoire de la lutte, je connaissais l’histoire du hockey du bout des doigts, rappelle-t-il. Je connaissais chaque expansion de la LNH par cœur ! J’avais le livre de Claude Mouton, et plein d’autres livres sur l’histoire du hockey. Mon père était aussi plus vieux que ceux de mes amis. Il est né en 1931. Il était au Forum lors de l’émeute…

« Je lisais mes livres et je pouvais en parler avec lui. Donc, même si je suis plus jeune, Butch est arrivé dans mon univers en même temps que les autres grands du Canadien. Et un nom comme Émile Butch Bouchard, c’est un ver d’oreille, ça ne s’oublie pas. C’est comme Gilles The Fish Poisson ! »