Guy Lafleur n’est jamais certain de ce que demain lui réserve.

Lorsque ses traitements contre le cancer ne l’épuisent pas, Lafleur retrouve un peu d’énergie.

Et puis, il y a d’autres moments où tout ce qu’il veut, c’est se reposer.

« Je reçois l’immunothérapie les trois premières semaines, puis la quatrième semaine, j’ai la grosse chimio, a confié Lafleur au sujet de son traitement lors d’une récente entrevue avec La Presse Canadienne. C’est la chimiothérapie qui est la plus dure. Il n’y a pas une semaine qui se ressemble. Les deux dernières semaines, je me sentais très, très mal et je dormais beaucoup.

« Mais ces trois derniers jours, je me sens beaucoup mieux. Il y a beaucoup de hauts et de bas. »

Une tache blanche cancéreuse a été découverte par hasard sur le poumon droit de Lafleur en septembre 2019 alors qu’il subissait un quadruple pontage cardiaque. Deux mois plus tard, l’ailier membre du Temple de la renommée du hockey est de nouveau passé sous le bistouri pour retirer le lobe supérieur de l’un de ses poumons. On a également procédé à l’ablation de ses ganglions lymphatiques.

« Je n’en avais aucune idée, a reconnu Lafleur à propos de son cancer, reconnaissant qu’il ait été détecté tôt. J’aurais peut-être fini avec un cancer de stade 4 et peut-être qu’il aurait été trop tard. »

Mais il a reçu de mauvaises nouvelles en octobre 2020 avec une récidive de son cancer, et c’est à ce moment-là que Lafleur a commencé son traitement actuel.

La Société canadienne du cancer estime que 21 000 personnes mourront du cancer du poumon au pays en 2021, soit environ 25 % de tous les décès par cancer.

« La plupart des gens quand ils le découvrent, c’est le stade 4, a rappelé Lafleur, un fumeur invétéré jusqu’à ce qu’il arrête à cause de ses problèmes de santé en 2019. Ce n’est pas trop tard, car il y a des miracles qui se font, et il y a des gens qui survivent.

« Mais il vaut mieux le découvrir par vous-même. »

Observateur intéressé

Lafleur, qui a remporté cinq coupes Stanley avec la dynastie du Canadien dans les années 1970 au fil d’une brillante carrière, continue de surveiller son ancienne équipe d’un œil attentif.

Celui qui a été surnommé le « Démon blond » ou « Flower » n’assiste pas à beaucoup de matchs — il a toutefois reçu une ovation enthousiaste au Centre Bell lors de l’improbable parcours de l’équipe jusqu’en finale la saison dernière — mais il a été déçu par le début de saison du club qui n’a gagné que cinq de ses 20 matchs pour occuper le 29e rang au classement de la LNH.

« Ils visaient la Coupe Stanley et sont maintenant presque à la dernière place », a noté Lafleur, qui a inscrit 560 buts et 1353 points en 1126 matchs avec le Canadien, les Rangers de New York et les Nordiques de Québec.

« Si vous n’êtes pas prêt et si vous n’avez pas les bons joueurs, vous n’allez pas gagner. »

Le Canadien est bien sûr privé de deux joueurs importants en 2021-22. Le capitaine Shea Weber compose avec des blessures qui pourraient le pousser à la retraite, tandis que le gardien Carey Price a eu recours au programme d’aide de la LNH pour un « problème de consommation » avant la saison et il continue à travailler en vue de son retour.

« Ce sont deux gros morceaux qui manquent, a noté Lafleur. Mais ce n’est pas normal d’avoir des séquences de défaites comme ça. Même s’il vous manque deux gars, vous devriez pouvoir compenser. »

Bien qu’il critique la performance de l’équipe sur la patinoire, Lafleur voue beaucoup d’admiration à Price et à l’ailier Jonathan Drouin, qui a quitté l’équipe le printemps dernier pour lutter contre des problèmes d’insomnie et d’anxiété, pour avoir écouté leurs besoins en matière de santé mentale – et d’avoir ensuite partagé les détails publiquement.

« Ils les ont cachés pendant un certain temps, leurs problèmes, mais c’est sorti et ça va aider, a dit Lafleur. Tout d’abord, pour eux-mêmes. Et aussi pour les gens qui comprendront mieux ce qu’ils traversent. C’est une bonne chose.

« Ils ne sont pas les deux seuls dans la ligue, je vous l’assure. »

Un capitaine et vite

Lafleur croit que le Canadien doit nommer un capitaine, avec Weber à l’écart pour une période indéfinie. Le valeureux attaquant Brendan Gallagher est son choix.

« Tout de suite, insiste-t-il. Désolé pour Shea, mais il ne joue pas. Vous avez besoin de quelqu’un que les joueurs observent.

« Et Brendan… c’est le gars qui se présente à chaque match, il en paie le prix à chaque match. »

Pendant ce temps, le déclin de l’intérêt pour le hockey chez les jeunes Québécois a poussé le gouvernement Legault à dévoiler une stratégie visant à augmenter le nombre de Québécois dans la LNH.

Lafleur ne fait pas partie du comité annoncé la semaine dernière, mais il a quelques idées.

« Les temps changent, a-t-il constaté. Le hockey mineur, c’est tellement cher. Pour les parents, amener leurs enfants au niveau junior, c’est tout un défi. À notre époque, ce n’était pas comme ça.

« Il n’y avait pas autant d’argent impliqué parce que nous n’avions pas à beaucoup voyager. Le hockey mineur, c’est organisé comme la LNH maintenant. »

Lafleur a aussi pointé du doigt certains parents.

« Ils ont mis tellement de pression sur les enfants. Ils pensent à gagner à la loterie s’ils accèdent (à la LNH).

« C’est pourquoi beaucoup d’enfants abandonnent… il y a trop de pression. Ils doivent performer tout le temps. »

La pression de la victoire

Cette pression de la performance est inévitable pour une équipe à la riche histoire avec ses 24 bannières de la Coupe Stanley.

« Vous devez aller à la guerre tous ensemble, a précisé Lafleur au sujet des joueurs actuels du Canadien. Pas un seul gars un soir, deux gars la soirée suivante. Il y a 20 gars au sein de l’équipe, et chacun doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour gagner.

« Montréal est la meilleure ville au monde où jouer, si vous gagnez. Si vous ne gagnez pas, c’est l’enfer. »

Lafleur l’a vécu à sa façon ces 26 derniers mois avec ses chirurgies, la pandémie de COVID-19, la récidive du cancer et les traitements qui peuvent avoir de désagréables effets secondaires.

Mais le soutien de sa famille, des amis et des partisans — la Ligue de hockey junior majeur du Québec a retiré son numéro le mois dernier — l’a grandement soutenu.

« Je suis principalement coincé à la maison depuis 2019, a-t-il confié. Mentalement, c’est difficile. J’espère que je m’en sortirai et que je m’en sortirai avec la victoire.

« C’est l’espoir pour tous ceux qui ont un cancer. »