(Montréal) Au moment où vous lirez ceci, le propriétaire Geoff Molson aura peut-être déjà eu l’occasion de se poser une très simple question : et maintenant, on fait quoi ?

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Quand les fleurs de la dissension et les tiges de la panique se mettent à pousser, même en octobre, c’est souvent signe que ça ne va pas très bien. Et puis, on va se le dire, ça ne va pas très bien au Centre Bell ces jours-ci, encore moins après cette gênante claque de 5-0 subie mardi soir face aux Sharks de San Jose.

Vous avez bien lu : 5-0. Pourtant, ces Sharks ne sont pas à confondre avec le club de l’Armée rouge de 1976. Tenez, ils avaient même fait cadeau d’Adin Hill aux joueurs du Canadien. Ce jeune gardien de 25 ans, un ancien membre du Rush de Rapid City, était le parfait tonique pour relancer des compteurs qui ne comptent pas, mais non : 5-0 pareil.

Si nos calculs sont bons, ça donne donc un gros total de trois buts en quatre matchs. On peut comprendre Jeff Petry de s’être présenté aux médias avec un peu de boucane qui lui sortait des oreilles.

C’est frustrant. On a disputé deux matchs sur quatre comme ça. Lors de la moitié de nos matchs, il n’y a pas eu d’effort.

Jeff Petry

« Il nous faut revenir à la base. On patine et on laisse la rondelle, on laisse nos gars se débrouiller seuls… on ne va aller nulle part en jouant comme ça. On a besoin d’un meilleur effort de la part de tout le monde dans ce vestiaire. »

L’entraîneur-chef Dominique Ducharme a été encore plus tranchant en affirmant que son équipe « ne méritait pas de gagner ».

« La game n’est pas malhonnête, a-t-il imagé. Elle a été honnête avec nous ce soir. »

Tout cela est très exact, mais revenons à la question de départ : maintenant, on fait quoi ? S’il faut se fier au passé, il n’y a pas grand-chose à faire.

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Mike Hoffman tente de prendre la rondelle au vol devant Radim Simek.

En fait, dans le passé plus ou moins récent de ce club, souvent, de telles performances ont mené à des gestes de panique, tous plus loufoques les uns que les autres.

Il y a eu la fois où un entraîneur adjoint a été limogé quelques heures avant le début d’un match. Il y a eu la fois où un joueur a été échangé entre deux périodes à Boston. Et qui a oublié la fois où le plus grand gardien de l’histoire du club (et peut-être du hockey tout court) a été échangé en retour de presque rien ? Que de bons souvenirs…

Un geste de panique à l’heure actuelle produirait des résultats similaires. Marc Bergevin, par exemple, serait la cible idéale, mais soyons sérieux : un autre DG pourrait faire quoi de plus, au juste ? Il ferait sans doute ce que Bergevin fait déjà : prier pour que Carey Price et peut-être aussi Shea Weber puissent revenir au plus vite.

Il nous est plutôt d’avis que ce que l’on voit en ce moment est un cas classique de lendemain de veille : au printemps, presque tous les joueurs de cette équipe ont joué le hockey de leur vie en même temps. Le Canadien de 2020-2021 n’était pas le meilleur club de la ligue, ni même le deuxième ou le troisième ou le quatrième, mais le temps de quelques semaines, il l’a été. Ça arrive parfois, quand tout tombe en place.

Mais rien ne dure pour toujours, comme l’a si bien chanté Axl Rose, et l’ennui, c’est qu’il est très difficile de reproduire ce genre de magie deux ans de suite.

C’est ce qui est en train de se passer. Reste à voir si la magie pourra revenir avant qu’il ne soit trop tard.

Dans le détail

Ambiance feutrée au Centre Bell

Sur la feuille de match, on pouvait lire qu’il y avait 16 095 spectateurs au Centre Bell. Il s’agit bien sûr du nombre de billets vendus, car en réalité, c’était bien moins que ça. Étaient-ils même 12 000 ? Qu’importe, on était loin des innombrables salles combles des deux dernières décennies. En troisième période, alors que les Sharks jouaient avec un homme en plus, c’était si silencieux que le cri aussi coloré qu’exaspéré d’un partisan assis dans les dernières rangées a résonné dans toute l’enceinte. Et le match s’est terminé dans un concert de huées. En excluant les matchs disputés alors que les mesures sanitaires restreignaient le nombre de visiteurs dans l’aréna, il faut remonter à la campagne 1995-1996 pour retrouver une moyenne annuelle sous la barre des 20 000. Une saison qui, comme on le sait, n’a pas exactement été un long fleuve tranquille. « Si on gagne quelques matchs, les spectateurs vont revenir », a prédit Brendan Gallagher.

Les unités spéciales en panne

On ne fera pas encore le gag des unités « pas si spéciales », mais ce serait tout de même à propos. Après quatre matchs, le Canadien a passé 23 min 50 s en avantage numérique, réparties sur 13 occasions. Aucun but n’a encore été marqué dans ces circonstances. À l’inverse, en 17 occasions totalisant 27 min 17 s avec au moins un joueur en moins, sept buts ont déjà été concédés, ce qui place l’équipe parmi les pires de la ligue à ce chapitre (58,8 % d’efficacité). Bref, ça ne va pas bien. En ce qui concerne l’avantage numérique, Jeff Petry a lancé un appel à « simplifier le jeu » jusqu’à ce que la machine se remette en marche. Et surtout, à jouer dur, sans relâche, « ce qui nous a donné du succès par le passé ». Dominique Ducharme a, pour sa part, souligné que les Sharks, contrairement à ses protégés, avaient réussi à s’installer devant le gardien adverse pendant leurs attaques massives. Avec comme résultats deux buts marqués.

Les marqueurs au neutre

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Tyler Toffoli

Avec un grand total de trois buts marqués en quatre matchs, on peut dire de tous les joueurs du Tricolore qu’ils sont au neutre. Mais le constat est d’autant plus brutal lorsqu’on s’attarde aux buteurs les plus aguerris du club. Les deux marqueurs de 30 buts du groupe, Brendan Gallagher et Tyler Toffoli, n’ont toujours pas touché la cible – on donne une chance à Mike Hoffman, qui disputait mardi son premier match de la saison. Mais il y a pire. Selon le site Natural Stat Trick, Gallagher et Cole Caufield n’ont été sur la glace pour aucune chance de marquer de qualité à cinq contre cinq, et Toffoli pour une seule. Caufield a au moins le mérite d’avoir atteint la barre horizontale en avantage numérique. Mais du reste, les gros canons ne pourraient être plus silencieux. « On doit mériter nos chances, a convenu Gallagher. Ça commence par tuer des jeux dans notre zone, puis mieux jouer en zone neutre… On doit être meilleurs dans beaucoup de secteurs. » Rien à ajouter.

Ils ont dit

C’est quelque chose qui est difficile à expliquer… Les Sharks ont été les premiers sur la rondelle et partout sur le jeu. Ils n’ont eu aucun problème à faire ce qu’ils voulaient. […] On essaie de faire des jeux mignons qui ne fonctionnent pas et qui donnent des revirements. Tous les gars ici savent que ceci n’est pas assez bon.

Jeff Petry

C’est ma dixième année ici, je suis déjà passé par là. Dans ce genre de situation, le défi pour les joueurs, dans le vestiaire, est de garder les yeux sur la tâche à accomplir. On ne s’en sortira pas si on n’est pas sur la même longueur d’ondes.

Brendan Gallagher

En première période on s’est battus nous-mêmes. On leur a donné beaucoup trop de chances et ils en ont profité […] On ne méritait pas de gagner ce match-là. Quand tu te mets dans le trouble en partant, tu passes le reste du match à essayer de te rattraper. Et puis l’autre équipe devient confortable, elle ferme le jeu.

Dominique Ducharme

On en a parlé avant la saison. C’est un piège. Quand t’arrives si près et qu’il faut que tu recommences rapidement, il y a une partie mentale qui entre en ligne de compte. On ne la gère pas bien. À un moment donné, il faut que tu tournes la page. […] Il ne faut pas juste travailler ; il faut travailler de la bonne façon. Là, on est déconnectés avec et sans la rondelle.

Dominique Ducharme sur les contrecoups de la finale de la Coupe Stanley

Les deux premiers buts, on leur a donnés. Ensuite, ils ont profité d’un bond chanceux et c’était 3-0. On avait confiance [au début du match], mais on n’a pas rebondi.

Mike Hoffman

Je pense que l’avantage numérique a mieux fait. Une fois qu’on s’est installés en zone adverse, on a eu nos chances.

Mike Hoffman

En hausse

Josh Anderson

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Josh Anderson

Très difficile de trouver un joueur à placer dans cette case, mais Anderson a été l’un des rares à s’impliquer physiquement.

En baisse

Ben Chiarot

Une autre soirée difficile pour lui et aussi une autre pénalité. Ça lui en fait quatre cette saison, un sommet chez le CH.

Le chiffre

14

Le nombre de tirs non cadrés de la part des joueurs du CH mardi soir. Ça s’ajoute aux 19 tirs que les Sharks ont bloqués.