(LAS VEGAS) « Donc, vous habitez au 11, rue Spring, à New York, c’est bien ça ? »

J’aurais simplement dû acquiescer et me faire passer, pendant 10 minutes, pour un peintre cool qui vit dans un loft industriel de Nolita, un peu comme Ethan Hawke dans Great Expectations. Ce qui aurait été assez ironique pour un gars qui dessine comme un enfant de 5 ans qui a un bras cassé.

J’ai donc choisi l’honnêteté. « Non, madame, je suis Québécois, j’ai simplement mis un code postal de New York au hasard en m’inscrivant. »

Laura ne m’en tient pas rigueur. De toute façon, ce n’est pas exactement la cohue en ce jeudi matin à la pharmacie Walgreens voisine de l’hôtel Planet Hollywood, sur la Strip. Lors de la prise de rendez-vous en ligne, la veille, il restait 25 plages horaires disponibles. À 10 h, les gens sont encore à regretter leur verre de deux pieds de haut rempli de slush à la margarita de la veille.

Et puis, avec un tel emplacement, Laura a l’habitude de vacciner des gens d’un peu partout, bien qu’elle voit aussi passer des résidants de Las Vegas. « Parce qu’on accepte des gens sans rendez-vous », précise-t-elle.

PHOTO GUILLAUME LEFRANÇOIS, LA PRESSE

Comptoir pour s’enregistrer

Dans le comté de Clark, qui englobe Las Vegas, 36 % de la population générale a reçu ses deux doses de vaccin, et 60 % a reçu une dose, selon les données du New York Times. À l’échelle nationale, 44 % des Américains ont reçu leurs deux doses, et 53 % en ont reçu une.

C’était dit dans une carte postale précédente, et on le répète : il semble y avoir une très forte concentration des 44 % d’Américains adéquatement vaccinés à Vegas, parce que les gens qui portent le masque dans les casinos et dans les corridors des grands hôtels sont largement, largement minoritaires. Les autorités américaines, rappelons-le, précisent que seuls les gens adéquatement vaccinés ne sont pas obligés de porter le masque à l’intérieur.

***

L’exercice se fait très rapidement. À l’arrivée, l’infirmière demande une pièce d’identité, de même que la preuve de vaccination de la première dose.

« Avez-vous vos informations d’assurances ?

— Non, pas sur moi. Pas grave, je peux bien payer.

— Non, c’est correct, c’est gratuit. »

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Formulaire à remplir

C’est l’heure de retrousser la manche. Ça vous embête si je prends une photo ? « Aucun problème, je suis devenue une vedette internationale, j’apparais sur des photos et des vidéos partout dans le monde ! », lance Laura.

Jusqu’ici, donc, tout se déroule comme prévu. La surprise était pour la fin.

On s’attendait à un bon vieux code QR envoyé par courriel comme preuve de vaccination. Mais Laura me remet plutôt une fiche remplie à la main, un petit carton comme ceux sur lesquels Gregory Charles lisait les questions à Que le meilleur gagne.

Devant mon air dubitatif, elle tente de me rassurer. « C’est correct, c’est rentré dans notre système, et il y a des Walgreens partout aux États-Unis. »

Vérification faite, le portail Clic Santé permet de faire reconnaître une dose de vaccin reçue à l’étranger. Il faudra toutefois prendre rendez-vous en personne et présenter le carton susmentionné, afin de recevoir le fameux code QR tant convoité.

L’opération est terminée, c’est l’heure de repartir. Ici, pas de période d’attente de 15 minutes avant de quitter le site ; on retourne dans la fournaise, avec un mercure qui a atteint 46 °C en fin d’après-midi.

« Essayez d’éviter l’alcool et les efforts physiques intenses. Faites comme si vous vous remettiez d’une maladie.

— Ah bien, tant mieux, je ne prévoyais pas faire d’exercice. »

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Preuve de vaccination