Brendan Shanahan a initié une révolution à Toronto à son arrivée à titre de président des Maple Leafs, en avril 2014.

Après des décennies à dépenser sans compter sur le marché des joueurs autonomes, à sacrifier des choix au repêchage et des espoirs pour obtenir des vétérans en fin de carrière, les Leafs allaient reconstruire.

Le noyau de l’équipe était composé de Phil Kessel, Dion Phaneuf, James Van Riemsdyk, Nazem Kadri, Jake Gardiner, Jonathan Bernier et James Reimer, entre autres.

Après deux ans, Kessel, Phaneuf et les deux gardiens avaient été échangés, Van Riemsdyk, Kadri et Gardiner étaient sur le point de lever les pattes eux aussi, et Mitch Marner et Auston Matthews, repêchés parmi les quatre premiers en 2015 et 2016 après des saisons de misère, déjà prévues par la direction, entamaient leur carrière dans la LNH.

Après avoir raté les séries éliminatoires en 2015 et 2016, Toronto y a finalement eu accès en 2017. C’était tout nouveau, tout beau avec cette bande de jeunes premiers et l’élimination en six matchs aux mains des puissants Capitals de Washington n’a pas fait trop mal. La progression était palpable.

Perdre en sept matchs en première ronde, deux printemps de suite, contre les Bruins de Boston, en 2018 et 2019, n’a rien de déshonorant non plus. Les Bruins avaient connu des saisons de 112 et 107 points et ont éventuellement atteint la finale de la Coupe Stanley en 2019.

Les Leafs venaient néanmoins de connaitre leurs deux premières saisons de 100 points ou plus depuis 2004 et étaient victimes de la formule des séries éliminatoires de la LNH. Et on pouvait leur donner le bénéfice du doute : rare et cruel de voir deux clubs de 100 points s’affronter dès la première ronde.

On a commencé à taper du pied l’an dernier. Perdre aux mains des Blue Jackets de Columbus dès la ronde préliminaire, contre un club affecté par la perte de ses vedettes Bobrovski, Panarin et Duchene l’année précédente, a fait rager les fans des Leafs.

Les Maple Leafs entamaient en janvier leur septième saison depuis l’entrée en poste de Brendan Shanahan.

Leur excellent rendement en saison régulière (fiche de 35-14-7) a fait oublier l’échec aux mains des Blue Jackets. On avait bon espoir, à l’aube des séries éliminatoires, de voir le club vaincre les autres formations canadiennes et atteindre au minimum le carré d’as. Encore davantage après le cinquième match contre le Canadien.

Mais le CH vient de remporter deux matchs consécutifs et la tenue d’un septième match sera nécessaire lundi soir pour déterminer le gagnant.

Ce même Canadien qui, quatre ans après l’arrivée de Shanahan, a entamé une reconstruction nettement plus timide, une réinitialisation, en 2018, et qui a déjà franchi une étape supplémentaire en séries éliminatoires l’an dernier en éliminant les Penguins de Pittsburgh en ronde préliminaire.

Le CH a tardé à faire jouer ses jeunes, mais il comptait trois joueurs de 21 ans ou moins dans sa formation lors du sixième match, contre aucun pour Toronto. Nick Suzuki, 21 ans, a marqué le but gagnant en prolongation lors de la cinquième rencontre, sur une passe de Cole Caufield, 20 ans. Jesperi Kotkaniemi, 20 ans, a compté en prolongation lors du sixième match.

La pression repose sur les Leafs, vous l’aurez deviné. Auston Matthews et Mitch Marner, les deux moteurs de cette reconstruction, sont ostracisés depuis deux jours à Toronto.

Les deux constituent pourtant des menaces constantes à l’attaque, mais ils n'ont marqué qu'un but, celui de Matthews, depuis le début de la série. Les trois aides de Matthews et les quatre de Marner ne semblent pas apaiser la colère à Toronto.

Le titre de l’article dans le quotidien Toronto Sun lundi matin est limpide : « Le "Shanaplan" en procès lors du septième match ».

Sans tomber dans l’hystérie, le chroniqueur Lance Hornby rappelle l’urgence de la situation. La direction de l’équipe a entouré ses jeunes vedettes de vétérans tels Joe Thornton, Wayne Simmonds et Zach Bogosian cet automne pour maximiser ses chances de gagner ; Matthews et Marner ont déjà une trentaine de matchs éliminatoires derrière la cravate, mais ils n'ont jamais gagné de match ultime comme l’ont fait avant eux les anciennes gloires Doug Gilmour et Wendel Clark. Ils ont eu le temps et l’espace pour grandir et devenir des hommes : Matthews vient de remporter le trophée Maurice-Richard et Marner a terminé en tête des compteurs du club pour la troisième fois en quatre ans.

Mais Matthews, brillamment surveillé par Phillip Danault, a une seule aide à ses quatre derniers matchs. Marner en a une de plus. « Si les Leafs perdent le septième match, les fans se souviendront de 2021 comme de Matthews jouant coincé dans une cabine téléphonique et Marner tirant à répétition dans la baie vitrée plutôt que sur Carey Price », écrit Hornby.

La pression est sur les Maple Leafs. À ce groupe de finalement passer à l’étape suivante, sans quoi l’été risque d’être pénible.

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2- Tennis Canada et la Banque Nationale feront la promotion de l’égalité des genres au tennis. Une exclusivité de Frédérick Duchesneau.

3- Sept chiffres à retenir pour le match de lundi soir. Une recherche de Katherine Harvey-Pinard.