Après le match, Dominique Ducharme a lancé une phrase, LA phrase, qui résume mieux que n’importe quoi le Canadien des dernières années : « Carey nous a gardés dans le match. »

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Voilà. Tout est dit.

C’est Ducharme qui l’a prononcée lundi soir au Centre Bell. Avant lui, Claude Julien, Michel Therrien et quelques autres l’ont prononcée aussi. Cette phrase, chez le Canadien, c’est devenu un classique, comme un grand succès que l’on peut ressortir quand bon nous semble, autour d’un feu, un peu comme une toune de Paul Piché que l’on gratte à la guitare sèche par un 24 juin.

D’ailleurs, Heureux d’un printemps n’est pas une chanson que les membres du CH ont fredonnée souvent dernièrement, mais bon, on s’égare.

Tout ça pour dire que lundi soir, les Maple Leafs de Toronto sont venus au Centre Bell pour y cueillir une victoire de 2-1, et saisir une avance de 2-1, aussi, dans la série.

Ce n’est pas dramatique. Mais pour les partisans du Canadien, cette défaite avait des allures de vieux classique qu’on aimerait ne plus jamais entendre. Carey fait des arrêts (celui sur Spezza, par ailleurs, faites-vous plaisir et allez revoir ça en boucle), Carey fait d’autres arrêts, encore et encore, mais le club ne marque pas.

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Carey Price en 2e période.

Au fait, depuis le début de cette série, le Canadien a marqué quatre buts en trois matchs. Ça explique que les Leafs sont en train de s’en sortir avec un gardien de 29 ans qui n’avait jamais joué en séries avant cette année.

« Il joue bien mais on pourrait lui rendre la vie plus difficile, a admis Brendan Gallagher. Nous avons besoin d’en faire plus. »

Ce refrain-là aussi est usé à la corde, et c’est probablement le moment de rappeler que depuis 2015, le club montréalais a disputé 31 matchs des séries… et a marqué un total de 63 buts. C’est à peine une moyenne de deux buts par match.

C’est ce qui arrive aux équipes comme celle-ci, bâties à l’envers et à partir de l’arrière, une stratégie qui aurait été parfaite dans les années 1990. Mais le hockey a changé, et il n’y a personne qui peut prétendre au trophée de Lord Stanley sans avoir des marqueurs de premier plan dans sa formation.

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Nick Suzuki (14) a compté le seul but du Canadien.

On peut aussi se demander si la recette Marc Bergevin – des joueurs de caractère, des leaders en masse, du papier sablé en quantité comme si on était dans un entrepôt chez RONA –, peut vraiment fonctionner.

C’est un peu pour ça que le Canadien doit s’en remettre à un jeune de 20 ans pour sauver la mise. Au moins, le Canadien a (enfin) eu la brillante idée d’envoyer Cole Caufield sur la glace, parce que lui sait marquer des buts. Il n’a pas marqué lundi soir mais un de ses tirs est allé droit sur le poteau. On ne voit pas comment il a pu se retrouver dans les gradins pendant les deux premiers matchs. On ne voit pas pourquoi il y retournerait non plus.

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Cole Caufield en action en première période.

Alors c’est ça : après toutes ces années, le Canadien s’en remet encore à Carey Price parce qu’avec lui, tout est possible, et surtout, parce que de la manière dont ce club a été construit, c’est la seule issue possible. C’est comme ça depuis maintenant plus de 10 ans.

Cole Caufield aura intérêt à être bon.

Dans le détail

Lehkonen tombe au combat

La série n’est vieille que de trois matchs, mais chacun d’eux a coûté un employé de soutien au Canadien. Jake Evans n’a pas terminé la rencontre inaugurale. Eric Staal a raté le troisième parce qu’il n’était « pas à 100 % ». Et voilà qu’Artturi Lehkonen a dû déclarer forfait dès la première période, lundi. Il n’a pas été possible d’obtenir de mise à jour sur son état de santé. Son absence pendant la majorité de la rencontre a forcé Dominique Ducharme à jongler avec ses trios. Paul Byron, qui avait déjà pris la place de Staal au centre de la quatrième unité, s’est notamment retrouvé à temps partiel à la gauche de Phillip Danault, tandis que les autres centres ont fait du « temps supplémentaire » pour combler le vide subséquent.

En boucle aux jeux de la semaine

Il y a de ces arrêts qu’on sait qu’on reverra souvent d’ici à la fin des séries éliminatoires. Celui qu’a réalisé Carey Price en première période contre Jason Spezza est à classer dans cette catégorie. Le vétéran joueur des Leafs avait tout le temps du monde pour décocher un tir de qualité dans une cage abandonnée, à plus forte raison alors qu’il se trouvait sur son côté fort – un droitier à la droite de Price. Or, le gardien du Canadien a plongé, étirant suffisamment son bâton pour dévier la rondelle hors cible devant un Spezza incrédule. Sobrement, Price a indiqué qu’il avait fait un geste de « désespoir », sachant que son opposant s’apprêtait à tirer. Le portier a continué à jouer de manière dominante lundi, faisant dire au défenseur Morgan Rielly qu’il pouvait être « décourageant » d’affronter un gardien qui est à ce point « dans sa zone ». Ironiquement, Rielly a peut-être profité de la seule faiblesse de Price jusqu’ici pour inscrire le but gagnant.

Quel avantage ?

Le Canadien s’est vu offrir un rare cadeau tôt en première période : quatre minutes d’avantage numérique, gracieuseté d’un bâton élevé d’Alex Galchenyuk au visage de Brendan Gallagher. Pendant ces 240 secondes, aucun tir n’a atteint le filet des Leafs. En fin de période, Justin Holl a été puni pour bâton élevé. Une minute et 54 secondes d’avantage numérique a suivi. Sans tir. Au cours des présentes séries éliminatoires, le Tricolore est l’une des deux seules équipes, avec le Wild du Minnesota (avant le match de lundi à Vegas), à n’avoir inscrit aucun but avec l’avantage d’un homme. C’était déjà difficile en deuxième moitié de saison pour le CH – 13,4 % d’efficacité au cours des 25 derniers matchs –, mais en ce moment, cette unité est tout simplement inoffensive. En fait, réussir une simple entrée de zone apparaît comme une mission impossible. « Les quatre minutes en partant, on doit en profiter, mais on ne l’a pas fait », a reconnu l’entraîneur-chef Dominique Ducharme, qui a parlé d’« une combinaison de plusieurs choses », notamment des carences sur le plan de l’exécution et une incapacité à remporter les batailles à un contre un. « On va en parler encore et se préparer pour [mardi] », a-t-il promis.

Ils ont dit

Les Leafs ont eu quelques longues présences dans notre territoire lors de la deuxième période et nous devrons faire mieux.

Brendan Gallagher

Je ne suis pas frustré. Pas du tout. Je crois en nos joueurs, je crois qu’ils font tout en leur possible. Je ne doute pas qu’ils essaient de marquer des buts, et je ne doute pas en leur capacité de marquer des buts.

Carey Price

De toute évidence, nous avons éprouvé des ennuis lors de la deuxième période. Or, il m’appert qu’ils aient réussi à saisir ce que l’on pourrait qualifier de momentum, qu’ils aient eu le vent en poupe, si on veut, et que cela leur fut suffisant afin de saisir ce triomphe.

Shea Weber

Cole Caufield a été bon, il a bien patiné. Il a obtenu des occasions de marquer et il a réussi quelques bons lancers. Il a connu un bon match.

Dominique Ducharme

En hausse

Cole Caufield

Trois tirs au but, aucun point, mais le meilleur attaquant du Canadien lors de ce match numéro trois.

En baisse

Ben Chiarot

C’est devenu de plus en plus difficile pour lui.

Le chiffre

1967

Cette victoire des Leafs fut la première du club torontois en séries à Montréal depuis les séries du printemps 1967.