Jake Allen l’avoue sans gêne : si on lui avait dit, avant le début de la saison, qu’il obtiendrait davantage de départs que Carey Price, il aurait probablement éclaté de rire.

Mais comme cette saison 2021 n’a rien de normal, c’est bien lui qui a obtenu le plus de boulot parmi les gardiens du Canadien. Et son travail est aujourd’hui récompensé, alors qu’il reçoit le trophée Jacques-Beauchamp, remis chaque année au joueur du Tricolore ayant eu un rôle déterminant au sein de l’équipe sans toutefois en retirer d’honneur particulier. Cette récompense est attribuée à la suite d’un vote des membres des médias montréalais qui suivent l’équipe. Joel Edmundson et Corey Perry ont terminé aux deuxième et troisième rangs du scrutin.

Avec sa fiche de 11-12-5, sa moyenne de buts alloués de 2,68 et son taux d’arrêts de ,907, on ne retrouvera pas le nom d’Allen parmi les candidats au trophée Vézina. Mais en l’absence de Price, forcé à rater une vingtaine de matchs en raison de deux blessures, l’ancien des Blues de St. Louis a tenu le fort et, plus souvent qu’à son tour, sauvé les fesses de ses coéquipiers lorsque ceux-ci cherchaient leurs repères.

Sourire en coin, Allen a souligné que la dernière année a été « intéressante ». C’est peu dire.

En septembre dernier, à 30 ans, il a été échangé pour la première fois de sa carrière professionnelle pour joindre le Canadien. Enfin, se réjouissait-on dans la métropole, le CH avait trouvé un adjoint de qualité pour Carey Price.

La saison, on le sait, s’est amorcée sur les chapeaux de roue, et les deux gardiens se partageaient le boulot. Puis Claude Julien a perdu son poste d’entraîneur-chef, et Price a commencé à voir davantage d’action. Jusqu’à ce qu’il se blesse une première fois, puis une deuxième. Chaque fois, Allen a répondu à l’appel, malgré les multiples déboires offensifs et défensifs des patineurs devant lui.

Néanmoins, « c’est sans doute hors de la glace que la transition a été la plus difficile », a-t-il expliqué. Sa famille et lui se sont établis à Montréal en pleine pandémie, mais au mois de mars, sa femme et ses enfants sont rentrés au Nouveau-Brunswick, province d’origine d’Allen.

« Depuis décembre, ç’a été manger, dormir, hockey et travail, a rappelé le gardien. On a dû composer avec ça et en tirer le meilleur. »

Il estime d’ailleurs que cette campagne a été « plus difficile que la plupart des saisons de 82 matchs ».

Chez le Canadien, il dit s’être senti immédiatement chez lui, alors que ses nouveaux coéquipiers l’ont accueilli « à bras ouverts ». « Je me sens confortable, en confiance. »

La chose qui lui a le plus manqué, selon lui, est la présence des partisans dans les gradins. Il trépigne d’impatience à l’idée de vivre « l’expérience complète » dans un Centre Bell bondé, ce qui n’arrivera vraisemblablement pas avant l’automne prochain, au plus tôt.

Enfin les séries

Cette saison hors norme s’achève toutefois ce mercredi soir contre les Oilers d’Edmonton, après quoi on passera aux choses sérieuses, chez le Canadien, en affrontant les Maple Leafs de Toronto en séries éliminatoires.

Déjà que de jouer contre les Leafs « est toujours spécial », le faire dans le premier choc entre ces deux vieux rivaux depuis 1979 représente un défi « emballant, mais dur » qu’Allen aborde avec fébrilité.

« Ils ont eu notre numéro pendant la saison, mais c’est un nouveau chapitre qui s’amorce », a-t-il rappelé, en écho aux sept 7 en 10 matchs qu’ont obtenues les Torontois contre le CH depuis le mois de janvier.

« Ce ne sera pas toujours parfait », a prévenu le gardien, car « ce n’est jamais parfait en séries ». Mais il faudra impérativement que le Canadien revienne à son ADN, ajoute-t-il. Jouer sans hésitation et sans relâche, user de vitesse en zone neutre, en transition vers la zone adverse, et ne pas lésiner sur le jeu physique afin que les joueurs des Leafs n’aient pas le temps de « reprendre leur souffle ».

Le changement d’entraîneur a nécessité une inévitable adaptation au cours de la saison. Or, rappelle-t-il, quand son équipe réussit à revenir cette identité, elle connaît du succès.

Contre Auston Matthews et les Leafs, la marge d’erreur sera mince, voire inexistante.

N’empêche, « ça va être le fun », promet Jake Allen.