Jordan Harris est sans doute l’espoir le plus sous-estimé de l’organisation du Canadien.

Ce défenseur de 20 ans, repêché en troisième ronde en 2018, vient de compléter sa saison à Northeastern, dans la NCAA, avec 19 points en autant de rencontres. Il passait entre 27 et 30 minutes par match sur la glace.

Outre David Farrance, 21 ans, de Boston University, qui a disputé seulement dix matchs, aucun autre défenseur au pays n’a maintenu une aussi bonne moyenne de points par match.

Harris possède un profil qui manque au Canadien : il patine comme le vent et possède un bon flair offensif. L’organisation du Canadien garde évidemment un œil attentif sur la situation et espère le mettre sous contrat le plus rapidement possible.

Mais si Northeastern a subi l’élimination aux mains de Massachussetts University dimanche, les Huskies ont encore un mince espoir d’être sélectionné pour le tournoi de 16 équipes à la fin mars. Il faudra attendre à dimanche prochain avant d’être fixé. Northeastern est classé 20e au pays, mais avec la pandémie, qui sait si l’équipe ne se faufilera pas dans le tournoi.

Avec la blessure subie par Ben Chiarot, absent de six à huit semaines, et les ennuis de la troisième paire composée de Brett Kulak et Victor Mete, on se demande même si l’entrée de Harris dans la LNH ne sera pas accélérée, après la signature de son contrat et une quarantaine de 14 jours, évidemment.

Le Canadien n’a pas encore décidé s’il entend lui offrir un contrat de la Ligue américaine pour la fin de la saison et ne pas sacrifier une année d’éligibilité dans les rangs professionnels, comme il l’a fait dans le cas de Cayden Primeau il y a deux ans, ou si on lui offre un contrat de la LNH sur le champ et lui demande de venir en renfort à Montréal.

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Jordan Harris, au camp de perfectionnement du Canadien, en juin 2018.

Un membre de l’organisation m’a confié lundi matin qu’il n’était pas insensé de croire que le jeune homme pourrait être appelé à joindre l’équipe cette saison.

La veille, le directeur du développement des joueurs chez le Canadien, Rob Ramage, a répondu avec prudence à mes questions au cours d’un entretien téléphonique d’une quinzaine de minutes.

« C’est une question pour Marc (Bergevin). J’hésiterais à trancher. Je ne peux affirmer qu’il fera le saut directement à Montréal, mais je ne peux écarter ce scénario non plus. »

Alexander Romanov aurait joué en séries éliminatoires à 20 ans l’été dernier si les règlements l’avaient permis. « Romanov a joué dans la KHL contre des hommes pendant deux ans, répond Ramage. Jordan joue dans les rangs collégiaux. Ce n’est pas la KHL. On ne le saurait pas avant de le voir dans un tel contexte. »

Très peu de défenseurs ont rejoint une équipe de la LNH en pleine course aux séries éliminatoires ou dans les séries éliminatoires après leur saison dans la NCAA. Cale Makar l’a fait à 20 ans en 2019 au Colorado. Il venait d’amasser 49 points en 41 matchs à UMass-Amherst, dans la même division que celle de Harris. Mais Makar est un joueur d’exception et il est devenu immédiatement un catalyseur offensif à Denver.

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Cale Makar

Charlie McAvoy avait 19 ans quand il a joint les Bruins en séries en 2017. Il avait amassé 26 points en 38 matchs à Boston University, dans la division Hockey East, la même que celle de Makar et de Harris. McAvoy avait eu un gros impact dès le départ.

Il ne faut pas s’attendre à ce que Harris ait un tel impact, si jamais il rejoint le Canadien. « Il est sous-estimé et il restera sous-estimé même une fois à Montréal en raison de son style de jeu, me confiait ce même membre de l’organisation lundi matin. Il n’est pas spectaculaire, mais efficace. »

S’il évite de gonfler les attentes, Ramage, cet ancien défenseur des Blues, des Flames et du Canadien, entre autres, dans les années 80 et 90, ne tarit pas d’éloges à l’égard de Harris.

« Il était déjà très bon l’an dernier et il est passé à un autre niveau cet hier. Il patine avec tellement d’aisance et de fluidité. J’aurais aimé patiner ainsi. Il est mobile et très efficace en relance. Il n’est pas le plus gros (5 pieds 11 pouces, 185 lb), alors il doit être rapide. »

Ramage note une grande amélioration de la part du jeune homme au chapitre offensif. « Il m’en montre beaucoup plus en supériorité numérique cette année. Northeastern était très productif à ce chapitre et il était au coeur de cette production. En supériorité numérique, il joue beaucoup. Il ne force pas les choses. Il fait des jeux intelligents. Il ne tente pas de faire des passes à travers trois adversaires. Il garde les jeux simples. Jouera-t-il en supériorité numérique dans la LNH ? Il commence à démontrer qu’il pourra le faire au prochain niveau. »

Avec la blessure à Chiarot, Alexander Romanov a été déplacé du côté gauche, avec Shea Weber. Parmi la banque d’espoirs, Kaiden Guhle, Jayden Struble, Mattias Norlinder et Gianni Fairbrother sont gauchers, Cale Fleury et Josh Brook droitiers. Harris est gaucher, mais peut aussi être utilisé à droite.

« Jordan peut jouer des deux côtés sans problème en raison de sa grande mobilité, mentionne Rob Ramage. Il a surtout joué à droite à sa première année avec Jeremy Davies, un kid de Montréal. Je n’ai vu aucune différence. Pourtant, ça n’est pas toujours évident. Je n’ai jamais joué de l’autre côté, sauf peut-être une fois à l’époque quand Gary Suter s’est blessé à Calgary. »

On aime souvent faire des comparaisons avec des joueurs de la LNH pour mieux visualiser le style de jeu d’un espoir. Ramage ne déteste pas le parallèle avec Marc-Edouard Vlasic, des Sharks de San Jose, dans la façon de jouer uniquement. On ne dit pas ici que Harris deviendra un défenseur comme lui.

« Son jeu dans l’ensemble s’est amélioré. Il joue à la tonne et il ne se fatigue jamais, à cause de son efficacité. Il est non seulement extrêmement mobile, mais très intelligent. Il a tous les attributs qu’on peut aimer chez un défenseur. Maintenant je vais éviter toute projection future. C’est injuste pour les jeunes. Laissons-le se développer. »

Jordan Harris constituera-t-il le troisième joueur de la cuvée 2018 à jouer pour le Canadien cet hiver, après Jesperi Kotkaniemi et Alexander Romanov ? Nous le saurons dans les prochaines semaines…