(Ottawa) Il n’y a pas de manière facile d’écrire ça, pas de façon d’emballer ça avec de la dentelle et un joli ruban non plus, mais voici : Carey Price n’est plus celui qu’il a jadis été.

Ce gardien-là, celui qui est revenu de Vegas le coffre de la voiture rempli de trophées en 2015, celui qui a maintenu des moyennes de 1,96 ou 2,06 pour aller avec des taux d’efficacité de, 933 ou, 934, ce gars-là ne semble plus porter le maillot du Canadien de Montréal.

C’est évident depuis le début de la présente saison, et ça l’a été encore plus mardi soir à Ottawa, dans une défaite de 5-4 contre les Sénateurs en tirs de barrage.

Depuis le début de la saison, le gardien numéro un a accordé au moins 3 buts ou plus lors de six de ses onze rencontres. En ce moment même, son taux de pourcentage d’arrêts (, 893) le place au… 53e rang des gardiens de la LNH à ce chapitre.

On ne va même pas écrire son salaire ici, ou ce que ça représente comme poids sur la masse salariale du Canadien. Parce que l’argent, ce n’est pas tout dans la vie, mais en premier, parce que ce n’est même pas ce qui importe le plus en ce moment.

Ce qui importe, c’est que celui qui a maintes fois été qualifié de meilleur gardien de l’univers a, maintenant, des allures de simple mortel. Vous vous en doutez bien, ce ne sera pas suffisant.

« De toute évidence, ce n’est pas le résultat ou la façon dont je veux jouer, a-t-il répondu mardi soir. Je vais devoir trouver une solution. »

Il le faudra oui, sans quoi il va falloir commencer à poser les questions difficiles. Par exemple, à quel moment cette équipe doit-elle se mettre à faire jouer plus souvent Jake Allen ? Car c’est lui, le numéro deux, qui a des allures de numéro un depuis le début de la saison. À une fraction du prix, en plus.

Les joueurs du Canadien ont bien sûr fait remarquer que Price a tout de même réussi de gros arrêts mardi soir – il a reçu 39 tirs, c’est vrai–, mais ce n’est pas qu’il n’est plus capable de faire les gros arrêts ; c’est qu’il ne semble plus capable de faire les petits, comme par exemple sur le quatrième but des Sénateurs, le deuxième d’un poison nommé Brady Tkachuk, en milieu de troisième, à peine deux minutes après que le Canadien eut pris l’avance à 4-3.

On se remet rarement d’un si mauvais but, et quelques instants plus tard, les Sénateurs sont allés chercher la victoire en déjouant Price à deux reprises sur les tirs de barrage. « Il a effectué des gros arrêts, mais aussi, il y a eu des buts qu’il aimerait revoir », a résumé, avec tact, Claude Julien.

Dans l’immédiat, Carey Price ne s’en va nulle part, mais il sera intéressant de voir si ses performances, jumelées à celles, plus solides, de Jake Allen, vont venir chambouler l’ordre établi. Un ordre établi depuis au moins 15 ans déjà, dans un univers ou personne, ou presque, n’a jamais remis en doute la suprématie du numéro 31. Est-ce le moment de le faire ? La question se pose, oui.

La soirée fut difficile aussi pour plusieurs autres membres du CH, dont Jesperi Kotkaniemi, qui a eu l’air complètement perdu, pendant que Tkachuk corrigeait Ben Chiarot aux poings et volait le show aux points avec deux buts. On ne refera pas le repêchage de 2018 maintenant, ni même plus tard, mais bon, mardi soir fut l’une de ces soirées où c’est le choix des Sénateurs qui a eu le meilleur haut la main.

Le but refusé à la fin ? Ah oui. Vous irez lire les commentaires de Brendan Gallagher à ce sujet, on ne saurait dire mieux. Seulement voilà, il est devenu de plus en plus difficile de savoir ce qui est un but dans cette ligue, comme il est difficile de savoir ce qui est un catch dans la NFL ou qui chante pour de vrai sur TikTok.

Mais le Canadien n’avait pas à en venir à ça. Juste un ou deux gros arrêts de plus, ou même un petit, et l’histoire eut été fort différente.

Dans le détail

Est-ce un but ? Pas un but ? Fouillez-nous !

Il restait à peine trois secondes à faire au cadran quand un tir de la pointe de Ben Chiarot s’est retrouvé derrière le gardien Matt Murray. Les joueurs du Canadien ont célébré mais pas trop vite, parce que tout s’est arrêté pour laisser le temps aux bonnes gens de Toronto d’aller regarder la reprise… et puis le but a été refusé. La raison ? Le gardien Murray, après le contact initial avec Brendan Gallagher, n’a pas été en mesure de reprendre sa position. Après la rencontre, Gallagher n’en revenait pas encore. « La ligue nous montre une vidéo avant chaque saison, a-t-il expliqué. On voit des jeux ; l’an passé, on a vu un joueur des Islanders qui a fait contact avec (le gardien Frederik) Andersen des Maple Leafs, qui a eu le temps de se replacer, et le but a été accordé […] Pour une raison que j’ignore, cette fois, ce fut jugé d’une manière différente. À mes yeux ça détruit notre produit, ce manque de constance. »

Un peu de rififi

En début de journée, les Sénateurs avaient déjà donné le ton en rappelant un attaquant, Micheal Haley, qui ne sera jamais confondu avec un joueur de finesse. Cela faisait suite au match précédent, celui de dimanche, quand Phillip Danault avait asséné un coup de bâton à la gorge de Tim Stützle en troisième période. Eh bien, comme il fallait le prévoir, ça s’est mis à brasser rapidement entre les deux clubs mardi soir, surtout lors de la première période, qui a donné lieu à un furieux combat entre Brady Tkachuk et Ben Chiarot, avec comme résultat que le défenseur du Canadien s’en est sorti avec un nez bien saignant. De toute évidence, il commence à y avoir de mauvaises intentions entre ces deux clubs. « Je ne crois pas que Brady Tkachuk ait déjà joué un meilleur match que ce soir. », a commenté D. J. Smith, l’entraîneur des Sénateurs.

Retour de Kulak

Après avoir été laissé de côté lors du match précédent de dimanche, Brett Kulak était de retour mardi soir à Ottawa, prenant cette fois la place d’un autre défenseur, Victor Mete, on puis on va se le dire, il n’a pas super bien paru en partant. Sur le premier but des Sénateurs, celui de Drake Batherson, il a un peu trop rapidement abandonné sa position, et puis cette mauvaise décision, combinée au très mauvais repli défensif de Jesperi Kotkaniemi, a mené à ce but des Sénateurs. Au final, Kulak a connu une soirée difficile au bureau, mais il a quand même ajouté une aide à sa fiche.

Ils ont dit

On a travaillé fort et nous pouvons bâtir quelque chose à partir de cette performance… On a eu un début de match difficile, et Carey nous a gardés dans le match. Pour ce qui est du but refusé, tout le monde a son opinion. Gallagher s’est fait pousser et il a eu le temps de se relever mais pas le gardien apparemment… Je ne vais pas en rajouter.

Shea Weber

Les Sénateurs jouent de manière intense et ils rendent la vie difficile à ceux qui doivent les affronter.

Carey Price

On a très mal commencé le match, ça n’a pas été une bonne première période, on a écopé de pénalités coûteuses en 2e période, mais après on a bien joué en 3e période. Y’a eu un peu de tout, mais quand tu prends l’avance 4-3… c’est sûr que le but égalisateur nous a fait mal, et on s’est fait refuser un gros but à la fin, c’est sûr que ça coupe le souffle.

Claude Julien

On a montré beaucoup de maturité. C’est une saison bizarre, mais on voit déjà une amélioration. […] Plus tôt cette année, on perdait ces matchs serrés, maintenant on trouve le moyen de gagner. […] Il y a tellement de potentiel dans cette équipe, c’est plaisant d’en faire partie.

Brady Tkachuk

En hausse

Shea Weber

On a revu le Weber des beaux jours, lui qui a réussi deux buts, en plus d’avoir un +2 à sa fiche.

En baisse

Carey Price

Combien de mauvais buts mardi soir ? Au moins trois.

Le chiffre

4

Carey Price a accordé quatre buts ou plus dans 6 de ses 13 derniers départs en saison régulière.