Il n’y a pas si longtemps, les points de presse pouvaient constituer un exercice pénible pour Jonathan Drouin.

Drouin, après tout, avait coûté un défenseur de premier plan, Mikhail Sergachev, en 2017, il ne produisait pas toujours à la hauteur d’un troisième choix au total, son manque de « hargne » était souvent décrié et, par surcroît, il était l’un des rares joueurs de premier plan francophones du Canadien…

On avait trop souvent à lui demander pourquoi il ne produisait pas, si la pression était trop forte, s’il était satisfait de ses compagnons de trio, etc.

Il a fallu attendre une quinzaine de minutes avant d’entendre la première question portant sur lui, mardi midi. On lui a parlé des déboires de Paul Byron, de Tomas Tatar, de l’infériorité numérique, d’un peu tout ce qui fonctionnait un peu moins bien, mais pas de lui.

À 25 ans, bientôt 26, il affiche une belle sérénité. Il est bien ancré à l’aile gauche du premier trio avec Nick Suzuki et Josh Anderson, et sa production demeure intéressante, avec 11 points en 15 matchs depuis le début de la saison. On remarque aussi chez lui un plus grand engagement pour le jeu défensif et les batailles pour la rondelle dans les coins de patinoire.

Sergachev apporte beaucoup au Lightning de Tampa Bay. Encore cette année, il a amassé 11 points à ses 14 premiers matchs et vient au troisième rang de l’équipe au chapitre du temps d’utilisation, derrière Victor Hedman et Ryan McDonagh, mais le jeu de Drouin permet à l’organisation et aux fans de mieux accepter la transaction.

Drouin respire la quiétude, et on découvre davantage son côté terre à terre. Quand un collègue lui a demandé s’il ne regrettait pas les bons vieux jours où il pouvait fréquenter ses coéquipiers davantage à l’extérieur de la glace, il a fait preuve d’empathie.

« On est chanceux. Plusieurs n’ont pas réussi à garder leur emploi avec la pandémie. Nous, on est chanceux de pouvoir continuer à jouer au hockey et de s’amuser. On ne peut pas manger dans les restaurants, mais on est habitués, on l’a fait avec la bulle à Toronto. »

On est chanceux de continuer à faire ce qu’on aime.

Jonathan Drouin

Claude Julien a remarqué le changement au camp d’entraînement.

« Jonathan a une bonne attitude cette année, souligne l’entraîneur-chef du Canadien. Son état d’esprit est bon. Je lui ai parlé justement avant le dernier match pour lui dire de ne pas voir seulement à faire des jeux, mais d’aller au filet, et il l’a fait lors du dernier match. Il veut bien faire. On recommande certaines choses, il le fait. S’il continue à faire ces petites choses-là, les buts vont suivre. C’est déjà un bon fabricant de buts, mais il peut aussi marquer. Il s’est bien ajusté dans le dernier match. »

Drouin a dix mentons d’aide à sa fiche, mais un seul but. C’est presque le contraire avec Josh Anderson : neuf buts et deux mentions d’aide. Les deux se complètent bien. Mais Drouin comprend les avantages de lancer plus souvent.

« Je ne veux pas tirer pour tirer. Il faut contrôler la rondelle, et on le fait bien comme trio. J’aime les tirs de qualité. J’ai vu les occasions dans le dernier match et je l’ai fait. »

Son jeu dans l’ensemble est supérieur cette saison. « Je sais quoi faire. Tu dois amener quelque chose quand tu ne marques pas et je dois m’assurer de patiner, en zone offensive comme dans les replis. Je suis heureux de mon jeu. Je suis impliqué dans les jeux. Ma constance est bonne. Comme trio, on veut continuer à faire ce qu’on fait. On provoque des choses avec notre vitesse. »

Drouin est un abonné à la salle de vidéo. Il aime décortiquer les tendances adverses et chercher des solutions pour s’améliorer. Il le fait désormais avec les autres membres de son trio, Anderson et Suzuki.

« On regarde beaucoup de choses ensemble. Si tu le fais comme trio, tu es sur la même longueur d’onde. On a regardé d’autres bons trios de la LNH. Le trio de Patrice Bergeron, à Boston, provoque tellement de choses. Ils foncent au filet. Ils ne se compliquent pas la vie. »

Drouin s’inspire aussi de la hargne de son colosse ailier droit Anderson, 6 pi 3 po et 225 lb de vitesse, de fougue et de talent. « Tu ne veux pas être un passager [avec lui]. Tu vois ton coéquipier à 100 milles à l’heure, tu le vois frapper, je dois être à ce niveau [d’intensité]. On veut être un trio qui peut faire la différence quand l’équipe a besoin de momentum. On peut récupérer tellement de rondelles grâce à lui. »

Le Canadien dispute son prochain match samedi seulement. Voyons si ce trio pourra maintenir son rythme pour les 37 derniers matchs.

La polyvalence de Toffoli

Les fans du Canadien découvrent non seulement un marqueur en Tyler Toffoli, mais également un joueur très polyvalent. Le directeur général de l’équipe olympique canadienne, Doug Armstrong, dit même l’avoir dans sa ligne de mire. Un compliment accepté avec beaucoup d’humilité par le principal intéressé.

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Tyler Toffoli

« C’est vraiment cool, mais la saison est encore jeune. Si ça arrive, ce serait extraordinaire, mais il y a tant de bons joueurs au sein de cette équipe. Je vais me contenter, pour l’instant, de dire que je vais tenter de faire mon mieux avec le Canadien et tenter de faire les séries… »

D’où lui vient cette polyvalence ?

« Je n’aurais jamais pu percer dans la LNH avec les Kings de l’entraîneur Darryl Sutter et du directeur général Dean Lombardi sans faire les bons jeux dans toutes les zones. Offensivement, j’ai toujours su trouver les ouvertures. On me disait toujours trop lent. Il faut être intelligent. Ne pas aller dans les ouvertures trop vite, laisser les ouvertures se créer. »

Patience avec les jeunes centres

Nick Suzuki doit s’habituer à une surveillance accrue au centre du premier trio. Il a d’ailleurs 1 seul point à ses 5 derniers matchs, après en avoir amassé 11 à ses 10 premiers.

« Il y a des moments où tu ne peux pas faire grand-chose pour contrer cette surveillance rapidement, explique Julien. C’est une question d’expérience et de vécu. Il est très intelligent. Il trouvera par lui-même. Il faut le vivre.

« On est très jeunes au centre. Il faut être patients avec ces gars-là. Même chose dans le cas de Kotkaniemi et même de Jake Evans. On est chanceux de les entourer avec de bons vétérans à droite et à gauche. On espère que le développement va suivre rapidement. »

De bons mots pour Byron

Julien avait un message pour Paul Byron, deux jours après que celui-ci eut été soumis au ballottage.

« On aime encore Paul. Comme entraîneur, je suis content qu’il soit encore ici. On a de la profondeur qui est un avantage et on n’a pas de blessures. On prend des décisions difficiles de temps en temps, mais on sait tout ce que Paul peut amener à l’équipe. »

Drouin compatit avec son coéquipier. « C’est difficile à voir, un adjoint au capitaine au ballottage. Mais il faut continuer à aller de l’avant. Paul, tu n’as pas vu de différence avec lui, le lendemain. Tomas, un de nos meilleurs compteurs dans les dernières années, a été rayé de la formation, et [de son côté] non plus, il n’y a pas eu de changement, côté attitude. »