Faire contre mauvaise fortune bon cœur. L’expression résume à merveille ce que font Joël Teasdale et Rafaël Harvey-Pinard afin de garder la forme pendant que les centres d’entraînement sont fermés.

Résumons. Dans un monde sans pandémie, les deux jeunes hommes auraient joué pour le Rocket de Laval cette saison. Le gymnase, l’accès à la patinoire : tout aurait été géré par l’équipe.

Dans un monde avec pandémie, bien… Le hockey de la Ligue américaine ne reprendra pas avant le 5 février. Et les deux joueurs sont essentiellement pris à la maison, comme nous tous.

La maison pour Teasdale, c’est un duplex à Blainville, dont il a pris possession l’été dernier. La maison pour Harvey-Pinard, c’était en fait celle de ses parents, à Arvida. Mais en septembre, à la suite de la recommandation de l’entraîneur-chef du Rocket de Laval, Joël Bouchard, Harvey-Pinard s’est installé à Blainville. Tout près de chez Teasdale, justement.

Ce n’est pas un hasard. Ils ont été coéquipiers deux années de suite pour l’équipe de la LHJMQ dans la série Canada-Russie. Puis, au milieu de la saison 2018-2019, Teasdale a été échangé aux Huskies de Rouyn-Noranda, l’équipe de Harvey-Pinard. Quelques mois plus tard, ils soulevaient ensemble la Coupe Memorial.

« Ça a vite cliqué avec lui pendant la série Canada-Russie, explique Teasdale, en entrevue avec La Presse. Quand j’ai été échangé à Rouyn, il est devenu un de mes bons amis. C’est le fun de l’avoir avec moi ! »

La compagnie

Comme ils sont voisins, comme Teasdale a de l’espace dans sa cour et comme Harvey-Pinard n’en a pas, les deux complices s’entraînent ensemble. Zone rouge oblige, le gymnase où ils s’exercent habituellement, le Centre Performe Plus, est fermé.

En zone rouge, il existe un certain flou dans les règles. « Seules les activités individuelles ou en duo (dans le respect de la distanciation requise) et les entraînements sous forme individuelle seront permis », écrit le gouvernement du Québec. Cette zone grise n’existait toutefois pas lors du premier confinement, en mars et en avril, quand c’était chacun chez soi.

Au printemps, c’était pas mal différent. J’avais zéro équipement et pas d’accès à une cour, parce que j’habitais en appartement. Il n’y avait pas beaucoup de place ! En ce moment, on peut tout de même s’entraîner dehors.

Joël Teasdale

« Et au printemps, la seule personne avec qui je m’entraînais, c’était ma blonde. Ce n’est pas pour être plate, mais ce n’était pas le même défi ! Elle est en forme, mais pas autant que moi ! Avec Rafaël, ça me donne une bonne motivation. »

Avec les moyens du bord

Les deux attaquants sont en début de carrière. Harvey-Pinard a en poche un simple contrat d’un an de la Ligue américaine, où le salaire minimum est de 51 000 $US. Contrat qu’il n’a pas encore commencé à écouler. Et Teasdale, lui, a signé un contrat de recrue de trois ans qui lui rapporte 70 000 $ par saison quand il joue dans la Ligue américaine.

Oubliez donc l’image du joueur de hockey avec le garage triple et tout ce qui vient avec. Oubliez aussi l’équipement d’entraînement flambant neuf.

« Moi, pour le gym, je n’ai pas grand matériel », a admis Harvey-Pinard en visioconférence cette semaine.

On a été chercher du matériel par-ci, par-là. On a un vélo stationnaire, on a des poids. Ma blonde en avait, la tante à Joël aussi. On a acheté un ballon, des tapis.

Rafaël Harvey-Pinard

La facture ? « Peut-être 100 $ », calcule Teasdale.

« J’ai demandé des poids de 50 lb et de 35 lb en cadeau à ma marraine. Rafaël a ramené des 25 lb du Saguenay. J’ai acheté une roulette pour faire les abdos. Le vélo stationnaire, on me l’a prêté. On a été débrouillards. Au début, je cherchais sur l’internet, mais ce n’est vraiment pas donné ! Avec les gyms fermés, il y a des gens qui en profitent et qui augmentent les prix. »

L’entraînement hors glace est d’autant plus important que Teasdale n’a pas joué un seul match depuis mai 2019, puisqu’une blessure à un genou lui a fait rater la totalité de la dernière saison. De plus, l’accès à des patinoires est compliqué en zone rouge. Harvey-Pinard, par exemple, racontait qu’il chaussait les patins trois fois par semaine, chaque fois pour du travail individuel.

Pour le programme, le hasard fait bien les choses. Le préparateur physique personnel de Teasdale est Stefano Lanni, qui est également coordonnateur de la préparation physique chez le Rocket. Lanni lui a donc laissé un plan à exécuter à la maison.

« La première semaine, le premier mois, je n’avais rien. C’était difficile de travailler fort, c’était beaucoup plus cardio que musculaire, résume Harvey-Pinard. Mais là, je peux travailler le musculaire et prendre de la masse.

« On s’entraîne quand même fort même si on a du matériel limité. On n’a pas beaucoup de matériel, mais on a le nécessaire. C’est mieux que de ne rien avoir ! »