Déjà, en février, lors d’une longue conversation dans ses bureaux du Centre Bell, Marc Bergevin avait laissé filtrer des bribes de son plan à long terme.

Nick Suzuki allait éventuellement devenir le premier centre de l’équipe. Phillip Danault, qu’il qualifiait de « centre de milieu de formation », c’est-à-dire meilleur qu’un troisième centre, mais pas de premier centre, demeurait important, mais il devrait passer le flambeau tôt ou tard.

Depuis quelques années, Danault occupe le poste de premier centre du Canadien avec efficacité. Il obtient en moyenne une cinquantaine de points par saison, affronte les gros trios adverses et s’acquitte des tâches défensives importantes.

Cet hiver en saison régulière, Claude Julien l’a utilisé en moyenne 18 min 51 s par match, soit presque deux minutes de plus que l’attaquant suivant, Joel Armia. Le temps d’utilisation est comparable, à quelques secondes près, à celui de Brayden Point, Patrice Bergeron, Elias Pettersson, Logan Couture et Steven Stamkos.

Danault a aussi terminé au 15e rang chez les centres de la LNH pour les points en égalité numérique (43), devant entre autres Elias Pettersson, Ryan O’Reilly et Aleksander Barkov.

Malgré tout, les choses ont changé en séries éliminatoires. Danault n’était plus le seul centre de confiance du Canadien. Il est demeuré l’attaquant le plus utilisé de l’équipe (19 min 34 s), mais il était désormais talonné par un certain Nick Suzuki (19 min 11 s).

À un certain moment de la ronde préliminaire contre les Penguins, Danault s’est retrouvé entre Paul Byron et Artturi Lehkonen et Suzuki s’est substitué à lui au centre de Tatar et de Gallagher. Jesperi Kotkaniemi, lui, a hérité de Jonathan Drouin et Joel Armia.

Lors du dernier match de la série contre les Flyers de Philadelphie, dirigé par Kirk Muller, Danault a joué pendant 17 min 40 s, contre 21 min 13 s pour Suzuki, auteur de deux buts et deuxième étoile du match.

Même Jesperi Kotkaniemi s’est rapproché du temps d’utilisation de Danault à 17 min 09 s, mais presque trois minutes de plus que le Québécois à égalité numérique.

Privé de temps d’utilisation en supériorité numérique, Danault a amassé seulement 3 points, dont 1 but, en 10 matchs. Suzuki a obtenu sept points, dont quatre buts, au sommet des compteurs du CH. Kotkaniemi a compté quatre buts lui aussi.

Danault n’est pas dupe. Il a vu le flambeau se passer en séries. Il n’a pas aimé. Et l’a affirmé clairement au lendemain de l’élimination de l’équipe. « J’ai vu mon rôle changer en playoffs, mais avec ce que j’ai prouvé, mon rôle ne devrait pas changer à Montréal. »

Qu’il mérite un tel sort ou non, Phillip Danault devra se résigner. S’il souhaite demeurer le centre numéro un de l’équipe et être payé comme tel, il devra se trouver une autre équipe à l’expiration de son contrat au terme de la saison 2020-2021.

On ne connaît pas les exigences salariales de Danault et de son agent, le coriace Don Meehan. Mais le DG du Canadien leur a envoyé un message brutal, mais clair, lors de son point de presse jeudi.

En lisant entre les lignes, on saisit l’essentiel de ses propos : le DG du Canadien a beaucoup d’affection pour ce joueur qu’il a repêché à l’époque à Chicago, il souhaiterait le garder à Montréal, mais pas à n’importe quel prix.

Après avoir refoulé quelques larmes en évoquant la force morale de Brendan Gallagher, il a rappelé, en réponse à une question sur Danault, qu’il n’était pas pressé de négocier avec son clan, que les vacances l’attendaient et que dans le pire des scénarios, le Canadien comptait sur de nombreux centres à caractère plus défensifs dans son organisation, entre autres Jake Evans et Ryan Poehling.

Rappelons-nous d’ailleurs ce qu’il affirmait à propos de Poehling lors de cette interview en février à La Presse : « Dans ma tête, Poehling deviendra dans quelques années ton centre de troisième trio qui va gagner des mises en jeu, qui va jouer en désavantage numérique et affronter les gros trios adverses dans une très bonne équipe de hockey. »

Le Canadien a besoin de Danault s’il veut redevenir une équipe de premier plan. Dans un monde idéal, le Québécois signerait un contrat semblable à celui de Jean-Gabriel Pageau à Long Island, cinq millions pour six ans. Bergevin lui a d’ailleurs laissé une porte ouverte à une négociation jeudi, en faisant un parallèle entre son bureau et un dépanneur… toujours ouvert.

Avec l’arrivée Josh Anderson et Tyler Toffoli, Danault, 27 ans, aura l’embarras du choix comme ailier droit. Il n’est pas impossible qu’il demeure avec Gallagher non plus. C’est même probable.

Un pensez-y-bien, d’autant plus que le Canadien a le gros bout du bâton à l’heure actuelle.

• Relisez l’interview de Marc Bergevin accordée à Mathias Brunet en février.

À LIRE

C’est officiel, Jesperi Kotkaniemi jouera au hockey ces prochaines semaines en Finlande en attendant la reprise des activités dans la LNH. Richard Labbé a les détails.