Au moment où tout s’est arrêté, jeudi le 12 mars, Joël Bouchard était occupé à sa routine habituelle: regarder des vidéos dans son bureau, préparer le prochain match, parler de stratégie avec ses assistants. Puis, la normalité a cessé.

« La veille, on venait tout juste de gagner un gros match, 3-0, contre les Sénateurs de Belleville, l’une des meilleures équipes de la ligue, explique-t-il en entrevue téléphonique avec La Presse. On venait probablement de disputer l’un de nos meilleurs matchs de la saison. »

« Puis le jeudi, j’ai reçu le texto qui disait que tout était arrêté… »

PHOTO D’ARCHIVES CHAMBERLAND, MARTIN, LA PRESSE

Tout s’est arrêté pour le Rocket et Joël Bouchard, qu’on voit ici l’automne dernier.

Depuis, dans l’univers du hockey de la Ligue américaine, c’est un peu comme dans la Ligue nationale, et aussi dans le reste de la planète: on attend. Tout le monde attend. Ça veut dire les partisans, ça veut dire les joueurs, et ça veut dire les entraîneurs comme Joël Bouchard.

« Il n’y a personne qui sait quand ça va reprendre, ajoute-t-il. Alors moi de mon bord, j’en profite pour classer mes affaires, pour faire un peu de vidéo à distance. On parle avec nos joueurs par texto, il y a des groupes qui ont été créés pour ça. Alors quand ça va reprendre, on va être prêts, on sait où on en est. »

À titre d’entraîneur, Joël Bouchard doit justement s’assurer de ce léger détail: que ses joueurs soient prêts au moment où la normalité va revenir. Le défi, bien évidemment, c’est de rester prêt sans connaître la date du prochain entraînement, du prochain match.

Sans connaître la date de rien, parce que personne ne la connaît de toute façon.

PHOTO D’ARCHIVES MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

« Ce qui se passe en ce moment, c’est plus gros que le hockey », dit l’entraineur Joël Bouchard, qu'on voit au camp d’entraînement du Rocket de Laval l’an dernier.

« Il y a tellement d’impondérables avant d’en arriver là… mais de nos jours, les joueurs n’ont pas besoin de grand-chose pour pouvoir s’entraîner. »

Il y a des vidéos en ligne qui sont disponibles pour être en mesure de faire des entraînements réguliers avec pas grand-chose; tout ce dont t’as besoin, c’est d’un plancher!

L’entraîneur du Rocket Joël Bouchard

« Alors je ne suis pas inquiet pour ça, nos gars vont être prêts quand ça va être le temps. Mais c’est dur de savoir de quoi ça va avoir l’air au retour. Personne n’a jamais vécu quelque chose comme ça auparavant. »

Joël Bouchard insiste sur une chose: il ne pense pas à ce qui est perdu avec cette crise. Bien sûr que son équipe allait bien au moment de cette pause très involontaire, bien sûr que son Rocket était en voie de, peut-être, se faire une place au classement des séries, ce qui aurait pu être une première en trois ans d’existence à Laval pour le club école du Canadien de Montréal. Avec 14 matchs à disputer au calendrier, le Rocket se retrouvait à seulement quatre points d’une place en séries, et puis la flèche du club pointait très certainement vers le haut.

Mais Joël Bouchard n’est pas amer pour autant.

PHOTO D’ARCHIVES ANDRÉ PICHETTE, LA PRESSE

« On a juste hâte que ça reprenne », dit Joël Bouchard, qu’on voit ici au camp des recrues l’an dernier.

« On avait une fiche de 7-2-1 à nos 10 derniers matchs, ajoute-t-il. Il y a des gens qui me textent et qui me disent, c’est plate, ça allait bien pour vous autres… C’est vrai.

Mais ce qui se passe en ce moment, c’est plus gros que le hockey, plus gros que le Rocket et plus gros que moi. Il n’y a aucune partie de moi qui vit de la déception parce que notre saison s’est arrêtée. Présentement, il y a trop de gens qui sont touchés par cette crise.

Joël Bouchard, entraîneur du Rocket de Laval.

«Alors je suis capable de mettre ça de côté, parce que le hockey va revenir un jour. Je suis fier de nos gars, on a connu des bons moments cette saison, mais là, il y a d’autres priorités. C’est plate de voir que notre saison est arrêtée, mais dans l’échelle de ce qui est plate, ça arrive pas mal en dernier.»

Ça ne veut pas dire que Joël Bouchard ne s’ennuie pas. Comme nous tous, il a très hâte de revoir la glace, de revoir les lumières de l’aréna briller, d’entendre de nouveau le son de la rondelle qui frappe les palettes.

«Pour moi, tous les scénarios sont bons… qu’on recommence la saison cet été, plus tard, n’importe quand, pour moi, tout ça fait du sens, parce que quand la crise va être finie, on voudra tous recommencer à jouer. »

« On a juste hâte que ça reprenne.»