Les conférences de presse des Sénateurs et du Canadien offraient un contraste frappant, lundi.

Ottawa a poursuivi son travail de reconstruction à la date limite des échanges. Il n’y a pas de zone grise. Les vétérans sont échangés pour des choix.

Les Sénateurs détiennent désormais trois choix de première ronde et quatre choix de deuxième ronde en juin. Ils pourraient choisir deux fois parmi les cinq premiers. Ils ont aussi déjà accumulé trois choix de deuxième ronde pour 2021.

La banque d’espoirs est déjà bien garnie. Thomas Chabot, Brady Tkachuk et Colin White sont déjà dans la LNH. Lassi Thomson, Drake Batherson, Josh Norris, Erik Brannstrom, Alex Formenton, Logan Brown, Jacob Bernard-Docker et Shane Pinto devraient les rejoindre ces prochaines années.

Or, on reproche malgré tout au DG Pierre Dorion de ne pas avoir conservé suffisamment de vétérans pour encadrer ces jeunes. Le départ de Jean-Gabriel Pageau, entre autres, a été mal digéré à Ottawa.

C’est le contraire à Montréal. Plusieurs auraient voulu voir plus de vétérans échangés pour des choix au repêchage. Marc Bergevin aurait pu obtenir des choix de première ronde pour Jeff Petry et Tomas Tatar.

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Tomas Tatar et Jeff Petry

Mais le directeur général du Canadien a répété sa volonté de maintenir son plan de réinitialisation entamé en 2018. Il espère en voir les résultats dès l’an prochain. Il n’est pas le seul.

Lequel arrivera le premier au fil d’arrivée entre Ottawa et Montréal ? Il n’y a pas de recette de base. Il y en a mille.

Pour certains, les clubs de tête doivent posséder des superstars à l’attaque. Pourtant, le dernier compteur de 80 points au plus chez les champions en titre, les Blues de St. Louis, remonte à 2003, Pavol Demitra, décédé tragiquement dans un accident il y a quelques années.

D’autres jurent uniquement par le repêchage. Depuis Sidney Crosby il y a 15 ans, voici les choix de première ronde des Penguins de Pittsburgh : Jordan Staal, Angelo Esposito, Simon Després, Beau Bennett, Joe Morrow, Olli Maatta, Kasperi Kapanen et enfin Samuel Poulin en 2019. Pourtant, les Penguins parviennent à se renouveler chaque année en greffant des joueurs autour de Crosby et Malkin.

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Sidney Crosby et Evgeni Malkin avec la Coupe Stanley en 2017.

Les choix de première ronde des Blues de St. Louis depuis Vladimir Tarasenko et Jaden Schwartz en 2010 ? Jordan Schmaltz (26 ans, Ligue américaine), Robby Fabbri (échangé pour Jacob De La Rose), Tage Thompson (22 ans, inclus dans la transaction O’Reilly, Ligue américaine presque tout l’hiver), Kim Klostin (27 points en 42 matchs dans la Ligue américaine), Dominik Bokk (passé à l’organisation des Hurricanes pour Justin Faulk). Seul Robert Thomas est encore avec l’équipe. Il a 36 points en 58 matchs cette année, une excellente production pour un jeune de son âge.

Contrairement aux Penguins et aux Blues, les Capitals ont su se renouveler grâce au repêchage. Depuis 2008, plusieurs choix ont contribué aux succès de l’équipe : John Carlson, Braden Holtby, Dmitri Orlov, Evgeny Kuznetsov, Tom Wilson, Jakub Vrana et Ilya Samsonov.

Les Oilers d’Edmonton, les Sabres de Buffalo et les Panthers de la Floride ont opté pour une reconstruction agressive comme les Penguins de Pittsburgh et les Blackhawks de Chicago il y a 15 ans. À eux trois, ils ont cinq participations en séries depuis dix ans et une seule ronde remportée, par les Oilers.

Les Bruins, eux, ont opté pour la réinitialisation après leur exclusion des séries éliminatoires en 2015. Ils se sont plantés royalement en première ronde du repêchage cette année-là en préférant Jakub Zboril, Jake DeBrusk et Zach Senyshyn à Mathew Barzal, Kyle Connor, Thomas Chabot, Brock Boeser, Travis Konecny et Sebastian Aho.

Mais ils avaient déjà un joyau, choisi un an plus tôt, David Pastrnak, et ils se sont repris un an plus tard avec Charlie McAvoy. Après avoir raté les séries éliminatoires deux années de suite, ils ont remplacé Claude Julien par Bruce Cassidy et ont conservé leurs grands leaders Patrice Bergeron et Zdeno Chara même s’ils avançaient en âge et ils dominent depuis trois ans. C’est la recette privilégiée par Bergevin, de toute évidence.

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Charlie McAvoy, Patrice Bergeron et David Pastrnak

Parlant de recettes variées, les Golden Knights de Vegas ont atteint la finale il y a deux ans avec une bande de joueurs rejetés par les autres clubs de la Ligue, avec William Karlsson et Erik Haula pour deux premiers centres.

Les Predators de Nashville ont aussi accédé à la finale, il y a trois ans, sans pour autant compter sur un seul compteur de plus de 61 points en saison régulière. Les Maple Leafs de Toronto, eux, en regorgent. Leur dernière ronde gagnée en séries éliminatoires remonte à… 2004.

Marc Bergevin a parlé de chance lundi. Mais quand on risque de rater les séries pour une quatrième fois en cinq ans, voilà un mot à éviter.

Sur le fond, il n’a pas tort. Les Blues de St. Louis ont eu de la chance. Ils ont utilisé leur quatrième gardien Jordan Binnington en désespoir de cause l’an dernier, après l’avoir même prêté au club-école des Bruins de Boston la saison précédente. Le DG Doug Armstrong a même songé à faire éclater son noyau quelques mois avant la fameuse conquête, mais aucun échange ne s’est matérialisé.

Bergevin aurait aussi pu parler de chance dans son propre cas. Le nouveau joyau de l’organisation s’appelle Nick Suzuki. Si Max Pacioretty accepte de passer aux Kings lors du repêchage de 2018, Nick Suzuki n’illumine pas le Centre Bell et Tomas Tatar n’est pas en voie de connaître une saison de plus de 70 points à Montréal. Vegas voulait tellement se débarrasser de Tatar et de son contrat qu’ils ont accepté de payer 500 000 $ par année sur son contrat. Et qui sait si le CH ne voulait pas Cody Glass avant Suzuki ?

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Nick Suzuki et Tomas Tatar

Dans le cas de l’acquisition de Phillip Danault, la chance n’a pas été un facteur. Bergevin connaissait bien le jeune homme de l’époque où il travaillait avec les Hawks. La transaction Galchenyuk pour Domi était aussi bien calculée. Une majorité de fans étaient pourtant contre l’idée au départ.

Il faut donc un amalgame de flair et de chance pour réussir. Marc Bergevin compte sur le noyau actuel, mais aussi, surtout, sur l’espoir de voir les jeunes Kotkaniemi, Romanov, Poehling, peut-être Caufield ou Harris, éclore dès l’an prochain.

S’il est encore en poste, il s’agira d’une année de grande vérité pour Marc Bergevin.

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