D’un côté, vous avez l’entraîneur. Claude Julien répète ad nauseam sa volonté de lutter jusqu’à la fin pour une place en séries éliminatoires.

De l’autre, le DG, Marc Bergevin. Le patron vient de soutirer à son coach deux joueurs réguliers, Marco Scandella et Ilya Kovalchuk, pour des choix de deuxième et troisième rondes. Et la journée limite des échanges commence à peine.

Sagement, Bergevin a choisi de continuer à amasser les choix au repêchage. Le Canadien est à six points des Maple Leafs et du troisième rang dans la division Atlantique, avec un match de moins à disputer. Il doit aussi devancer les Panthers et les Sabres. Le DG du Canadien est réaliste.

On saura plus tard aujourd’hui si Marc Bergevin demeure fidèle à son plan de réinitialisation, ou s’il se résoudra à une reconstruction plus agressive. Pour l’instant, il a obtenu des choix de deuxième et troisième ronde (et peut-être un quatrième supplémentaire) pour deux éventuels joueurs autonomes qui lui auront coûté un choix de quatrième ronde.

Si Tomas Tatar et Jeff Petry, sous contrat pour une autre année, demeurent avec le CH, le plan de réinitialisation n’aura pas été modifié et l’organisation visera un retour vers une position plus avantageuse au classement l’an prochain.

Mais les choix de première, deuxième et troisième rondes cédés par les Islanders pour Jean-Gabriel Pageau pourraient faire réfléchir Bergevin…

Le Canadien détient désormais 13 choix en prévision du repêchage, un choix de première, trois choix de deuxième, deux choix de troisième, trois choix de quatrième, deux choix de cinquième, et un choix dans chacune des sixième et septième rondes.

Montréal a repêché dix joueurs en 2019, dont quatre dans les trois premières rondes, onze joueurs en 2018, dont six dans les deux premières rondes, et sept en 2017, dont cinq dans les trois premières rondes.

C’est un contraste assez évident avec les années précédentes.

2016 : 1 choix de 1ere ronde, aucun de 2e ronde, six choix total.

2015 : 1 choix de 1ère ronde, aucun de 2e ronde, cinq choix total.

2014 : 1 choix de 1ère ronde, aucun de 2e ronde, six choix total.

2013 (une cuvée très faible par contre) : 1 choix de 1ère ronde, trois choix de 2e ronde, huit choix total.

2012 : 1 choix de 1ère ronde, deux choix de 2e, sept choix total.

2011 : 1 choix de 1ère ronde, aucun choix de 2e ni 3e, sept choix total.

2010 : 1 choix de 1ère ronde, aucun choix de 2e ni 3e, cinq choix total.

2009 : 1 choix de 1ère ronde, aucun choix de 2e, huit choix total.

2008 : Aucun choix de 1ère ronde, cinq choix total.

Cette période de neuf repêchages a fait mal à l’organisation. L’équipe y a repêché seulement deux fois dans le top 15, Galchenyuk en 2012 et Sergachev en 2016. Dans sept de ces neuf repêchages, il n’y avait pas de choix de première ou de deuxième ronde. Il y aussi eu de mauvaise décision, il faut en convenir.

S’il conserve tous ses choix en 2020, le Canadien aura pigé 13 fois dans les deux premières rondes au cours des quatre dernières cuvées. Au cours des neuf repêchages moins glorieux de l’équipe, le CH a obtenu 14 choix dans les deux premières rondes.

Il est évidemment encore trop tôt pour connaître les résultats de la stratégie du volume. Les repêchages de 2017, 2018 et 2019 sont encore trop frais. On peut bien s’impatienter avec Kotkaniemi, Poehling et Fleury, seulement 24 des… 651 joueurs repêchés dans ces trois cuvées sont des réguliers de la LNH. Parmi eux, 13 ont été choisis dans le top 10. Ils sont encore tous très jeunes !

Par contre, il est permis de croire que la nouvelle vague est supérieure à la précédente. Le premier choix de 2014, Nikita Scherbak, n’a jamais eu l’honneur de représenter la Russie au Championnat mondial. Il a obtenu 23 points à ses 48 premiers matchs dans la Ligue américaine et une fiche de -26.

Le premier choix l’année précédente, Michael McCarron, n’a jamais disputé de Championnat mondial junior lui non plus. Il peinait à produire à sa première saison dans la Ligue junior de l’Ontario.

Le premier choix de 2010, le défenseur Jarred Tinordi, était un faible producteur de points au niveau junior. Seulement 30 en 121 matchs à London. On avait beau vanter ses qualités défensives, il fallait un minimum d’efficacité en relance.

Louis Leblanc, repêché en première ronde en 2009, a obtenu 23 points en 31 matchs à Harvard. Puis à peine un peu plus d’un point par match dans la LHJMQ à 20 ans.

Les espoirs actuels n’ont pas encore fait leurs preuves dans la LNH. Mais ils montrent des signes nettement plus encourageants. Cole Caufield domine outrageusement dans la NCAA à 19 ans au sein d’un club ordinaire. Il a déjà 34 points, dont 19 buts, en 32 matchs. Mattias Norlinder joue au sein de la première paire à Modo, en Suède, et il a participé au Championnat mondial junior.

Jesperi Kotkaniemi en déçoit plusieurs cette saison. S’il jouait dans les rangs juniors, la majorité des fans seraient ravis. Ce garçon a 10 points à ses 10 premiers matchs dans la Ligue américaine, à 19 ans. Alexander Romanov est le meilleur défenseur junior russe. Il jouait au sein de la première paire du puissant CSKA de Moscou récemment. Au même âge, Tinordi peinait à obtenir des points dans la Ligue junior de l’Ontario.

Le défenseur Jordan Harris, 19 ans, a 20 points en 29 matchs à Northeastern. Il jouait au sein de la première paire au sein de l’équipe américaine au Championnat mondial junior. On verra pour Cam Hillis, dont la progression est néanmoins fulgurante, d’une saison de 22 points en 33 matchs à 75 points en 55 matchs à Guelph. Il y en a d’autres, un peu plus obscurs, Jayden Struble, Rhett Pitlick, Jesse Ylonen, Jacob Olofsson, Brett Stapley.

Trois joueurs de la cuvée 2017, Ryan Poehling, Josh Brook et le gardien Cayden Primeau ont participé au Championnat mondial junior. Un quatrième, Cale Fleury, a déjà disputé 41 matchs dans la LNH. La faible production de Poehling à sa première saison dans la Ligue américaine suscite des interrogations. Mais on l’a vu produire contre les meilleurs jeunes de son âge au Championnat mondial junior.

Brook a encore beaucoup de travail devant lui. Après une petite déprime, Fleury semble retrouver son aplomb avec le Rocket. Il a deux points et une fiche de +2 à ses trois derniers matchs. Il ne deviendra pas un second Shea Weber, mais il devrait devenir un régulier dans la LNH.

Cayden Primeau, 20 ans, a disputé tous les matchs du Rocket ce week-end. Il a accordé seulement deux buts. Il a donné 21 buts seulement à ses dix derniers matchs. Sa moyenne de buts alloués s’établit désormais à 2,58 et son taux d’arrêts à ,903. Il progresse à un moment où la cadence augmente dans la Ligue américaine.

Ils n’atteindront pas tous la Ligue nationale, évidemment. Mais au volume, si cinq ou six parmi cette quinzaine en viennent à aider le Canadien, on aura aisément surpassé le taux de succès de la vague précédente, et la stratégie du volume aura payé.

À lire

Premier échange aujourd’hui, Jean-Gabriel Pageau rapporte des choix de première et deuxième ronde en 2020, et un choix de troisième ronde en 2022. Incroyable retour pour un joueur de location. Les Sénateurs ont désormais trois choix de première ronde en 2020, quatre choix de deuxième ronde.