(WASHINGTON) « Don’t know what you got’till it’s gone », hurlait le groupe Cinderella, dans une de ces ballades sulfureuses comme s’il s’en faisait dans les années 80.

À voir défiler les rumeurs de transaction au sujet de Tomas Tatar, c’est à se demander si tous sont conscients de ce que le Canadien possède avec l’ailier slovaque. Encore jeudi, pendant que les deux buts de Ben Chiarot retenaient l’attention, Tatar a discrètement été un acteur de la victoire de 4-3 en prolongation du Tricolore contre les Capitals.

Allons-y dans l’ordre. Le Canadien est virtuellement éliminé de la course aux séries. Dans les circonstances, Marc Bergevin pourrait adopter la position de vendeur d’ici la date limite des transactions, lundi, mais ceux qui deviennent joueurs autonomes sans compensation cet été (principalement Nate Thompson et Ilya Kovalchuk) ne rapporteront pas grand-chose.

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Il faut donc se tourner vers les contrats qui expirent dans un an, et c’est là que le nom de Tatar apparaît. On croise cette donnée avec la visite de Bergevin au Colorado, où l’Avalanche vient de perdre Mikko Rantanen pour quelques semaines et pouf ! Comme sur Tinder, on a une affinité.

Remarquez, à voir le marché s’enflammer autant pour les vendeurs, à voir ce que le Wild a obtenu pour Jason Zucker, on comprend ceux qui rêvent de ce que pourrait rapporter Tatar. Mais encore fait-il d’abord déterminer ce qu’il offre à son équipe actuelle.

Le match

Ce qui nous mène à la journée de jeudi. Si on se fie au nombre de micros autour de Tatar après l’entraînement matinal, tout le monde est au fait des possibilités d’échange, dont le joueur lui-même. Mais il a réitéré son désir de rester à Montréal. « C’est ce que je souhaite ! »

Phillip Danault, le centre de Tatar presque sans arrêt depuis l’an dernier, était témoin de la scène depuis son casier. « Honnêtement, je ne pense pas qu’il va partir, mais on ne sait jamais. C’est notre meilleur compteur par quoi, 15 points ? » Par 14, en fait. Tatar a obtenu son 55e point de la saison en préparant le premier but de Chiarot, et Danault le suit avec 41 points.

Parlons-en, de ce but de Chiarot. C’est Tatar, derrière le but, qui a d’abord tassé le gros Brenden Dillon, avant d’enlever la rondelle à John Carlson, et de la remettre à Chiarot dans l’enclave.

C’est aussi Tatar qui, avec la marque à 1-1 en milieu de match, a privé les Capitals d’une très bonne chance de marquer en se repliant. À force d’y aller de petites actions du genre, lui, Danault et Brendan Gallagher étaient sur la patinoire pour les trois buts du CH en temps réglementaire, contre aucun pour les Capitals. Tout ça en ayant le trio d’Alexander Ovechkin comme principal adversaire, malgré le jeu du chat et de la souris entre les deux entraîneurs.

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Alex Ovechkin (8) et Tomas Tatar (90)

« On a vu qu’ils ont vraiment essayé de s’éloigner du trio de Danault », a souligné Julien. S’il y a une preuve que ce trio est efficace, c’est peut-être dans le respect que lui portent les adversaires.

La constance

Danault est la conscience défensive de ce trio, une qualité qui lui vaudra, encore cette année, des votes pour le trophée Selke. Gallagher est le travailleur infatigable, la bougie d’allumage, celui qui n’hésite pas à aller là où ça fait mal. Tatar, lui, possède les habiletés offensives pures, tout en étant lui-même un travaillant.

Il le fait aussi avec constance, une qualité qui fait défaut à plusieurs attaquants du CH. Cette saison, le numéro 90 n’a jamais passé plus de trois matchs de suite sans obtenir de point. « Des joueurs comme lui, tu n’en trouves pas à tous les coins de rue », a rappelé Danault.

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Lars Eller (20) festoie après son but marqué en deuxième.

« Il en fait tellement pour Phil et moi, a ajouté Gallagher. Il est si intelligent. C’est facile de jouer avec lui, il achète du temps pour ses compagnons de trio.

« Nous, on espère qu’il restera. Mais la direction prendra la meilleure décision pour l’équipe. En attendant, on profite de chaque moment ! »

Le Canadien ne regorge pas exactement de talent offensif. Joel Armia, Max Domi et Jonathan Drouin en ont beaucoup, mais la constance leur fait défaut. Chez les plus jeunes, Nick Suzuki est la seule valeur sûre à court terme. Jesperi Kotkaniemi se refait une confiance à Laval. Cole Caufield n’a pas même joué un match préparatoire chez les professionnels. Attendons.

PHOTO GEOFF BURKE, USA TODAY SPORTS

Acheter bon marché et vendre à prix élevé, disent les investisseurs. C’est exactement ce que pourrait faire Bergevin avec Tatar ces prochains jours. Mais quand on pense au trou qui en résulterait à court et même à moyen terme, est-ce vraiment la chose à faire ?

En hausse : Brendan Gallagher

Il est incommodé par des bobos depuis quelques semaines, mais cette fois, il ressemblait à un joueur en santé.

En baisse : Joel Armia

Un différentiel de -3, un dégagement raté quelques secondes avant le but qui a forcé la prolongation. Une soirée à oublier pour le gros Finlandais.

Le chiffre du match : 1

Un, comme dans un but marqué par Alexander Ovechkin jeudi. Un, comme dans le but qu’il lui manque pour atteindre la marque des 700.

Dans le détail

Commotion pour Ouellet

Les Capitals sont bâtis pour le jeu rude des séries et on l’a compris dès le début du match. À sa toute première présence, Xavier Ouellet s’est fait plaquer par Garnet Hathaway, son visage donnant durement sur la rampe. Après le match, Claude Julien a confirmé que Ouellet avait subi une commotion. Le défenseur a quitté l’aréna avec une prune autour de l’œil gauche. C’était une nouvelle preuve que même s’ils n’ont pas distribué des mises en échec à la tonne, les Capitals sont capables de frapper fort. Ouellet est le troisième joueur du CH qui s’est blessé à Washington cette saison, après Jonathan Drouin et Paul Byron en novembre. Mine de rien, avec Marco Scandella échangé et Victor Mete blessé le même jour à Detroit, le Canadien a perdu trois défenseurs gauchers en 48 heures…

Bien vu

« Notre jeu d’ensemble n’est pas au point. » Ainsi parlait Brian MacLellan, le directeur général des Capitals, lors d’un point de presse mercredi matin. Le DG dénonçait notamment le manque d’implication défensive de ses attaquants. Décidément, MacLellan connaît bien son équipe. Seulement dans les sept premières minutes du match, on a dénombré deux échappées et une descente à 2 contre 1 du Canadien. En milieu de première période, Jonathan Drouin obtiendra la troisième échappée des siens, en sortant du banc des pénalités. Les Capitals ont bon espoir que Brenden Dillon stabilise leur unité défensive, en jouant à gauche du volatile John Carlson. Dillon n’a pas bien paru sur le troisième but des Montréalais, mais à sa défense, il avait traversé le continent la veille et doit s’adapter à sa nouvelle équipe.

Promotion pour Byron

Celle-là, on ne l’attendait pas. Artturi Lehkonen a été laissé de côté afin de permettre à Brendan Gallagher de revenir au jeu. Lehkonen ne compte qu’un point à ses neuf derniers matchs. « Avant lui, il y avait eu Cousins et Weal [qui ont été laissés de côté], et ensuite ils ont produit et ils ont bien joué. Il fallait prendre une décision. Dans le cas de Lehkonen, autant qu’il est un joueur fiable, il peut aussi nous en donner plus », a mentionné Julien. Son retrait de la formation a permis à Paul Byron de revenir dans le « top 9 », après avoir joué au sein du quatrième trio lors de son retour au jeu, mardi. C’est un Byron revigoré que le Tricolore a retrouvé cette semaine, bien loin du joueur effacé qu’il était au moment de se blesser. Il a exploité sa vitesse comme il le fait quand il est en forme, et a d’ailleurs obtenu une des échappées en début de match. Marc Bergevin sera sans doute rassuré de voir aller Byron, car le petit attaquant a trois autres années de contrat à écouler.

« C’est un boni »

Disons que je l’ai aidé pas mal au cours de sa carrière ! Il joue toujours bien contre nous.

Carey Price, heureux qu’Alexander Ovechkin n’ait pas marqué son 700e but contre lui

C’est la suite des problèmes que l’on connaît dernièrement. On a fait quelques pas dans la bonne direction, mais on échoue ailleurs. On en arrache dernièrement. Avec une telle performance, on n’aurait pas pu battre qui que ce soit dans la ligue ce soir.

Todd Reirden, entraîneur-chef des Capitals

Ce n’est pas idéal, surtout tôt dans le match. Luke [Richardson, l’entraîneur des défenseurs] a fait du bon travail pour nous gérer. Les cinq gars ont bien fait ça.

Ben Chiarot, au sujet de la perte de Xavier Ouellet

On sait qu’il a un bon tir, c’est pour ça qu’on l’a utilisé en avantage numérique pendant l’absence de Shea Weber. Quand il marque, c’est un boni autant pour lui que pour nous.

Claude Julien, à propos de Chiarot

C’était décevant de perdre l’avance, mais ça arrive et il faut composer avec ça. On a joué un très bon match sur la route.

Brendan Gallagher