Osons une prédiction qui ne risque pas trop de revenir nous hanter : Brett Kulak ne remportera jamais le trophée Norris.

Après plus de 350 matchs au niveau professionnel, dont bientôt 200 dans la LNH, il a largement eu l’occasion de montrer à ses patrons le panier de services qu’il est en mesure de leur livrer.

Il faut toutefois se rendre à l’évidence : depuis quelque temps, Kulak offre du bien bon hockey. De l’excellent, même, si l’on prend la peine de se rappeler le rôle de soutien qu’on lui confie chez le Canadien, dans l’ombre de Shea Weber, Ben Chiarot et Jeff Petry.

Après s’être révélé comme une valeur sûre à la ligne bleue l’année dernière et avoir signé une prolongation de contrat pendant l’été, Kulak a connu toutes sortes de difficultés cette saison. Souvent, il n’était qu’une pâle copie de l’arrière fiable de 2018-2019 qui bénéficiait de l’opinion favorable de l’entraîneur-chef Claude Julien. Résultat : depuis le mois d’octobre dernier, il a regardé 15 matchs de la tribune de presse.

Or, dimanche dernier, c’est un joueur en pleine possession de ses moyens qui a affronté les Blue Jackets de Columbus au Centre Bell, à des milles du patineur nerveux et brouillon qu’on a parfois vu cette saison. En témoigne, par exemple, la manière avec laquelle il a poursuivi Cam Atkinson avant de lui faire perdre la rondelle en première période.

La bonne tenue de Kulak n’a pas échappé à Julien, qui l’a jumelé à Jeff Petry depuis trois rencontres, faisant du coup descendre Marco Scandella d’un échelon sur le flanc gauche de la défense.

Le joueur de 26 ans n’a pas déçu son entraîneur au cours de cette séquence. Au cours des matchs contre les Sabres de Buffalo, les Panthers de la Floride et les Blue Jackets, Kulak a montré un indice de possession simplement spectaculaire.

Lorsque le défenseur était en action à forces égales, le Canadien a obtenu un total de 68 tentatives de tir, contre 14 pour l’adversaire. Exprimé autrement, on peut déduire que l’équipe était en contrôle du disque pendant 83 % du temps de glace du défenseur.

Depuis le début de la nouvelle année, il présente le meilleur différentiel du Tricolore, toutes positions confondues (+ 7). Et il n’a récolté qu’un point de moins que Shea Weber, en disputant quatre matchs de moins.

« Il y a eu des séquences, cette année, où il a eu de la difficulté, mais quand il garde son jeu simple, il est à son meilleur », a commenté l’entraîneur-chef du Canadien, lundi.

Il fait des passes simples, il ne complique pas son jeu. On a toujours aimé son coup de patin. Il ferme le jeu rapidement, c’est une de ses forces. Quand il bouge la rondelle comme il le fait dernièrement, ça fait une grosse différence.

Claude Julien

Brendan Gallagher connaît bien Kulak. Les deux ont évolué ensemble chez les Giants de Vancouver, dans la Ligue junior de l’Ouest, en 2011-2012. Selon lui, l’actuel numéro 77 du Canadien a toujours joué de la même façon.

« Il patine bien, fait de bonnes passes et comprend bien le jeu, réitère Gallagher. Quand on a ces trois atouts et qu’on joue en confiance, ça devrait bien se passer. Dans son cas, plus il va avoir de chances, le mieux il va s’en tirer. »

Pression

L’ailier droit met ici le doigt sur l’élément qui est possiblement le plus volatil chez son coéquipier : la confiance. Les moments de doute transforment radicalement son rendement. Et Kulak est le premier à le reconnaître.

« Dans tous les sports, croire en soi est primordial, souligne-t-il. Plus on est en confiance, plus c’est facile de faire des jeux, de jouer à la hauteur de son potentiel. C’est énorme pour moi, et je me sens bien en ce moment. »

Le défenseur ne cache pas que son nouveau contrat est venu avec un lot de pression qu’il a eu du mal à gérer. Ses performances cette saison se sont souvent situées sous les critères qu’il s’impose lui-même.

Il affirme toutefois avoir appris de cette expérience. Il dit maintenant mieux gérer sa charge de travail sur le plan physique, mais également sur le plan mental.

J’ai travaillé sur ma manière de tourner la page sur les matchs passés et à mieux préparer le match suivant, en utilisant le temps entre les deux pour mieux préparer mon corps. Travailler à l’entraînement, être prêt à affronter la prochaine équipe, et recommencer le cycle. Ça m’a aidé à me sentir mieux.

Brett Kulak

« Beaucoup de joueurs connaissent des hauts et des bas, mais les meilleurs trouvent la manière de garder leur jeu au niveau le plus élevé, dit-il encore. C’est ce à quoi j’aspire. J’ai encore beaucoup à offrir, il me faut juste garder la même attitude et la même préparation sur une base quotidienne. »

Non, Kulak ne volera jamais la vedette aux meilleurs défenseurs de l’équipe. Et peut-être son poste sera-t-il de nouveau en jeu si Alexander Romanov fait le saut dans la LNH l’automne prochain.

Il est sans doute davantage dans son élément lorsqu’il dispute entre 15 et 18 minutes par match que lorsqu’il dépasse la vingtaine. Mais pour l’heure, sans faire de bruit, il rend de fiers services à son équipe.

En cédant son coéquipier Cale Fleury au Rocket de Laval, le Canadien lui a envoyé le message qu’il faisait partie du sextuor défensif chargé de contribuer à l’ultime poussée pour une place en séries éliminatoires.

De quoi lui insuffler une nouvelle dose de confiance. Avec les effets que l’on connaît.

Des victoires, et vite

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Tomas Tatar

Le moral des troupes en a pris pour son rhume dimanche avec la défaite serrée de 4-3 aux mains des Blue Jackets de Columbus, une formation que les Montréalais tentent de rejoindre au classement. Ce faisant, le Canadien a échoué à aligner une troisième victoire de suite, ce qu’il n’a pas réussi à faire depuis la mi-décembre. En fait, depuis le début de la saison, les plus longues séquences victorieuses se sont arrêtées à trois. « Il faut trouver des moyens de gagner ce genre de matchs, a souligné Tomas Tatar. Cette défaite nous a fait mal. » « Si on en gagnait trois avant d’en perdre une et d’en gagner trois autres, on serait corrects, a relativisé l’entraîneur-chef Claude Julien. Mais on n’a pas eu de longue séquence victorieuse, et c’est ce dont on a besoin si on veut revenir dans la course [aux séries éliminatoires]. On ne s’en cache pas. »

De bons mots pour Kotkaniemi

Brendan Gallagher a ajouté sa voix à celles qui prônent la patience à l’égard de Jesperi Kotkaniemi, dont le renvoi au Rocket de Laval samedi a déchiré les amateurs de hockey de la province. Devant les journalistes, lundi, il a rappelé que « tout devait être mérité » et que « rien n’était donné » dans la LNH. Selon Gallagher, le joueur de centre finlandais n’a pas encore montré le meilleur de lui-même, et s’il trime dans la Ligue américaine, il reviendra plus fort. « Il doit saisir cette chance et en tirer des apprentissages, c’est de cette manière qu’on devient meilleur. L’organisation veut que “KK” s’améliore : tant et aussi longtemps qu’il écoute et qu’il comprend ce qu’on attend de lui, il a assez de talent pour faire les ajustements nécessaires et atteindre le niveau qui est attendu de lui. » À ses yeux, Kotkaniemi doit d’abord et avant tout déterminer « ce qu’il veut lui-même accomplir ».