La conversation n’est engagée que depuis peut-être 15 secondes, et déjà, c’est Tyler Toffoli lui-même qui aborde le sujet, tout de go, sans même qu’on lui en parle.

« J’ai grandi dans la grande région de Toronto et j’ai passé mes années au hockey junior à Ottawa, commence-t-il par dire. Alors je sais très bien ce que c’est, une ville de hockey. Ça ne me fait pas peur… »

Au bout du fil, Toffoli n’est pas dans une ville de hockey, mais bien à Hermosa Beach, un coin de la Californie qui est davantage reconnu pour ses planches de surf que pour ses rondelles ou ses patinoires. Habitué au sable et aux palmiers depuis maintenant huit ans, Toffoli se prépare à un gros changement de décor… et ça fait très bien son affaire.

Il aurait pu dire non, vous savez. Il aurait pu dire non à nos hivers rigoureux et à nos impôts encombrants, il aurait pu dire non aux partisans trop exigeants et aux médias souvent fatigants, qui veulent des réponses tout de suite, c’est bien connu, et aussi dans les deux langues officielles. Ce bout-là ne lui fait pas peur non plus. « Mon agent est Pat Brisson et il a déjà commencé à nous aider, ma femme et moi, à apprendre un peu de français… »

En gros, Tyler Toffoli aurait pu dire non à tout ça, et à titre de joueur autonome, il avait le choix. Mais il a plutôt choisi de s’embarquer dans cette galère.

Pourquoi ?

« Je vais te dire pourquoi, ajoute-t-il sans perdre de temps. Pendant les séries l'été passé, j’étais avec les Canucks, dans la bulle à Edmonton, et on avait vraiment beaucoup de temps libre. Alors je me suis mis à regarder des matchs de hockey chaque jour à la télé, et je me suis mis à regarder les matchs du Canadien. J’ai vu la façon dont cette équipe disputait ses matchs, j’ai vu combien tous les joueurs du club travaillaient à chaque fois, l’effort qu’ils y mettaient. Et puis j’ai vu les changements que la direction du club a effectués par la suite… Alors j’avais envie de faire partie de l’aventure. On a pris la décision en famille, ma femme et moi, et on avait envie de vivre ça. »

Toffoli, 28 ans, est devenu un nouveau membre du Canadien le 12 octobre, en acceptant un contrat de quatre ans, pour une moyenne de 4,25 millions de dollars par saison. Il est parfois difficile de tourner la page, surtout quand on doit partir d’une ville où l’on a connu le succès – il a gagné la Coupe Stanley avec les Kings en 2014 –, mais l’attaquant est prêt à amorcer un nouveau chapitre.

Je voulais vraiment aller jouer pour une équipe dans une ville qui est folle de hockey.

Tyler Toffoli

Son histoire, elle s’est amorcée très tôt, comme celle de milliers d’autres jeunes garçons qui ont grandi des patins aux pieds. Dans son cas, à l’âge de 2 ans, c’étaient les patins à roulettes de sa sœur, qu’il avait l’habitude d’attacher à ses souliers, avant de se lancer dans un vacarme d’enfer en long et en large dans l’appartement familial en banlieue de Toronto.

Las des roulettes, il passe aux vrais patins à l’âge de 3 ans, et se joint à une première équipe de hockey organisé. Son père, qui pianote la journée sur un clavier d’ordinateur dans une banque, décide de s’occuper de l’organisation locale de hockey mineur.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE INSTAGRAM DE TYLER TOFFOLI

Comme c'est souvent le cas chez les joueurs de la LNH, l'histoire d'amour entre Tyler Toffoli et le hockey a commencé très jeune, dès l'âge de deux ans.

Et puis le jeune Tyler, plus tard, à l’âge de 10 ans, commence à dire à un peu tout le monde qu’un jour, il jouera au hockey junior. Ça se confirme à peine quelques années plus tard, quand il se joint aux 67 d’Ottawa, lors de la saison 2008-2009.

Il est un peu modeste au départ, avec une première saison de 46 points, mais la deuxième, à 79 points, est plus spectaculaire, assez pour que les Kings en fassent un choix de deuxième tour au repêchage de 2010, le 47e au total.

Ensuite, c’est l’explosion : à sa troisième saison au hockey junior ontarien, il récolte 108 points en 68 matchs, et il devient le meilleur marqueur du circuit.

« C’est dur à expliquer, dit-il. Je dirais que pour moi, ça s’est mis à débloquer à l’instant où j’ai été repêché par les Kings… Je me souviens, le directeur général Dean Lombardi m’avait parlé, il m’avait fait comprendre que c’était ma chance. À partir de ce moment-là, je me suis mis à m’entraîner deux fois plus fort.

« Ce ne fut pas facile d’avoir une place avec les Kings, parce qu’ils gagnaient tout le temps. L’équipe était tellement bonne que j’ai dû travailler encore plus pour me faire une place. Mais je n’avais pas vraiment le choix… »

Après la Coupe Stanley avec eux, il a bien cru que c’était pour la vie, mais non. Lors de la dernière saison, son nom s’est mis à circuler dans les rumeurs d’échange. Ça, il ne l’a jamais vu venir. « Parce que j’étais convaincu de passer ma carrière en entier là-bas… et puis on m’a échangé. J’étais fâché, je ne voulais pas partir. Avec le recul, je suis en mesure de dire que mon déménagement à Vancouver a été comme un remontant. »

Ce qui nous ramène à maintenant, à la neige et aux impôts, à la pression et aux attentes. Vous a-t-on déjà dit combien il a hâte ? « Ma femme a commencé à rechercher des maisons dans le coin où les gars de l’équipe habitent, pas loin du centre d’entraînement… On attend de pouvoir déménager toute la famille. Ma femme, moi et notre petit chien. »

PHOTO TIRÉE DU COMPTE INSTAGRAM DE TYLER TOFFOLI

Tyler Toffoli a fait connaissance avec le Tricolore bien avant de signer une entente avec le club

Il a parlé un peu à Claude Julien, déjà. Tyler Toffoli a essentiellement passé sa carrière à l’aile droite, mais il a aussi joué un peu à la gauche, et si c’est ce que le Canadien veut de lui, il va aller à gauche.

De toute façon, que ce soit à gauche ou à droite, il a hâte. Il a hâte d’enfiler le maillot, de patiner au Centre Bell, de respirer et de vivre le hockey.

En plus, il pense que ça va bien aller.

« Sur papier en tout cas, notre équipe est très bonne… Je sais qu’on ne gagne rien sur papier, mais je dirais que c’est bien parti. Maintenant, c’est à nous de faire le reste. »