Amateur d’aubaines, Marc Bergevin s’est fait, au cours des années, une spécialité des acquisitions au bas prix, mais à fort potentiel.

Comprenons-nous bien : l’étoffe du défenseur Joel Edmundson, acquis en fin de journée samedi des Hurricanes de la Caroline en retour d’un modeste choix de 5e tour en 2020, ne sera jamais confondue avec celle d’Ilya Kovalchuk.

Mais c’est tout de même un arrière robuste susceptible d’aider concrètement le Canadien dès la saison prochaine, que Bergevin vient d’ajouter à sa formation. Contre un choix qui sera le 139e au total.

Ce bas prix s’explique facilement : Edmundson, 27 ans, deviendra joueur autonome sans compensation le 9 octobre prochain. En réalité, ce sont donc ses droits de négociation exclusifs qui ont changé de mains samedi, tandis que les Hurricanes se sont assuré un petit retour pour un joueur qu’ils allaient visiblement perdre de toute façon.

Les discussions entre les deux camps s’amorceront dès les prochaines heures entre le Canadien et Edmundson, a écrit le Journal de Montréal samedi. Le Manitobain vient d’écouler deux contrats d’une saison chacun, qui lui ont rapporté respectivement 3 et 3,1 millions. Les deux ententes avaient été négociées avec les Blues de St. Louis, équipe qui l’a repêché au 2e tour en 2011 et avec laquelle il a remporté la Coupe Stanley en 2019. Il a été échangé aux Hurricanes l’été dernier.

Si, comme on peut s’y attendre, il signe une entente à Montréal, il deviendrait le cinquième défenseur gaucher à briguer un poste au prochain camp d’entraînement, avec Ben Chiarot, Brett Kulak, Victor Mete et Alexander Romanov. Chiarot a la confiance de ses patrons et les attentes sont grandes envers le jeune Romanov. Ce ne serait donc une bonne nouvelle ni pour Kulak ni pour Mete. On pourrait toujours muter l’un d’eux à droite si le Canadien ne fait pas confiance aux droitiers Cale Fleury ou Noah Juulsen. Ou bien une autre transaction pourrait être conclue.

Renfort

Défenseur à caractère défensif, même s’il vient de connaître la meilleure récolte offensive de sa carrière avec 20 points en 68 matchs, Edmundson viendrait avant tout renforcer un flanc gauche dont les lacunes ont été constamment exposées au cours de la dernière saison et des récentes séries éliminatoires.

À 6 pi 4 po et 215 lb, il deviendrait le plus grand défenseur chez le Canadien, à égalité avec Shea Weber, et le troisième plus lourd, derrière Weber (230) et Ben Chiarot (225), selon les données disponibles sur le site web de la LNH.

Les amateurs de statistiques avancées ne sont pas friands du travail d’Edmundson. Par exemple, au cours de la campagne 2019-2020, sa seule en Caroline, son équipe a obtenu à peine 50,74 % des tentatives de tir (indice Corsi) lorsqu’il était sur la glace à cinq contre cinq, et seulement 48,32 % des chances de marquer, selon le site NaturalStatTrick. Ces valeurs lui auraient conféré le dernier rang chez les défenseurs réguliers du Canadien dans les deux catégories.

Mais il serait obtus de se limiter à cette analyse. D’une part, ces chiffres sont quasi identiques (même un peu supérieurs) à ceux compilés par Ben Chiarot à sa dernière saison à Winnipeg ; celui-ci a toutefois considérablement amélioré ses performances à Montréal, où il a été appelé à s’impliquer davantage en attaque. Edmundson présente d’ailleurs essentiellement le même profil que Chiarot lorsqu’il s’est joint au Canadien l’été dernier : un cinquième défenseur qui applique des mises en échec, bloque des tirs, avale les minutes en infériorité numérique et joue quelque 18 minutes et demie par rencontre.

Et comme Chiarot, Edmundson remplissait ce rôle au sein de l’une des meilleures brigades du circuit. Les Hurricanes ont conclu la saison 2019-2020 au 2e rang pour les tirs au but accordés par match, au 3e rang pour le nombre de chances de marquer concédées à cinq contre cinq et au 4e rang pour l’efficacité en infériorité numérique.

Sur papier, son profil cadre avec les goûts de Bergevin et plairait sans doute à Claude Julien, quoiqu’en Caroline, on fronçait parfois les sourcils devant sa prise de décisions.

Joel Edmundson rejoindrait à Montréal son ancien coéquipier chez les Blues, le gardien Jake Allen, acquis la semaine dernière en retour d’un choix de troisième tour en 2020 (les deux équipes se sont aussi échangé des choix de septième tour). Malgré ces transactions, le Canadien a toujours en poche 11 choix en vue du prochain repêchage, qui aura lieu les 5 et 6 octobre.

Ni Edmundson ni Allen ne changeront radicalement le visage du Tricolore. Mais l’équipe n’est éliminée que depuis trois semaines, et déjà, son directeur général a corrigé, en partie ou en totalité, deux de ses lacunes.

Il en reste encore bien d’autres. Mais à voir son niveau d’activité des derniers jours, Bergevin ne semble pas avoir fini ses emplettes.