De nombreux fans souhaitent le congédiement de Trevor Timmins. Il serait l’un des principaux responsables des difficultés du Canadien en raison de ses mauvais choix au repêchage.

Et pourtant, dans son plus récent classement des meilleures équipes au chapitre de la banque d’espoirs, Scott Wheeler, l’expert en la matière pour theathletic.com, place le Canadien au deuxième rang derrière les Kings de Los Angeles.

Vous avez bien lu. Pas 31e. Pas dans la moyenne au 15e ou 16e rang non plus. Au deuxième rang

Wheeler n’est pas Montréalais. Il travaille à Toronto et, en plus de suivre les espoirs de la LNH, il est affecté à la couverture des Maple Leafs et les Marlies de la Ligue américaine. Il a aussi écrit pour le Toronto Star, le Globe and Mail, le Toronto Sun et plusieurs sites internet spécialisés dans les espoirs. En bref, il constitue une référence dans le domaine.

Pour chaque club, Wheeler dresse une liste de 15 espoirs. L’analyse est truffée de commentaires d’entraîneurs et de recruteurs. Il utilise aussi certaines séquences sur vidéo pour complémenter son analyse de certains joueurs dans des situations précises de jeu.

Fait important à noter, le Canadien vient au deuxième rang même si Nick Suzuki et Jesperi Kotkaniemi ne figurent pas parmi le groupe d’espoirs : Wheeler les considérait établis dans la LNH au moment de faire son classement. Une majorité de joueurs repêchés en 2018 (comme Kotkaniemi) et plusieurs en 2017 (comme Suzuki) viennent pourtant renforcer le groupe d’espoirs de plusieurs clubs.

« Je savais quelle équipe (les Kings de Los Angeles) allait terminer en tête du classement, écrit Wheeler, mais classer les clubs parmi les six ou sept suivants posait un défi. J’ai choisi de placer le Canadien au deuxième rang parce qu’ils possèdent de la profondeur et du talent à toutes les positions. Certaines équipes comme l’Avalanche du Colorado ou les Ducks d’Anaheim ont plus de talent au sommet de leur liste, mais le groupe du Canadien est plus complet. »

Cole Caufield, 15e choix au total en 2019, trône en tête chez le Canadien. Malgré un Championnat mondial junior timide, il domine outrageusement dans la NCAA avec des joueurs plus âgés, comme en témoignent ses 32 points, dont 18 buts, en 28 matchs à Wisconsin.

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Cole Caufield

Surprise au deuxième rang, on ne retrouve ni Alexander Romanov, ni Ryan Poehling, mais le défenseur gaucher Jordan Harris, 19 ans, choix de troisième ronde en 2018, 17 points en 25 matchs à Northeastern University et auteur du but gagnant en deuxième période de prolongation cette semaine pour permettre à son club de remporter le célèbre tournoi Beanpot contre Boston University, au TD Garden de Boston. Harris a aussi été un pilier de l’équipe américaine au Championnat mondial junior. Wheeler lui prédit une place au sein d’un top 4 défensif dans la LNH, un défenseur fluide, efficace dans la relance.

Wheeler est moins enthousiaste que d’autres à propos de Romanov, choix de deuxième ronde en 2018, troisième sur sa liste. « C’est un très bon jeune joueur, mais je ne crois pas qu’il constitue le meilleur espoir de la LNH en défense comme d’autres analystes le croient. »

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Alexander Romanov

Autre surprise, au quatrième rang, un autre défenseur gaucher, Jayden Struble, choix de deuxième ronde en 2019, coéquipier de Jordan Harris à Northeastern, vient au quatrième rang devant Ryan Poehling. Struble, 18 ans, un costaud de 6 pieds et 200 livres, a 10 points en 21 matchs dans la NCAA. « Peut-être le meilleur talent brut de l’organisation. Il possède déjà certaines qualités dignes de la Ligue nationale. »

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Jayden Struble

Ryan Poehling, cinquième, Cayden Primeau, Mattias Norlinder, Jesse Ylonen, Josh Brook, Cam Hillis, Rhett Pitlick, Allan McShane, Cole Fonstad, Rafaël Harvey-Pinard et Brett Stapley complètent le classement. Noah Juulsen, Joni Ikonen, Jacob Olofsson, Samuel Houde, Gianni Fairbrother et Joel Teasdale ne sont pas évalués parce qu’ils sont blessés.

Si le Canadien possède autant d’espoirs intéressants, c’est que Marc Bergevin a fourni de nombreux choix au repêchage à Timmins depuis trois ans. Le Canadien a eu 15 choix parmi les trois premières rondes lors des trois plus récents repêchages.

Ils ont repêché en moyenne 10 joueurs lors des deux dernières cuvées et possèdent quatre choix parmi les trois premières rondes en juin, et 11 choix au total.

Ce ne fut pas le cas lors des neuf années précédentes au repêchage de 2017. Revoyons un peu ces années plus difficiles.

Les années difficiles

Timmins a connu de bonnes premières années avec le Canadien. La cuvée 2007 a constitué son chef-d’oeuvre avec Ryan McDonagh, Max Pacioretty, P.K. Subban et Yannick Weber. Les trois premiers pourraient jouer 1000 matchs dans la LNH, Weber atteindra la maque des 500 dans les prochaines semaines.

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P.K. Subban a été repêché en deuxième ronde par le Canadien en 2007.

Les années 2008 à 2015 ont été plus difficiles. Timmins ne repêchait pas avant le 56e rang en 2008, puisque Bob Gainey avait cédé son choix de première ronde pour obtenir Alex Tanguay. Danny Kristo constituait le premier choix de l’équipe par défaut, mais rarement les choix de fin de deuxième ronde percent-ils. Seulement 10 joueurs repêchés après Kristo ont disputé 500 matchs dans la Ligue nationale, parmi lesquels des joueurs de soutien comme Zack Smith, Dale Weise, Matt Calvert et Matt Martin.

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Danny Kristo

En 2009, le Canadien n’aurait pas dû céder à la pression populaire et repêcher Louis Leblanc avant Chris Kreider, Marcus Johansson, Kyle Palmieri ou Ryan O’Reilly. L’organisation n’a qu’elle à blâmer. Le CH n’avait pas de choix de deuxième ronde. Montréal a fait chou blanc deux années de suite. Avec ses cinq petits choix en 2008, et sept en 2009, dont seulement un parmi les 64 premiers, l’équipe n’a pas su repêcher et développer un seul joueur régulier.

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Louis Leblanc, entouré de Trevor Timmins et Bob Gainey au repêchage de 2009.

Brendan Gallagher, repêché en cinquième ronde a sauvé le repêchage de 2010. En première ronde, le Canadien a sacrifié un choix de deuxième ronde pour s’avancer de six rangs et repêcher le gros défenseur Jarred Tinordi au 22e rang. Une erreur impardonnable. Tinordi jouait au sein du programme de développement américain avec Justin Faulk, Jon Merrill, Jason Zucker, Bryan Rust, entre autres. Ils étaient et ils sont restés meilleurs que lui. Le CH a perdu son choix de deuxième ronde pour lui et n’avait déjà plus de choix de troisième. Difficile avec cinq choix au total, dont un parmi les 112 premiers, de dénicher des perles.

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Jarred Tinordi

Nathan Beaulieu ne fut pas un vilain choix au 17e rang du repêchage de 2011. On n’obtient pas 28 points en 74 matchs dans une saison sans avoir un bon flair offensif. Mais son manque de sérieux l’a empêché de s’accomplir pleinement. Il est toujours dans la LNH. Seulement 18 joueurs repêchés après lui ont disputé plus de matchs. Cette année-là encore, le CH n’avait ni choix de deuxième ronde, ni choix de troisième, donc une seule sélection parmi les 96 premiers espoirs.

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Nathan Beaulieu

On ne pourra blâmer Trevor Timmins pour le choix d’Alex Galchenyuk au troisième rang en 2012. Galchenyuk demeure toujours à ce jour le deuxième compteur de cette cuvée derrière Filip Forsberg avec 313 points en 536 matchs. Il a aussi connu une année de 30 buts à 22 ans. La suite demeure un mystère. Par contre, Timmins a frappé dans le beurre deux fois en deuxième ronde avec Sebastian Collberg et Dalton Thrower. Au moins, Collberg aura servi d’appât pour obtenir Thomas Vanek. Marc Bergevin, fraîchement entré en poste, l’a échangé au bon moment.

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Alex Galchenyuk, entouré de Trevor Timmins et Geoff Molson au repêchage de 2012.

Le repêchage de 2013 n’est pas fameux, mais moins catastrophique que certains pourraient le croire. Après Michael McCarron repêché au 25e rang, seulement 15 joueurs ont disputé 200 matchs dans la Ligue nationale, dont deux repêchés par le Canadien en deuxième ronde, Jacob De La Rose et Artturi Lehkonen. Des choix de première ronde ultérieurs ont permis au CH de mettre la main sur les 3e et 12e choix total de ce repêchage, Jonathan Drouin et Max Domi.

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Michael McCarron

Le Canadien repêchait encore une fois en fin de première ronde en 2014. Seulement 15 joueurs parmi les 184 repêchés après lui sont devenus des réguliers dans la Ligue nationale, dont huit joueurs d’impact. Le CH n’avait pas de choix de deuxième ni de quatrième ronde, donc un seul parmi les 72 premiers, bref, six au total dont quatre à compter de la cinquième ronde.

Le premier choix de 2015, 26e au total, le défenseur Noah Juulsen, était implanté dans la LNH au moment de subir une blessure à un oeil l’an dernier. Il avait cinq points en 21 matchs et une fiche de +5. Il a disputé 12 matchs en un an et il est toujours au repos. Le Canadien n’avait pas de choix de deuxième ronde, donc un seul choix parmi les 86 premiers et cinq choix au total.

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Noah Juulsen

Timmins a enfin eu la chance de repêcher parmi les 10 premiers en 2016. Le défenseur Mikhail Sergachev, neuvième choix au total, n’est pas resté longtemps dans l’organisation, il a servi d’appât pour obtenir Jonathan Drouin. Sergachev pourrait obtenir sa deuxième saison de 40 points en trois ans. Montréal n’avait pas de choix de deuxième ronde, et seulement six choix au total, mais il a réussi à repêcher un défenseur régulier de la Ligue nationale en quatrième ronde, Victor Mete.

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Mikhail Sergachev

À lire

Hendrix Lapierre était considéré comme l’un des meilleurs espoirs de la cuvée 2020 avant de subir trois commotions cérébrales en huit mois. Il a choisi une longue pause, de façon à se remettre complètement de ses maux. Cet attaquant des Saguenéens de Chicoutimi perdra sans doute plusieurs rangs au classement, mais il préfère un rétablissement total pour le bien de sa carrière à long terme. Un pari stratégique. Qui sait si un club ne réalisera pas un vol en le repêchant plus tard ? Les détails dans l’article d’Alexandre Pratt.