(Las Vegas) Marc-André Fleury s’amuse encore comme un enfant. Un enfant de 34 ans.

Tout a été dit sur le gardien québécois à travers les années. Toujours en termes élogieux. Son talent n’est plus à démontrer. Cette saison comme toutes les autres, d’ailleurs : fiche de 8-3-0, efficacité à ,928, moyenne de 2,29.

Il est la pierre d’assise des Golden Knights de Vegas. Et la valeur sûre dans le vestiaire. En fait, pourquoi ne pas plutôt donner la parole à ses coéquipiers ? Ce sont eux, les plus à même de mettre en mots l’importance de Fleury pour l’équipe. Le principal intéressé, lui, est de nature plutôt humble.

Jonathan Marchessault : « C’est un compétiteur dans l’âme. La fin va arriver quand il va vouloir que ce soit la fin. Même après trois Coupes Stanley et tout ce qu’il a accompli en tant que gardien, il en veut plus. C’est tellement une belle attitude à avoir. C’est l’attitude qu’on a ici. On ne devient jamais satisfaits de ce qu’on a. Surtout quand on voit un futur membre du Temple de la renommée qui en veut plus. Nous, pourquoi on n’en voudrait pas plus ? »

Il a tout le temps le grand sourire, il est le premier à l’aréna. Il aime être sur la glace. Il est tout le temps le dernier à quitter la glace dans les entraînements. Ça nous aide beaucoup. C’est un des plus vieux, mais il agit encore comme un petit jeune.

William Carrier

Max Pacioretty : « Il mérite tout le crédit qu’il reçoit. Personne ne travaille aussi fort que lui dans l’équipe. C’est probablement le meilleur leader avec lequel j’ai joué. Un jour, je pourrai repenser à ma carrière et me rendre compte que j’ai été chanceux de jouer avec lui. »

Cette réflexion de Pacioretty est devenue très concrète le 19 octobre dernier quand Fleury est retourné à Pittsburgh, où il a marqué l’histoire des Penguins. On l’a vu jaser avec ses anciens coéquipiers, les narguer, échanger des rondelles, nuire aux routines d’avant-match. Une scène inhabituelle dans un sport où les amitiés se font et se défont au rythme des rivalités.

« Il est exactement ce que tu cherches chez un coéquipier, ajoute Pacioretty. Un gardien a la capacité de donner le ton chaque jour, dans le vestiaire, à l’entraînement et pendant le match. C’est ce qu’il fait.

« Je n’étais pas surpris à Pittsburgh de voir tout le monde essayer de le saluer. Je pourrais vous parler de lui toute la journée, de ce qu’il représente pour l’équipe et de ce que je pense de lui comme joueur. Mais tout le monde le sait déjà. »

« Il n’y a pas une personne sur terre qui peut dire quelque chose de mauvais sur lui, a renchéri Marchessault. Je n’ai jamais vu ça. Il a une belle réputation, mais c’est incroyable à quel point il est gentil en dehors de la glace. Ça part de lui. Il vient à l’aréna et il va pratiquer le plus fort, alors ça force tout le monde à pratiquer plus fort. C’est tout à son honneur après 44 ans dans la LNH qu’il soit encore capable d’être bon ! »

Le Temple

Marchessault évoque à la blague les « 44 ans dans la LNH » de Fleury. Il parle de lui comme d’un futur membre du Temple de la renommée. En tout cas, les exploits sont là pour appuyer la candidature. Cinq finales de la Coupe Stanley, trois triomphes, déjà 447 victoires, le 7e total de l’histoire du hockey. Il est à seulement 104 unités de Patrick Roy et du deuxième rang, une cible accessible compte tenu des années qui lui restent.

Fleury, lui, réagit comment quand on lui parle du Temple de la renommée ? Il commence par son habituel sourire gêné.

« Il ne faut pas mettre la charrue devant les bœufs, on n’est pas rendu là, je veux aider les Golden Knights à remporter le plus de matchs possible. On verra après. »

Parfait, mais qu’est-ce que ça lui fait de se retrouver sur la même liste que d’autres grands comme Martin Brodeur ou Patrick Roy pour le nombre de victoires ?

« Patrick et Martin ont été mes idoles, des gars que j’essayais de copier. Enfant, j’étais un fan du Canadien et j’étais fasciné par le style papillon de Patrick Roy. Après, Martin Brodeur est arrivé et j’ai voulu jouer comme eux. C’est un honneur, mais ils ont joué pendant longtemps à une époque où il y avait des matchs nuls. Ça nous permet d’avoir plus de victoires et de les rattraper plus vite. »

Humble, on le disait.

N’empêche, Fleury a 16 saisons dans le rétroviseur. Il lui en reste forcément beaucoup moins. Il admet qu’il commence à penser à l’après-carrière, sans en avoir une idée précise. Il veut éviter de passer ses journées assis sur le divan, pour reprendre son expression, mais c’est une réflexion difficile pour quelqu’un qui a joué au hockey toute sa vie.

Quoi qu’il en soit, voir la fin arriver a changé sa manière d’aborder son sport aujourd’hui.

« Oui, surtout dans les moments où ça va moins bien. On perd, on se fait rincer : le lendemain, j’essaie de repartir à zéro, de peaufiner des détails et d’avoir du plaisir avec les gars. »

Avec pour résultat qu’il est peut-être devenu le joueur de 34 ans qui les fait le moins.