(Québec) La révolte contre les entraîneurs abusifs de la LNH prouve que le milieu sportif ne doit plus tolérer des méthodes « barbares et arriérées », affirme la ministre déléguée à l’Éducation, Isabelle Charest.

En entrevue avec La Presse, la ministre dit se réjouir de la fronde qui secoue le hockey professionnel depuis quelques semaines. Elle souhaite en effet qu’elle gagne aussi le sport amateur au Québec.

« Il y a un changement de culture qui est en train de s’opérer, a déclaré Mme Charest, elle-même ancienne championne olympique. Avec les nouvelles générations, avec ce qu’on sait maintenant d’un milieu sportif sain et sécuritaire, on ne tolère plus des situations comme celles-là. »

On ne tolère plus des techniques d’entraînement barbares et arriérées. Ce n’est pas comme ça qu’on va tirer le maximum des athlètes, faire en sorte qu’ils vont s’épanouir, évoluer et performer.

Isabelle Charest, ministre déléguée à l’Éducation

Au cours des dernières semaines, la chute dans la controverse de trois figures de la vieille garde a ébranlé le monde du hockey professionnel.

D’abord, Sportsnet a congédié l’ex-entraîneur Don Cherry pour avoir ciblé les immigrants dans un segment sur le jour du Souvenir.

PHOTO DARREN CALABRESE, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Au cours des dernières semaines, l’ex-entraîneur et commentateur Don Cherry a été congédié par le réseau Sportsnet pour avoir ciblé les immigrants dans un segment sur le jour du Souvenir.

On a ensuite appris que l’entraîneur vétéran Mike Babcock, congédié par les Maple Leafs de Toronto, a déjà demandé à une recrue de 19 ans de classer ses coéquipiers en fonction de leur éthique de travail. Il a ensuite fait part de sa réponse au reste de l’équipe. Dans les jours qui ont suivi cette révélation, le joueur en question, Mitch Marner, a appelé d’autres athlètes à dénoncer des cas d’abus.

Dans l’intervalle, un ancien joueur, Akim Aliu, a accusé son ancien entraîneur Bill Peters d’avoir tenu des propos racistes à son endroit. Peters, aujourd’hui entraîneur-chef des Flames de Calgary, a été suspendu par son équipe et il a présenté des excuses mercredi.

« Ancienne culture »

Isabelle Charest se réjouit que les façons de faire d’une autre époque soient aujourd’hui exposées au grand jour et dénoncées. Selon elle, il est grand temps que le hockey professionnel se débarrasse de son « ancienne culture ».

« Il y a beaucoup de gens qui ont appris sur le tas, qui étaient des athlètes et qui se sont retrouvés dans des postes d’entraîneur ou de directeur, observe-t-elle. Ils répètent ce qu’ils ont appris et comment ils étaient traités dans le temps, en n’ayant pas nécessairement de formation et de compétences. »

« C’est néfaste pour l’individu, ajoute-t-elle. À partir du moment où tu as un climat malsain pour un individu, forcément ton milieu en souffre aussi. Tu perds des athlètes de grand potentiel, tu perds une masse aussi.

« Il y a un peu de l’ancienne culture du sport où il fallait être tough, avec tous les sous-entendus et tous les préjugés que ça amenait », ajoute-t-elle.

La ministre voit beaucoup de positif dans les révélations des dernières semaines. Elle souhaite que des athlètes québécois n’aient pas à subir de comportements abusifs de la part de leurs entraîneurs ou de leurs coéquipiers.

« Le changement de culture doit continuer. Moi aussi, j’ai un jeune qui joue au hockey et moi aussi j’en vois, des comportements qui sont inacceptables. »

Je considère que j’ai eu un parcours sportif extrêmement positif qui m’a amené des compétences, des qualités, des valeurs, des expériences positives. Ce que je veux reproduire, c’est donner ces mêmes opportunités aux athlètes, aux entraîneurs et aux parents.

Isabelle Charest, ministre déléguée à l’Éducation

Énoncé ministériel

Plus tôt cette semaine, Isabelle Charest a présenté un énoncé ministériel qui vise à faire le ménage dans le sport amateur québécois.

Toutes les fédérations sportives de la province devront adhérer aux nouvelles normes pour conserver leur financement. Elles devront se doter d’instances indépendantes pour traiter les cas de plainte.

Un athlète qui s’estime lésé par son entraîneur n’aura donc pas à le dénoncer directement à la fédération qui l’emploie.

« Le cas le plus connu, c’est Bertrand Charest, a illustré Mme Charest. Mais il y a d’autres situations semblables où des athlètes n’ont pas dénoncé, n’ont pas trouvé d’aide parce qu’ils n’avaient pas de ressources crédibles ou impartiales pour aller dénoncer. »

Elle souhaite par ailleurs soumettre les entraîneurs et personnes en autorité face aux athlètes à une vérification de leurs antécédents judiciaires.

La mise en œuvre de cette nouvelle politique coûtera environ 2 millions.