Claude Julien a d’abord tenu à servir cette mise en garde après le match d’hier soir : « Il ne faut pas oublier que des joueurs, peut-être des vétérans, essaient de se remettre en forme plus lentement que les gars qui veulent se faire voir. Au bout du compte, vers la fin des matchs pré-saison, tu es capable de voir les vraies couleurs de tout le monde. Donnons crédit aux jeunes, qui ont été probablement nos meilleurs joueurs. »

Cela dit, l’entraîneur du Canadien est moins conservateur que certains peuvent le croire. Rappelons-nous de septembre 2017. Qui chez le fan moyen connaissait Victor Mete ? Julien a pourtant donné toutes les chances à ce gringalet de 19 ans à la gauche du premier duo de défenseurs, et Mete allait, à la surprise générale, demeurer avec le CH. Le vétéran Mark Streit allait écoper pour faire une place au jeune. Après deux matchs, le divorce était prononcé. 

Peu de gens croyaient aux chances de Jesperi Kotkaniemi de percer la formation l’an dernier, à seulement 18 ans. La présence de Kotkaniemi a forcé Tomas Plekanec à rentrer en Europe. Matthew Peca, pourtant « protégé » en principe par un contrat garanti de deux ans, a aussi perdu sa place, tout comme Jacob De La Rose. 

Côté défensif, Julien a osé mettre fin à la séquence de 622 matchs consécutifs de Karl Alzner pour faire jouer le jeune Noah Juulsen au sein de la deuxième paire pour entamer la saison.

Ça nous amène à Ryan Poehling et Cale Fleury, deux des meilleurs joueurs du Canadien hier soir à Bathurst contre les Panthers de la Floride. Poehling, 6 pieds 2 pouces et 204 livres de talent, de fougue et d’intelligence, a joué avec l’assurance d’un vétéran dans les trois zones. 

Son jeu pour permettre au Canadien de marquer le but gagnant en fin de troisième était révélateur. Le CH se défendait en infériorité numérique. Poehling a effectué une sortie de zone pour contre-attaquer. Il aurait pu se contenter de dégager rapidement et les entraîneurs n’auraient pas été insatisfaits pour autant. Mais sa feinte devant Aaron Ekblad, l’un des bons défenseurs de la LNH, demandait non seulement de l’audace, mais beaucoup de dextérité. 

Il s’agit d’un seul match préparatoire. Mais la performance de Poehling hier s’ajoute à celle de la dernière rencontre l’an dernier, et à ses exploits au Championnat mondial junior. Poehling est non seulement doué, il dérange en échec-avant. 

Claude Julien devra déterminer d’ici la fin du camp d’entraînement si Poehling, premier choix de l’équipe en 2017, est plus utile qu'un Nate Thompson au sein d’un trio vraisemblablement complété par Nick Cousins et Jordan Weal. Vous connaissez sans doute déjà ma réponse. Le Canadien aurait ainsi quatre très bons trios. 

Si on ne les connaissait pas, on aurait juré que Poehling a une saison de la LNH dans le corps et Jesperi Kotkaniemi un seul match d’expérience. Le jeune Finlandais a connu un match difficile contre les Panthers. Donnons-lui le bénéfice du doute, après sa belle saison l’an dernier, mais Kotkaniemi devra éviter de telles performances pour ne pas semer le doute dans l’esprit de la direction. Il est encore très jeune, rappelons-le. Poehling, par exemple, a 17 mois de plus que lui. 

Le défenseur droitier Cale Fleury, 20 ans comme Poehling, un autre colosse, à 6 pieds 1 pouces et 205 livres, un choix de troisième ronde en 2017, a lui aussi excellé. Comme lundi d’ailleurs. Claude Julien l’a vanté sans même se le faire demander par les journalistes. 

PHOTO ERIC BOLTE, USA TODAY SPORTS

Cale Fleury

Fleury a secoué quelques adversaires avec des mises en échec retentissantes. Son positionnement est impeccable. Il a un bon flair offensif. Mais il a surtout impressionné au chapitre des ses prises de décision avec la rondelle sous pression. Il lutte pour un poste de sixième défenseur. S’il continue ainsi, il apportera beaucoup plus au CH que Christian Folin, un arrière résolument défensif, peut le faire.

Deux autres recrues, Nick Suzuki et Josh Brook, auront la chance de briller à leur tour ce soir. Suzuki a connu un premier bon match lundi soir. Il jouera entre Paul Byron et Jordan Weal au Centre Bell. Brook a du rattrapage à faire sur Fleury. Il sera jumelé à nouveau à Brett Kulak. Une présence rassurante pour lui. Fleury, lui, a réussi à épater autant avec Xavier Ouellet lundi qu’Otto Leskinen hier. 

Ce camp ne manque pas de piquant.