Dans le vestiaire d’un aréna de Dollard-des-Ormeaux, Jeremy Davies enfilait son équipement aux couleurs des Predators de Nashville. Il se préparait à sauter sur la glace pour améliorer son coup de patin, son tir aussi, dans une autre journée de ce qui est vite devenu « le plus gros été de sa vie ».

Le nom vous dit peut-être quelque chose. Vous l’avez certainement vu passer dans l’actualité sportive. Quelques indices : 

Il a fait partie, le 22 juin, de l’une des plus grosses transactions de l’année. Il est passé des Devils du New Jersey aux Predators, en compagnie de Steven Santini et de deux choix de deuxième tour. Il a été échangé contre un certain… P.K. Subban.

Et on sait par expérience que les échanges impliquant P.K. Subban ne laissent jamais indifférent. Davies participait à un tournoi de golf avec des amis à Beaconsfield quand son téléphone a sonné.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

« Je mangeais mon déjeuner. J’ai regardé mon téléphone et c’était un des DG adjoints des Devils qui m’appelait. Tout de suite, je savais que j’avais été échangé. Il ne m’a pas donné les détails. Il m’a seulement dit que je faisais partie d’une grosse transaction avec Nashville. C’était un choc. »

Pendant que Davies était au téléphone, un de ses amis s’est tout de suite rendu sur Twitter, où la nouvelle avait déjà ébranlé la planète hockey. Quand le joueur est retourné s’asseoir, il a compris l’ampleur de la « grosse transaction ».

Subban est quelqu’un que je regardais à la télévision quand il jouait avec le Canadien. C’était le meilleur joueur de l’équipe et c’était un défenseur offensif comme moi. C’est drôle. Maintenant, tout le monde me connaît comme le gars qui a été échangé contre Subban.

Jeremy Davies

Davies se décrit ainsi avec le sourire aux lèvres, pour l’instant du moins. Évidemment, il espère devenir beaucoup plus que ça à Nashville au cours des prochaines années.

Davies est un défenseur de 22 ans, originaire de Sainte-Anne-de-Bellevue, produit du programme du Lac St-Louis. Sa carrière a fait un bond remarquable dans la dernière année avec les Huskies de l’Université Northeastern. Il a pris un rôle de leadership et a mené son équipe à plusieurs grandes victoires. Les Huskies ont non seulement gagné le « Beanpot », tournoi qui regroupe les quatre universités de Boston, mais aussi le titre de la relevée division Hockey East.

Il a terminé au premier rang des marqueurs de son équipe, fait rare pour un arrière. D’ailleurs, seul le superbe espoir de l’Avalanche du Colorado Cale Makar a produit plus que lui chez les défenseurs de sa division. Si bien que les Devils lui ont offert en avril un contrat de deux saisons.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

De la pression ?

Bref, Jeremy Davies se développait à son rythme, sans brûler les étapes, sous le radar. Tout a changé en quelques minutes.

Les grands titres ont été rapides à juger que David Poile avait perdu l’échange, que le retour était trop modeste pour une étoile si brillante, que la contrainte financière avait forcé sa main. Les Devils se sont immédiatement hissés parmi les équipes s’étant le plus améliorées durant l’entre-saison.

Et à travers tout ça, un jeune défenseur québécois qui n’avait rien demandé et dont la carrière serait désormais scrutée par les partisans et les analystes. Pourtant, Davies s’est plutôt réjoui de sa nouvelle situation.

« Tu ne veux pas être échangé, mais être dans un tel échange, ça fait du bien. Il n’y a pas plus de pression pour moi. Le plan de match ne change pas. Je devais aller au camp des Devils et montrer ce que je savais faire. »

Que ce soit avec une autre équipe ne change rien. Je sais ce que je dois faire, je sais ce que j’ai à améliorer. Je n’ai pas de pression, j’aime ça, même. Ça veut dire que tu n’es pas n’importe qui pour l’organisation. Ils veulent te développer et que tu deviennes un joueur de la LNH.

Jeremy Davies

Cet été, Davies veut donc prendre de la masse musculaire, puisqu’il devra désormais gagner ses batailles contre des joueurs au gros gabarit. Il veut améliorer son tir, qu’il souhaite plus dévastateur. Il veut jouer dans la LNH l’an prochain, mais il est tout de même lucide. Les Preds ont sept défenseurs sous contrat de la LNH, et le jeune espoir Dante Fabbro semble en avance sur Davies.

« Que ce soit à Nashville ou dans la Ligue américaine, l’objectif est de faire un pas en avant. C’est une grosse année pour faire ma place. Il pourrait y avoir un poste dans la LNH dès cette année, mais je sais que dans le futur, je vais avoir la chance de me battre pour une place dans le top 6. Cette année, c’est important de me prouver à moi-même ce que je peux faire au prochain niveau. Je pense que je peux jouer dans la LNH l’an prochain, mais c’est important de respecter l’organisation et son plan pour moi. »

Pendant ce temps, dans l’ombre d’un petit aréna de Montréal, Davies poursuit « le plus gros été de sa vie ». En attendant les projecteurs du camp.