Le repêchage qui s’en vient ne sera pas le premier d’Olivier Fortier, mais chaque fois, pour lui, c’est un peu spécial. Parce que ça le renvoie au repêchage de 2007, le sien, celui où il s’est retrouvé sur la scène de l’aréna à Columbus avec un chandail du Canadien sur le dos.

Il dit qu’il ne va jamais oublier ce jour-là, et puis vraiment, comment pourrait-il l’oublier ? Le Canadien venait de repêcher Ryan McDonagh et Max Pacioretty avec ses choix de premier tour, puis P.K. Subban avec son choix de deuxième tour.

Le prochain, ça allait être lui. Tout juste avant le choix suivant du club, Yannick Weber.

« Tous des gars qui ont eu de meilleures carrières que moi ! », lance-t-il en rigolant au bout du fil.

Est-ce qu’Olivier Fortier est amer ? Est-ce qu’il est rongé par les doutes, par les regrets ? Non, pas du tout. Après quelques instants au fil de notre conversation, il est déjà évident qu’à 30 ans, l’ancien espoir du CH se porte très bien. Il n’est peut-être plus un espoir, mais son nouveau travail lui permet d’apporter un peu d’espoir, justement, aux jeunes joueurs qui rêvent d’une carrière dans la LNH.

Car depuis six ans, il est agent de joueurs pour la firme Momentum Hockey.

« Le hockey, pour moi, ça n’a jamais été une finalité, explique-t-il en entrevue téléphonique. C’est certain que j’étais passionné de hockey, et je le suis encore, c’est pour ça que je travaille dans le milieu. » 

J’ai toujours eu du succès à l’école. Je savais qu’une fois le hockey terminé, j’allais étudier le droit et devenir agent.

Olivier Fortier

C’est donc en 2013 que le natif de Québec a compris qu’il était temps de ranger l’équipement et de passer à autre chose. Le droit, il l’a étudié à l’Université Laval, avant d’aller conclure son stage obligatoire de droit à l’été 2018. Entre-temps, il s’est promené aussi dans les arénas de la province pour apprendre le métier d’agent.

Il y a des joueurs pour qui la transition dans le « vrai » monde est très difficile à faire, mais ce n’est pas le cas de Fortier.

« Je suis un gars repêché en troisième ronde, qui n’a pas pu aller dans la Ligue nationale, mais combien de choix de troisième tour parviennent à y aller ? demande-t-il. Peut-être trois ou quatre par année ? Les 25 autres qui n’y arrivent pas, c’est à peu près la norme. Je pense que si ça n’avait pas été des blessures, j’aurais joué dans la Ligue nationale, assurément.

« J’ai été blessé aux épaules, à un genou. Chaque fois, c’était six ou sept mois de récupération. Et quand ça t’arrive à 20 ans, un âge important pour le développement d’un joueur, tu prends du retard sur tout le monde. J’étais à l’écart en essayant de me remettre en forme, mais pendant ce temps-là, les autres joueurs de mon âge progressaient plus vite que moi.

« À la fin de la saison 2012-2013, j’ai eu des offres de l’Europe, une offre du Canadien. Mais je voyais bien que je n’allais pas m’établir dans la LNH. Et je ne me voyais pas continuer juste pour remplir un chandail quelque part dans le bas d’une formation de la Ligue américaine. »

« Encadrer les jeunes »

C’est tout de suite après sa décision d’une retraite sans regrets, à l’âge de 24 ans, qu’Olivier Fortier se lance sur le terrain des agents du hockey. Son propre agent, Christian Daigle, de Momentum, lui avait déjà parlé d’un poste. Il n’a pas hésité longtemps.

« Je trouve que j’ai un avantage dans ce milieu-là, parce que j’ai moi-même déjà été un espoir de premier plan. J’ai vécu les gros tournois, les événements, les entrevues avec les dirigeants de la LNH, les camps d’évaluation, les camps de la LNH avec le Canadien. Je suis bien placé pour conseiller les jeunes », ajoute-t-il.

C’est avec tout ce bagage d’expérience qu’il va se rendre à l’aréna Rogers de Vancouver pour le premier jour du repêchage, demain. Il y sera avec quelques-uns des espoirs de sa firme, dont l’attaquant Jakob Pelletier, qui vient de connaître une saison de 89 points avec les Wildcats de Moncton. Il y sera avec d’autres espoirs aussi, qui vont peut-être se présenter à l’aréna pour rien, sans jamais entendre leur nom prononcé au micro.

« Je suis là pour encadrer les jeunes, tient à préciser l’agent. Il y en a qui vont être choisis, d’autres pas. Les jeunes doivent comprendre que la Ligue nationale, ce n’est pas une finalité. »

De toute évidence, Olivier Fortier l’a très bien compris.