Le Canadien doit-il vendre, acheter ou rénover?

En avril, ça faisait consensus. Le Tricolore était acheteur. Ce matin ? C’est moins certain. Les contrats accordés cette semaine à Erik Karlsson (92 millions), Jeff Skinner (72 millions) et Kevin Hayes (50 millions) ont forcé plusieurs équipes à retravailler leur fichier Excel.

Oui, le Canadien est riche. Il peut atteindre la limite du plafond salarial. Sa marge ? Presque 12 millions de dollars, contrats de Joel Armia et Artturi Lehkonen non compris. De quoi s’amuser. Et c’est aussi vrai que les gens riches font leur épicerie sans courir les rabais. Mais ils ne sont pas nonos pour autant. Ils ne remplissent pas leur panier de branches de céleri à 6 $ le kilo.

La même logique s’applique au hockey. Quand la hausse des salaires suit la courbe de l’inflation au Venezuela, on cherche une nouvelle recette.

C’est la situation dans laquelle se trouve le Canadien. Coincé dans un marché favorable aux vendeurs et aux joueurs autonomes. Ça tombe mal. Pour être compétitif l’hiver prochain, le Tricolore doit combler deux gros besoins. Un marqueur pour son premier trio et un défenseur gaucher. Comment le directeur général Marc Bergevin s’y prendra-t-il ? Participera-t-il à la surenchère ? Ou, au contraire, profitera-t-il de l’inflation pour vendre ses actifs en demande ?

Voici une liste de joueurs qui correspondent aux besoins du Canadien. Ils sont classés de A à E, selon la probabilité qu’ils portent le chandail bleu-blanc-rouge la saison prochaine. 

Un joueur autonome avec restriction (E)

Un groupe talentueux, qui comprend plusieurs vedettes de rivaux directs du Canadien : Mitchell Marner (Toronto), Sebastian Aho (Caroline), Charlie McAvoy (Boston), Zach Werenski (Columbus). Les partisans du Canadien adorent cette idée. Moi ? Pas du tout. La compensation se compte en choix de premier tour. Dont celui de l’an prochain. Je souligne que le repêchage de 2020 aura lieu au Centre Bell. Que le Canadien, s’il est exclu des séries, aurait une mince chance de sélectionner Alexis Lafrenière en remportant la loterie. Imaginez maintenant un scénario dans lequel Marc Bergevin embauche Marner, que le club ne participe pas aux séries, que les Maple Leafs remportent la loterie et repêchent Lafrenière.

Il y aurait une émeute.

Ça n’arrivera pas. 

Ryan Murray (D)

Un rare défenseur gaucher disponible sur le marché des transactions. Mais avec un seul but la saison dernière – et 13 en 320 matchs dans la LNH –, est-il vraiment supérieur à Victor Mete ? 

Jake Gardiner (C)

Un défenseur gaucher qui peut disputer 21 minutes par match et générer de l’attaque. Parfait pour le Canadien ? Oui. Sauf que c’est pas mal le seul bon défenseur gaucher parmi les joueurs autonomes. La demande excède largement l’offre. Gros potentiel de surenchère.  

Artemi Panarin (C)

Depuis 25 ans, un seul joueur autonome capable de produire à un rythme d’un point par match s’est joint au Canadien : Michael Cammalleri. Artemi Panarin correspond à ce profil. Marc Bergevin l’a déjà courtisé alors qu’il était dans la KHL. Sans succès. Panarin, 27 ans, est en position de demander un salaire avoisinant les 12 millions par saison. Le Canadien pourrait s’en accommoder s’il parvenait à refiler un gros contrat ailleurs. C’est possible. Mais c’est plus facile de jouer à Opération les yeux fermés. 

Matt Duchene (B)

– Attaquant A : 27 ans ; aucune saison de 60 points ; 0,60 point par match (PPM) en carrière – Attaquant B : 28 ans ; trois saisons de 60 points ; 0,75 PPM – Attaquant C : 27 ans ; trois saisons de 60 points ; 0,67 PPM ; aucune participation aux séries

Lequel embauchez-vous ? Probablement l’attaquant B. Matt Duchene. Tant mieux : des trois, c’est le seul disponible. Le hic ? L’attaquant A (Kevin Hayes) vient de signer pour 7,1 millions par saison. L’attaquant C (Jeff Skinner), pour 9 millions. Duchene peut viser entre 10 et 12 millions. C’est beaucoup d’argent pour un centre avec un différentiel négatif chaque hiver depuis 2015. Il reste à la portée du Canadien. 

PHOTO TOM SZCZERBOWSKI, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Mathieu Perreault, des Jets de Winnipeg

Mathieu Perreault (B)

Si le Canadien n’embauche ni Duchene ni Panarin, il pourrait préférer les rénovations à un achat. Un petit coup de pinceau fait toujours son effet. Mathieu Perreault pourrait alors s’amener à Montréal. Les Jets souhaitent refiler les deux dernières années de son contrat (4 millions par saison) à un autre club. Le Canadien pourrait bénéficier des services d’un Québécois avec de l’expérience en séries. Un joueur moins bien payé (Byron, Peca, Weise) pourrait faire le chemin inverse. 

Chris Kreider (B)

Marc Bergevin est d’habitude parmi les DG les plus actifs autour du repêchage. Il possède plusieurs choix cette année, dont trois parmi les 50 premiers. Il pourrait obtenir un joueur de qualité pour ses deux choix du deuxième tour. Un attaquant comme Chris Kreider, qui entame la dernière année de son contrat avec les Rangers de New York. Carey Price et lui ne sont pas copain-copain. Mais Kreider, 28 buts la saison dernière, reste un bon marqueur. Tyler Toffoli, des Kings de Los Angeles, est dans la même situation contractuelle. Il est toutefois moins prolifique que Kreider. 

Shayne Gostisbehere (B)

Un jeune défenseur gaucher à caractère offensif. Quatorze points en supériorité numérique la saison dernière. Seul Jonathan Drouin (16) a fait mieux chez le Canadien. Son contrat de 4,5 millions pour quatre ans est raisonnable. Un joueur qui comblerait plusieurs besoins du Tricolore.

Cela dit, l’arrière des Flyers de Philadelphie n’est pas joueur autonome. Qui donner en retour ? Des partisans du Canadien suggèrent Paul Byron. Ça fonctionne peut-être au niveau recrue de NHL 19 sur votre Xbox. Mais pas dans la réalité. Si vous et moi savons que Byron est surpayé sur le quatrième trio à Montréal, pariez qu’Alain Vigneault et Michel Therrien ont aussi reçu le mémo. Certains suggèrent d’ajouter Andrew Shaw. C’est toutefois un autre gros salaire que les Flyers ne peuvent se permettre. N’empêche, avec son surplus d’attaquants, ses nombreux espoirs et ses choix, le Canadien possède ce qu’il faut pour soutirer Gostisbehere aux Flyers. 

Anders Lee/Mats Zuccarello/Micheal Ferland/Gustav Nyquist (A)

Je triche un peu. J’ai mis quatre noms plutôt qu’un seul. Ce sont les plans B des équipes qui seront rejetées par Panarin et Duchene. Anders Lee, 28 ans, serait la meilleure option pour le Canadien. Le capitaine des Islanders de New York a compté plus de 25 buts lors de quatre des cinq dernières saisons. Il a mené son équipe en supériorité numérique avec 10 buts en 2018-2019. Le Canadien a la marge nécessaire pour lui offrir un contrat. Un match parfait. Les trois autres attaquants coûteraient moins cher. Mais ils sont aussi offensivement inférieurs à Lee. 

Enfin, un mot sur l’hypothèse d’un Canadien vendeur. Échanger Jeff Petry pourrait rapporter le jackpot à Marc Bergevin. Pensez à un bouquet de choix et d’espoirs. Une transaction qui pourrait accélérer la période de reconstruction. Sauf que ce serait peut-être au détriment d’une place en séries. Un gros risque pour une organisation qui a raté le tournoi du printemps trois fois lors des quatre dernières années.