Kerry Fraser est catégorique : ce ne sont pas des nouvelles reprises vidéo qui sont nécessaires dans la Ligue nationale de hockey, mais plutôt des arbitres qui savent mieux se placer sur la glace.

Fraser, lui-même arbitre dans la LNH pendant 30 ans, estime que l’arbitrage est déficient depuis le début des séries, mais contrairement à plusieurs autres, il pense que la solution ne passe pas par l’ajout de reprises vidéo, encore moins après avoir vu le but accordé aux Sharks lors du match de mercredi soir à St. Louis, à la suite d’une passe de la main.

« Pour un arbitre dans une situation comme celle-là, la clé, c’est le positionnement, a-t-il expliqué en entrevue téléphonique avec La Presse. Il faut qu’au moins deux des officiels soient en position pour voir la rondelle des yeux, et peut-être même trois officiels. Il faut que les arbitres soient dans une position idéale pour voir le jeu, et ce n’était pas le cas mercredi soir. »

Pour illustrer son propos, Fraser offre en exemple le travail de l’arbitre Chris Rooney lors du septième match de la série Blues-Stars au deuxième tour. « Sur le but gagnant en prolongation [le but de Patrick Maroon, des Blues], on voit très bien l’arbitre qui est situé d’un côté du jeu, mais qui se déplace de l’autre côté pour être bien certain de ne jamais perdre la rondelle de vue. Le positionnement de l’arbitre sur ce jeu, c’est exactement ce que l’on nous apprend à faire, à la lettre.

« Mais le problème de nos jours, surtout avec ces nouveaux arbitres qui arrivent, c’est qu’ils restent plantés dans un coin, et attendent que l’action se déplace vers eux. Ce n’est pas la bonne façon de travailler. Un arbitre doit bouger ses pieds et toujours se placer en position pour rendre une bonne décision. » — Kerry Fraser

Il poursuit : « Plusieurs de ces arbitres sont d’anciens joueurs des ligues mineures, alors ils ont des réflexes de joueurs sur la glace, comme quand ils vont se placer derrière le filet, où ils sont toujours dans le chemin. Mais c’est là qu’ils allaient pour essayer de récupérer les rondelles quand ils étaient joueurs. On ne leur a pas appris. »

Ce que Fraser voit aussi depuis le début des présentes séries, c’est des arbitres qui manquent de constance, qui manquent de confiance, et qui passent beaucoup de temps à regarder par-dessus leur épaule et à douter.

« Ils se réunissent, ils font des caucus à quatre, ils ne sont pas certains. Ils essaient parfois de deviner, et ça a donné ce qu’on a vu lors de la série entre les Sharks et les Golden Knights, quand ils ont mal interprété un coup de bâton. C’est pour ça que les arbitres échouent depuis le début des séries. Ils ne travaillent pas de la même manière qu’ils le font lors de la saison, ça fait longtemps que ça dure et c’est un problème. On ne leur dit pas de changer, mais ils finissent par changer leur façon de travailler à cause de la pression des séries.

« Alors on finit par laisser les joueurs jouer, et on finit par les laisser tricher. Quand Brad Marchand a mis le patin sur la palette du bâton d’un adversaire [des Blue Jackets de Columbus au deuxième tour], il aurait fallu qu’il soit puni pour une inconduite de 10 minutes. Mais on ne l’a pas fait, alors les arbitres ont perdu le contrôle. »

À ses yeux, la solution ne passe donc pas par une plus grande utilisation de la vidéo, mais par une collaboration avec un cinquième officiel. « Il y a un arbitre substitut qui est déjà sur place à chaque match en cas de blessure de toute façon… pourquoi ne pas avoir recours à lui dans un cas comme la passe avec la main, mercredi soir à St. Louis ? Ce serait la chose à faire. »

Enfin, Fraser ne s’attend pas à ce que les choses changent de sitôt, même lorsque les DG de la ligue vont se réunir à Vancouver au mois de juin, en marge du prochain repêchage.

« Parce que chaque DG veut ce qu’il y a de mieux pour son club, conclut-il. Le DG d’une équipe plus robuste va militer pour des règles qui favorisent une équipe plus robuste, le DG d’une équipe de talent va militer pour des règles qui favorisent son équipe à lui, et ainsi de suite. Il y a des dirigeants qui pensent au bien de la ligue, mais il y en a aussi qui pensent à leur équipe avant tout. »