Le 10 mai 2017, Joël Teasdale assistait impuissant, habillé en civil parce qu’il soignait une blessure, à la victoire des Sea Dogs de Saint John le quatrième match de la finale de la Coupe du Président. Les Sea Dogs complétaient ainsi leur balayage de l’Armada de Blainville-Boisbriand.

Le 13 mai 2018, Teasdale était sur la patinoire quand les gants et les bâtons se sont mis à voler sur la patinoire du Centre régional K.C. Irving de Bathurst. Le problème, c’est que les gants étaient ceux du Titan d’Acadie-Bathurst. La Coupe du Président échappait à l’Armada pour la deuxième année de suite.

Un an plus tard, l’Armada n’est pas de la finale de la LHJMQ. Mais Teasdale, lui, y sera pour la troisième fois de suite. Cette fois, il y participera dans l’uniforme des Huskies de Rouyn-Noranda, qui ont acquis Teasdale en janvier. L’attaquant, un espoir du Canadien, en est aussi à sa dernière saison chez les juniors et jouera vraisemblablement pour le Rocket de Laval la saison prochaine. C’est donc sa dernière chance d’effacer les souvenirs du passé et de remporter cette satanée Coupe du Président.

« Le pire sentiment, c’était l’an dernier. Quand ça s’est terminé et qu’ils ont lancé leurs gants, j’étais sur la patinoire. Je ne veux pas revivre ça. Ça fait deux ans que je perds en finale, et je ne voudrais pas encore partir sur une mauvaise note. »

Déjà qualifiés

Cette année, il y a une grosse différence avec les deux autres finales que Teasdale a disputées. Les rivaux des Huskies sont les Mooseheads d’Halifax, automatiquement qualifiés pour la Coupe Memorial car ce sont eux qui accueillent le tournoi cette année. Ainsi, même si Halifax gagne, Rouyn est assuré de participer à la Coupe Memorial.

Il y a toutefois une drôle de tendance statistique. Depuis 2006, c’est la sixième fois que l’équipe organisatrice de la Coupe Memorial se retrouve en finale de sa ligue, et donc que les deux finalistes sont assurés de disputer la Coupe Memorial. Quatre des cinq fois, l’équipe battue en finale de sa ligue a ensuite réussi un meilleur résultat.

Dernières finales avec l’équipe organisatrice de la Coupe Memorial

2015

Finale de la LHJMQ :

Rimouski bat Québec en sept parties.

Coupe Memorial :

Québec bat Rimouski au bris d’égalité, perd ensuite en demi-finale.

2011

Finale de la Ligue junior de l’Ontario (OHL) :

Owen Sound bat Mississauga en sept parties.

Coupe Memorial :

Mississauga perd en finale ; Owen Sound éliminé au bris d’égalité.

2008

Finale de l’OHL :

Kitchener bat Belleville en sept parties.

Coupe Memorial :

Kitchener bat Belleville en demi-finale, perd ensuite en finale.

2007

Finale de la Ligue junior de l’Ouest (WHL) :

Medicine Hat bat Vancouver en sept parties.

Coupe Memorial :

Vancouver bat Medicine Hat en finale.

2006

Finale de la LHJMQ :

Moncton bat Québec en six parties.

Coupe Memorial :

Québec bat Moncton en finale.

Mais pour Teasdale, ces tendances ne veulent pas dire grand-chose. « Oui, on est qualifiés, mais on veut rentrer par la grande porte, et pas simplement prendre l’accès facile. J’ai vraiment envie de gagner la Coupe du Président avant la Coupe Memorial », affirme l’athlète de 20 ans.

On cherche souvent à analyser, parfois à l’excès, quand, au fond, il suffit parfois de revenir à l’essence du sport : deux équipes qui se battent pour un enjeu et qui veulent gagner. La fierté de gagner…

Sur papier, les Huskies sont favoris pour l’emporter. Après une incroyable saison de seulement neuf défaites (59-8-1), ils ont gagné leurs deux dernières séries par balayage et sont au repos depuis le 24 avril. Les Mooseheads (49-15-4) ont fini au 1er rang de leur association, mais ont mis six matchs pour gagner leur demi-finale.

Saison satisfaisante

Quoi qu’il arrive pour la suite des choses, Teasdale aura connu une dernière saison satisfaisante sur le plan individuel.

En saison, il a établi des sommets personnels avec 43 buts, 37 mentions d’aide et 80 points en 66 matchs. Ce printemps, ses 26 points (11 buts et 15 mentions d’aide) lui valent le 2e rang de la LHJMQ, derrière Raphaël Lavoie, le prometteur attaquant des Mooseheads.

Ces statistiques ne changent toutefois pas ses perspectives d’avenir : il ne s’attend pas à devenir un attaquant dominant offensivement dans les rangs professionnels. « Ce n’est pas comme ça que je vais me démarquer rendu là. Je vais plus aider une équipe avec mon jeu dans les deux sens de la patinoire », explique-t-il.

Pour le jeune homme de Lavaltrie, ces succès sont le résultat d’une année qui avait commencé du bon pied. Ignoré à ses deux années de repêchage, Teasdale avait été invité au camp des recrues du Canadien en septembre dernier, où il en avait assez montré pour être invité au camp principal. C’est là, le 21 septembre, qu’il a signé son premier contrat professionnel, le liant au Tricolore pour les trois prochaines années.

« Je suis vraiment content, j’ai montré ce que je suis capable de faire. J’ai prouvé que je méritais le contrat. Ce contrat m’a vraiment servi de motivation. D’être enfin récompensé pour mes efforts, ça faisait du bien. »

« Ça m’a aussi enlevé un poids des épaules, car je savais que je n’avais pas à plaire aux équipes de la LNH, que je pouvais me concentrer sur ma saison. Quand tu es dans le junior et que t’as des chances de te rendre, tu y penses beaucoup. C’est normal, c’est le but de tous les joueurs. Donc oui, ça m’aurait peut-être trotté dans la tête si je n’avais pas eu de contrat. Mais quand tu travailles fort et que tu fais les bonnes choses, tu finis par être récompensé. »

L’avenir s’annonce intéressant pour Teasdale, qui devrait renouer avec son ancien entraîneur Joël Bouchard l’automne prochain. Reste à voir combien de bagues de championnat il aura en main à ce moment : zéro, une ou deux.

Premier match de la finale Mooseheads-Huskies, ce soir, 19 h, à Rouyn-Noranda

PHOTO DAVID CHAN, FOURNIE PAR LES MOOSEHEADS D’HALIFAX

Éric Veilleux, entraîneur-chef des Mooseheads d’Halifax

Le retour d’un habitué

Les Huskies de Rouyn-Noranda accueillent ce soir les Mooseheads d’Halifax dans le premier match de la finale de la Coupe du Président. De retour dans le junior après une parenthèse de quatre ans dans la Ligue américaine et l’ECHL, l’entraîneur-chef des Mooseheads, Éric Veilleux, a réussi le tour de force d’atteindre la finale de la LHJMQ pour la quatrième fois de sa courte carrière. Portrait.

Bob Hartley décrit Éric Veilleux comme son « deuxième fils ». Éric Veilleux parle de Bob Hartley comme d’un « mentor ».

On consulte leurs fiches HockeyDB et on comprend vite la relation qui unit les deux hommes. Deux ans à Hawkesbury, deux à Laval, trois à Cornwall, deux à Hershey. Quatre championnats en neuf ans, avec Hartley derrière le banc et Veilleux sur la patinoire.

« Je me souviens d’une Coupe Memorial, je l’ai vu manger un cross-check sur la gueule après deux minutes. Il est parti au vestiaire se faire coudre et il est revenu avec un genre de gros mouth-piece. C’était pas une piqûre de maringouin ! »

Vous aurez compris, par le langage coloré, que c’est Hartley qui parle ici, décrivant Veilleux. C’est avec une telle attitude que Veilleux a gagné le respect de Hartley, qui a tenté de l’amener avec lui partout où il travaillait, au point où les deux faisaient même du terrassement ensemble, en été.

Au terme de sa carrière de joueur, Veilleux s’est converti en entraîneur. En très bon entraîneur, devrait-on dire, puisqu’il disputera à compter de ce soir une quatrième finale de la LHJMQ. Et même si leurs chemins ne se sont pas officiellement croisés depuis que Veilleux est derrière un banc, l’influence de Hartley reste bien réelle.

« Quand tu coaches, tu rencontres des problèmes. Quand ça m’arrivait, Bob [Hartley] était celui que j’appelais pour obtenir des conseils, ou simplement pour valider ce que je pensais. » — Éric Veilleux

« En fait, la seule année où je ne lui ai pas demandé d’aide, c’est cette année, juste au cas où on affronterait Drummondville en séries [l’entraîneur-chef de Drummondville est Steve Hartley, fils de Bob]. On s’est parlé quelques fois, mais je ne lui ai jamais rien demandé pour mon équipe. Quand ça n’allait pas, je me disais : qu’est-ce que Bob me dirait ? Et j’avais ma réponse. »

Veilleux a bien fait d’être prudent, car les Mooseheads ont bel et bien rencontré les Voltigeurs de Drummondville et Steve Hartley en demi-finale. Halifax l’a emporté en six matchs.

Survivre à l’automne

Voici donc Veilleux à la tête des Mooseheads d’Halifax, en finale contre les Huskies. Une drôle de finale, parce que peu importe son issue, les deux équipes sont assurées d’aller à la Coupe Memorial. Les Mooseheads sont automatiquement qualifiés à titre d’équipe organisatrice.

Cela dit, c’est un autre tour de force qui s’ajoute à une liste déjà longue pour l’homme de 47 ans : gagnant de la Coupe Memorial en 2012, finaliste à la Coupe du Président en 2009 avec les Cataractes, finaliste deux années de suite à Baie-Comeau (2013 et 2014). « On s’est rendus au septième match en 2009. Septième match en 2014 aussi », récite-t-il presque machinalement. Ses trois présences en finale se sont soldées par des défaites. Sent-il que la Coupe du Président manque à son palmarès ?

« Je ne pense pas à ça pantoute. On a exactement la même approche que la série d’avant. On veut gagner la Coupe du Président. On a parlé de la Coupe Memorial la première journée de la saison et on n’en a pas parlé depuis. »

Veilleux a aussi l’habitude de l’adversité. La Coupe Memorial de 2012, les Cataractes y participaient à titre d’organisateurs. Éliminés au deuxième tour des séries de la LHJMQ, ils ont été inactifs pendant 31 jours avant de se lancer dans le tournoi. Cette fois-là aussi, Hartley lui avait prêté main-forte.

Cette saison, l’adversité est arrivée tôt dans la saison. Des rénovations au Centre Banque Scotia ont en effet forcé les Mooseheads à disputer leurs 15 premiers matchs de la saison sur la route. Leur fiche au terme de cette séquence : 12-3-0.

« Ces 15 matchs-là sur la route nous ont permis de nous connaître en tant qu’équipe, de savoir sur quoi travailler. Les gars ont compris que même si on avait une bonne fiche après 15 matchs, ce qui était un exploit, on avait de grosses choses à travailler défensivement. J’aime bien ce que je vois présentement. »

La suite ?

Il sera intéressant de voir quelle tangente prendra la carrière de Veilleux. Ses quatre années dans les rangs professionnels (un an comme adjoint, trois ans comme entraîneur-chef) se sont terminées hâtivement : chaque fois, son équipe a raté les séries. À sa défense, il s’est retrouvé mêlé à des changements d’affiliation de ses équipes. Par exemple, à sa dernière année dans la Ligue américaine, San Antonio était un club-école partagé, avec à la fois des espoirs des Blues de St. Louis et de l’Avalanche du Colorado.

« Le plus gros facteur pour un entraîneur, c’est le timing. Aucun gambler à Vegas gagne avec des 3 et des 5 de trèfle, a rappelé Hartley. Pour gagner, ça te prend des as, des dames et des rois. Tu dois tomber aux bonnes places, travailler fort et avoir le facteur chance. Que ce soit pour Éric, moi ou n’importe quel entraîneur, c’est ça, le coaching. »

C’est d’ailleurs pourquoi on sent une certaine retenue quand on demande à Veilleux s’il souhaite retourner chez les pros un jour.

« Oui, c’est sûr et certain. Mais si ça arrive, ce sera avec des gens que je crois qui vont m’amener quelque chose, avec le bon monde, au bon endroit. J’ai vu ce que c’était. Coacher pro, c’est correct, mais c’est important d’être dans une organisation où ton style cadre avec leur façon de penser. Je ne retournerai pas chez les pros simplement pour être chez les pros. »

Benoît-Olivier Groulx

Les Mooseheads ont salué le retour au jeu d’un membre crucial de leur formation au troisième tour, quand Benoît-Olivier Groulx, deuxième compteur de l’équipe en saison, est revenu à la compétition. L’attaquant était absent depuis le début des séries en raison d’une mononucléose. En quatre matchs depuis son retour, il a obtenu quatre mentions d’aide. « C’était un de mes hommes de confiance tout au long de la saison, en avantage numérique, en désavantage, sur les mises en jeu et par sa présence physique, décrit Veilleux. En son absence, d’autres joueurs ont élevé leur niveau de jeu, comme Keith Getson. Donc ça a permis de voir autre chose. Mais après avoir manqué cinq semaines, c’est tout un exploit qu’il revienne dans le troisième match d’une demi-finale. »