Xavier Ouellet est lucide. Il sait exactement à quel moment les choses ont changé pour lui cette saison.

«Après la première fois que j'ai été laissé de côté... Ma constance n'était plus la même quand je suis revenu. L'équipe aussi allait un peu moins bien. Mais ça ne donne rien de chercher les raisons, c'est arrivé, je suis avec le Rocket, je vais amener toute mon énergie ici.»

C'était le 10 novembre contre les Golden Knights de Vegas. Pour la première fois de la saison, Ouellet devenait spectateur, après certainement une quinzaine de bons matchs. Deux jours plus tôt, le Canadien avait accordé six buts aux Sabres. Ouellet s'était fait piéger en zone offensive sur le premier, il avait été incapable d'annuler un jeu sur le deuxième.

Il venait d'entrer lui aussi dans la fameuse rotation de Claude Julien, comme les Noah Juulsen, Victor Mete, Mike Reilly. À la différence que lorsqu'il est retourné dans la formation, il avait perdu sa confiance. Les passes étaient imprécises, le positionnement était déficient.

Il a joué un dernier match horrible le 21 novembre contre les Devils, avant d'être laissé de côté sept fois, puis finalement ignoré au ballottage le week-end dernier. Il a vu venir le coup, ça lui trottait dans la tête depuis un moment déjà, il savait aussi qu'il y avait un joueur en trop avec le retour de Juulsen.

N'empêche, quand on lui a annoncé qu'il s'en allait à Laval, il a encaissé le choc. Il a vécu de la frustration au début, il la cache mal encore aujourd'hui. Il a dormi là-dessus, s'est dit qu'il devait passer à autre chose. De toute façon, il n'avait pas le choix.

Ouellet y a pensé, à ce ballottage où il aurait pu devenir une prise intéressante pour une autre équipe. Aurait-il aimé être réclamé? «Ça ne donne rien de penser à ça», lance-t-il, sagement.

Il jure toutefois que cette situation ne l'a pas replongé dans ses mauvais souvenirs des Red Wings. Il a eu besoin de 15 rappels du grand club, étalés sur trois saisons, avant de finalement s'établir à Detroit. Et d'être constamment laissé de côté par son ancien entraîneur Jeff Blashill... Trente-sept fois au total la saison dernière. Son contrat a été racheté cet été pour clore ce chapitre de sa carrière.

«Ce n'est pas pareil. J'ai joué du bon hockey avec le Canadien, j'ai joué de bonnes minutes. Les 16 premiers matchs, je jouais des 18 minutes par match. J'ai fait un bon travail pendant que j'étais là. J'étais respecté par les joueurs, par les entraîneurs, par l'organisation en général.»

Bouchard sur son cas

Maintenant avec le Rocket, Ouellet entre dans une relation qu'il juge donnant-donnant avec l'entraîneur Joël Bouchard. Le défenseur explique: il a besoin de Bouchard pour s'améliorer, et Bouchard a besoin de lui pour gagner des matchs. Le Rocket présente le pire dossier de la Ligue américaine, les buts ne viennent pas et l'avantage numérique est anémique. Ouellet veut apporter sa contribution.

«On a vu ce qui s'est passé les dernières années avec Xavier, a expliqué Bouchard. Pour avoir un résultat différent, il faut faire quelque chose de différent. Entrer et sortir de la formation, à Montréal, à Detroit, ça n'a pas sorti le meilleur de lui. Alors on fait quoi? Il a du potentiel. C'est un guerrier, c'est un travaillant, c'est un joueur de caractère. Il a eu de bons matchs. 

«Subitement, il ne sait plus jouer? Quand je dis qu'il n'est pas assez bon, ça ne veut pas dire qu'il n'est pas bon. On doit créer le Xavier Ouellet 2.0. Sinon, il va lui arriver la même histoire. Notre job, quand l'appel va arriver, c'est qu'il soit prêt. Qu'il soit en forme, en santé, fort mentalement.»

Joël Bouchard connaît bien Xavier Ouellet pour avoir été son entraîneur chez le défunt Junior de Montréal, puis chez l'Armada de Blainville-Boisbriand. Ouellet a même été son capitaine chez l'Armada.

Bouchard croit que Ouellet a peut-être même accepté de se joindre au Canadien à l'été justement pour se faire pousser dans le dos si besoin était. Et c'est exactement ce dont il a besoin en ce moment. D'ailleurs, Bouchard a eu besoin de 30 secondes au maximum avant de confirmer qu'il serait «tough» avec son nouveau joueur.

«Quand tu es cinquième, sixième, septième défenseur, tu sors de la formation, mais ça ne veut pas dire que tu es horrible. Des fois, c'est pour faire jouer d'autres gars, changer la dynamique, changer les confrontations. Je l'ai vécu. 

«En début de carrière, ça m'a affecté. Ton ego en prend un coup. Des fois tu penses que tu devrais jouer, mais si tu laisses ça te déranger, c'est normal que tu aies une contre-performance. Tu deviens inquiet. À un jeune âge, ce n'est pas évident à gérer. 

«Dans le cas de Xavier, c'est la même chose. C'est juste de le gérer, ça vient avec la maturité. On en a parlé. Il l'a admis lui-même. Si pour une raison ou une autre tu es laissé de côté, quand tu reviens, tu dois être à point dans ta tête et dans ton jeu. Tu dois tordre le bras à la direction du Canadien. C'est le plan.»

Photo David Boily, La Presse

Xavier Ouellet