Une écrasante majorité d'experts s'attend à ce que le Canadien soit en vacances dès le 6 avril. Derrière le monstre à trois têtes de la division Atlantique (Tampa Bay, Toronto, Boston), la lutte sera féroce. Le CH sera privé de Shea Weber pour les premiers mois de la saison et l'équipe subit une cure de rajeunissement.

Le Tricolore de 2018-2019 risque donc de vivre ce qui n'est à peu près jamais arrivé dans son histoire: rater les séries éliminatoires deux années de suite. La dernière fois, c'était au tournant du millénaire (trois saisons de suite, de 1998 à 2001).

Avant cela? De 1919 à 1922, une léthargie sans doute éclipsée par la passation des pouvoirs de premier ministre de Lomer Gouin à Louis-Alexandre Taschereau.

Autrement dit, le propriétaire du CH, Geoff Molson, est confronté à une situation qui lui est inconnue. Et il ne s'en est pas caché: le défi sera grand s'il souhaite maintenir l'engouement des partisans.

«Les abonnements, ça va [they're fine], a affirmé le propriétaire, hier, au tournoi de golf du CH. Quand tu connais une moins bonne saison, certains partisans sont moins intéressés, mais ça donne la chance à d'autres partisans d'obtenir des billets. Il n'y a aucun doute que nous avons du travail à faire, et on doit commencer à gagner.»

Une «séquence» en danger

Le Tricolore aura donc fort à faire pour préserver son habituel taux de renouvellement d'abonnements, qui se situe bon an, mal an au-delà de 95%. Les abonnés qui retirent leurs billes font en sorte que la fameuse file d'attente diminue, et il pourrait éventuellement ne plus y avoir de file.

«Ça diminue un peu chaque année, [...] on se maintient avec quelques milliers de personnes», a dit France Margaret Bélanger, vice-présidente exécutive, affaires commerciales et corporatives, dans un entretien récent avec La Presse.

Évidemment, la vente de billets individuels en ressent aussi les contrecoups. À l'heure actuelle, sur le site officiel de l'équipe, on affiche complet pour un seul match: le deuxième de l'année au Centre Bell, le 13 octobre, contre Pittsburgh. Pour le match inaugural, deux jours plus tôt contre Los Angeles, quelques centaines de billets demeurent disponibles. Hier après-midi, La Presse a fait une requête pour quatre billets collés; il y en avait dans 19 sections.

«Le marché a changé. Avant l'arrivée du marché de revente, tout le monde devait s'assurer d'avoir ses billets en septembre. Maintenant, les gens peuvent attendre et acheter leurs billets au dernier moment», a souligné M. Molson.

La saison dernière, malgré les sièges vides par centaines certains soirs, le Canadien continuait à annoncer, soir après soir, des salles combles de 21 302 spectateurs. Notons cependant que l'équipe a cessé de documenter dans ses notes de presse la séquence de matchs de suite à guichets fermés qui remonterait, selon le CH, à janvier 2004.

«Nous ne faisons pas une course au sell-out. Nous sommes privilégiés, ça fait longtemps [que le Canadien joue à guichets fermés], un jour on ne le sera peut-être pas et on va le dire», affirme Mme Bélanger.

Paul Wilson, nouveau vice-président principal, affaires publiques et communications, a quant à lui précisé à La Presse que le CH révise actuellement les barèmes de ce que constitue un match à guichets fermés, «car nous voulons être plus précis et transparents dans notre façon de l'annoncer dans le futur», a-t-il affirmé.

Un mauvais passage



Aucun doute: la transaction d'hier qui a envoyé Max Pacioretty à Las Vegas a été accueillie avec un relatif enthousiasme par les partisans de l'équipe, du moins si l'on se fie aux réactions sur les réseaux sociaux. Marc Bergevin a en effet réussi à soutirer un retour plus intéressant qu'anticipé, dans des circonstances difficiles.

Il ne faut toutefois pas perdre de vue que le Canadien ressort de cet épisode avec quelques égratignures de plus. Que ce soit sur le plan sportif ou commercial, les coups commencent à pleuvoir de partout.

-  L'équipe jure dur comme fer que c'est Max Pacioretty qui a demandé à être échangé, et ce, même si le joueur et son agent, Allan Walsh, ont continuellement affirmé le contraire au cours des derniers mois. Si l'on donne le bénéfice du doute à l'équipe, c'est donc dire que le capitaine, qui était traité comme l'attaquant numéro un du groupe, qui était constamment l'avant le plus utilisé, souhaitait changer d'environnement.

-  Il y a deux mois, Marc Bergevin a admis que John Tavares et Paul Stastny, deux joueurs autonomes qu'il convoitait, n'avaient pas démontré d'intérêt à venir jouer à Montréal, à un point tel qu'il n'avait pas même pu déposer une offre.

- Il y a maintenant les billets qui s'annoncent difficiles à écouler, si on se fie aux campagnes publicitaires plus énergiques que par le passé. Parlant de billets, il y a un an, une controverse avait éclaté quand le Tricolore avait décidé d'imposer des frais supplémentaires à ses détenteurs d'abonnements qui souhaitaient que leurs billets soient imprimés (l'équipe a annulé cette mesure cette saison).

-  C'est sans oublier le dépôt cet été d'une demande d'autorisation d'exercer une action collective par une ancienne employée du Canadien, qui accuse l'organisation de ne pas payer les heures supplémentaires, le temps de pause et le temps de déplacement.

Bref, l'image du Canadien a souffert ces derniers mois. Mais pour Geoff Molson, la solution pour raviver la flamme est bien simple.

«La meilleure chose que l'on puisse faire, c'est de donner l'espoir à nos partisans que l'on va gagner et avec ça, le soutien et l'enthousiasme vont suivre», a dit le propriétaire.

- Avec Vincent Brousseau-Pouliot, La Presse