Le Canadien a-t-il décidé de se décoincer un peu sur les réseaux sociaux?

Ceux qui ont suivi avec assiduité le compte twitter du Canadien lors de la soirée de la loterie pour le premier choix au prochain repêchage de la LNH en ont eu un signe annonciateur.

On y a vu des GIF animés et autres références humoristiques à la culture populaire. Bref, un nouveau ton qui s'est poursuivi dans les jours suivants. Les références plus légères, voire audacieuses, s'intercalaient entre les divers concours, réclames publicitaires et communiqués officiels qui constituaient jusque-là en grande partie le fil Twitter de l'équipe.

Hier, la stratégie s'est retournée contre le Canadien. Un article de The Independant soulignant le danger pour la santé de «lécher les balles de golf» a été associé à Brad Marchand, qui a fait des coups de langue sa marque de commerce en séries éliminatoires.

La réplique de la peste des Bruins a été cinglante, et a peut-être déplu à la direction de l'équipe: «C'est drôle, ce genre de commentaires provenant d'une équipe exclue de la course aux séries depuis octobre.»

«Il y a une différence entre audacieux et baveux, quand ton équipe ne livre pas, a expliqué un spécialiste du marketing sportif consulté par La Presse qui a préféré garder l'anonymat.

«À ce que je sache, le Canadien n'a pas gagné un match contre les Bruins cette année. À ce que je sache, le Canadien est exclu des séries depuis un mois et demi. Ce n'est pas ce qui va te donner du crédit aux yeux du public. Une équipe ne peut pas lancer une telle pointe au moment où elle joue au golf.»

Ce spécialiste refuse toutefois d'y voir plus qu'un faux pas. «Une gaffe, pas plus grave que ça», insiste-t-il. Il reconnaît d'ailleurs l'importance pour le Canadien de se moderniser et d'ajuster sa stratégie. «Être moins conservateur et plus audacieux dans son approche», résume-t-il.

Pour Jean-Jacques Stréliski, professeur associé à HEC Montréal, le langage des médias sociaux invite naturellement à plus de légèreté. Il croit également qu'il y a plus à gagner qu'à perdre à adopter ce ton irrévérencieux.

«Au niveau du capital sympathie, il y a beaucoup, sans doute, à gagner. Il y a intérêt à désamorcer certains faits. Surtout qu'à Montréal, les fans sont plus fans qu'ailleurs. Ça tient à la grandeur de la marque, malgré 25 ans sans résultats. Le Canadien arrive à garder sa cote d'amour. Il faut profiter de cette relation d'amour entre le Canadien et ses fans et tout faire pour ne pas l'étioler.»

L'enjeu du bon ton

Le Canadien a lui-même admis s'être fait remettre à sa place au courant de l'après-midi. C'était nécessaire, dans les circonstances.

«On se rattrape sur nos mentions Twitter en revenant du lunch. Est-ce que "des coordonnateurs médias sociaux lisent des tweets méchants" a déjà été fait?»

Une référence bien sûr à la lecture de « mean tweets » devenue très populaire dans les émissions de fin de soirée américaines.

Une réplique qui illustre bien les aléas d'une communication de ce genre. En revanche, impossible de ne pas voir dans cet échange sur les réseaux sociaux ce qui pourrait être les premiers pas d'une révision de la stratégie marketing du Canadien.

Pour l'instant, l'équipe ne confirme pas de nouvelle tendance. Mais elle s'inscrirait parfaitement dans le propos du propriétaire Geoff Molson, à son bilan annuel, qui avait promis de revoir les communications de l'équipe.

D'autant plus qu'elle est dans l'air du temps, notamment avec les Golden Knights de Vegas, qui ajoutent un peu de vitriol à plusieurs de leurs interactions. Leurs prises de bec virtuelles avec les Kings de Los Angeles, notamment, ont fait le bonheur des amateurs de hockey. Les Blue Jackets de Columbus sont aussi passés maîtres dans l'art du tweet.

Pour M. Strélisky, l'important, d'abord et avant tout, est de savoir répondre dans le bon ton.

«C'est de la gestion fine qu'on demande aux gens du marketing, et il y a certainement des gens très brillants qui savent bien faire ça [chez le Canadien]. Les médias sociaux sont un enjeu avec lequel il faut composer et ça prend des gens qui ont ces compétences-là. C'est aussi la façon de rejoindre un public plus jeune, mais pour le faire, il faut avoir au sein de son équipe des gens plus jeunes qui ont la maîtrise de ces langages-là.»

Bref, tout est une question de dosage, selon le professeur de HEC. «Et ce qui aide au dosage, ce sont les résultats sur la patinoire.» Ça aurait certainement empêché Brad Marchand de frapper un circuit hier. Quand même, le compte Twitter du Canadien a désormais un peu plus notre attention.

Image tirée de Twitter

Un message... et sa réplique.