Le piètre début de saison du Canadien de Montréal, combiné aux difficultés rencontrées par les autres équipes sportives de la métropole, n'affecte pas seulement l'humeur des amateurs de sports ; les accumulations de défaites ont mis peu de temps à se faire sentir chez les commerçants qui profitent généralement de l'engouement du public pour le Tricolore.

« Les partisans, ils ne viennent pas acheter des articles, c'est ça qui arrive », a déclaré Khalid Skour, le propriétaire de Sports Crescent, au centre-ville de Montréal.

Le commerçant souligne que parfois, lorsqu'une équipe va mal, une autre vient contrebalancer. Mais aucune des équipes montréalaises n'a gâté les amateurs de sports de la métropole cette année, les Alouettes ayant connu une saison désastreuse et l'Impact n'ayant pas réussi à se tailler une place en séries.

De son côté, le Canadien n'a cumulé que deux victoires et huit défaites depuis le début de la saison régulière.

« Comme les trois ne vont pas bien, c'est un peu une catastrophe, surtout au début de la saison de hockey », a-t-il dit.

Martin Blanchette, détenteur d'abonnements de saison depuis plusieurs années, confirme de son côté que lorsque le Canadien va mal, il est plus difficile de revendre des billets pour les matchs auxquels il ne peut pas assister.

« Je me suis souvent ramassé avec des billets que personne ne voulait et que j'ai échangés contre une caisse de sirop d'érable alors que ça valait 400 $ la paire », confie-t-il.

Le partisan a toutefois appris sa leçon et a adopté une stratégie différente cette année, en vendant dès le début de la saison les billets pour les matchs auxquels il savait qu'il n'assisterait pas. « Que le Canadien aille bien ou pas, cette année, ça ne m'affecte pas, les billets sont vendus, comparativement aux années passées où je n'avais pas ce réflexe-là et j'attendais. »

Pour Glen Hodgson, économiste du Conference Board du Canada, il est clair que les insuccès de l'équipe ont un effet sur plus d'une entreprise, des taxis aux stationnements en passant par les lieux où les partisans se rendent à l'avant-match ou à l'après-match.

« Clairement, chaque fois qu'une entreprise est en difficulté, toutes celles dans sa chaîne d'approvisionnement en subissent les impacts », énonce-t-il.

Pas d'impact sur la marque du CH

Une mauvaise saison de la part du Canadien ne sera toutefois pas suffisante pour que la « marque Canadien » elle-même subisse de véritables dommages.

Bruno Delorme, professeur de marketing à Concordia, McGill et au collège Marianapolis à Montréal, souligne que le Tricolore est la seule équipe des grandes ligues - LNH, MLB, NFL et NBA - dans la métropole, et même au Québec, de sorte qu'elle bénéficie, d'une certaine façon, d'un monopole dans la province.

Le Canadien n'a donc pas à craindre de voir sa marque ternie par son mauvais début de saison, estime-t-il.

« Une marque prend des années à construire, et le Canadien existe depuis 100 ans. [La marque] ne sera pas détruite avec une seule mauvaise saison. [...] Il n'y a pas d'autres options pour les fous du sport à Montréal. Où iraient-ils chercher leur dose de sports? »

Le malheur des uns, le bonheur des autres

Et comme toute médaille a son revers, il peut y avoir un bon côté à la lassitude que peuvent ressentir les partisans du Canadien envers leur équipe favorite.

Martin Blanchette souligne que les détenteurs d'abonnements de saison ont la possibilité de remettre les billets des matchs auxquels ils ne peuvent - ou ne veulent - plus assister à la Fondation du Canadien de Montréal pour l'enfance, permettant ainsi à des gens qui n'auraient pas la chance d'aller au Centre Bell de voir un match.

La Fondation n'a pu préciser si elle reçoit davantage de dons de billets lorsque le Canadien connaît un creux, mais une chose est certaine, « c'est un programme qui fait bien des heureux », a indiqué sa porte-parole.

Khalid Skour de Sports Crescent espère de son côté que le Canadien fera lui aussi des heureux, surtout à l'approche du temps des Fêtes.

« Nous espérons que le Canadien de Montréal fera beaucoup mieux que ce qu'il a fait jusqu'à maintenant. »