C'était en octobre 2014. Quelques mois plus tôt, Joel Hanley avait obtenu son diplôme en psychologie à l'Université du Massachusetts à Amherst. Une belle carrière l'attendait s'il laissait tomber le hockey.

Mais voilà qu'il venait d'être retranché par les Pirates de Portland, dans la Ligue américaine, et qu'il devait conduire jusqu'en Géorgie pour y rejoindre les Gladiators de Gwinnett, dans l'ECHL. Selon Google Maps, il s'agit d'un trajet de 18 h, long de 1861 km, qui permet de voir les lumières scintillantes de Worcester, la magique ville de Hartford, le bucolique New Jersey Turnpike, avant de traverser la Virginie et la Caroline-du-Nord.

Hanley raconte ce périple au représentant de La Presse quand son voisin de casier, Mike Condon, se joint à la conversation. « Ça devait être un beau voyage ! », ironise le gardien.

« Je me suis arrêté pour regarder un match de football à Washington et dormir, et j'ai fait le reste de la route le lendemain. C'était un moment difficile, mais tu as le temps de réfléchir, de penser à ce que tu veux faire. »

« Ç'aurait été facile de ne pas essayer, mais j'ai continué à travailler et à tout donner. C'était peut-être un tournant », confie Hanley.

Tournant ou pas, Hanley a repensé à ce moment dimanche dernier, quand il a foulé la patinoire du Centre Bell pour son tout premier match dans la Ligue nationale. C'était l'aboutissement d'un long parcours pour un joueur jamais repêché, qui a joué son hockey universitaire à UMass Amherst, un établissement qui n'avait produit qu'une dizaine de joueurs de la LNH dans son histoire avant le début de la saison (1).

« Oui, ça m'est venu à l'esprit. Il y avait beaucoup d'émotion, évidemment. Mais c'était assez cool de repenser à ça. »

DES HAUTS ET DES BAS

Quand le Canadien a annoncé le rappel d'urgence de Hanley la semaine dernière, bien des curieux ont accouru vers le site HockeyDB pour en connaître plus sur lui. Même Michel Therrien a admis ne pas se souvenir énormément du numéro 71 au dernier camp. « On savait très bien où il s'en allait », a répondu poliment l'entraîneur-chef du CH.

Vendredi, Hanley était le joueur le plus sollicité dans le vestiaire, à l'issue d'un entraînement auquel seulement 12 joueurs ont participé.

« Je ne suis pas habitué à ce genre d'attention. Je n'ai jamais été très bon pour récolter des points. Mais tout le monde aime les points, les médias aiment les joueurs qui obtiennent des points. Je vais simplement savourer le moment ! »

Le collègue Arpon Basu, de LNH.com, a fait fureur sur Twitter, vendredi, en publiant une photo des meneurs de la Ligue nationale pour la moyenne de points par match. Devant Patrick Kane, Jamie Benn et Connor McDavid, se retrouvait le nom de Joel Hanley.

C'est là une autre anomalie parmi tant d'autres dans une saison étrange du Canadien. Mais Hanley est le premier à rappeler qu'il ne faut pas trop prendre au sérieux ses quatre points en trois matchs. Après tout, il ne comptait que 13 points en 61 matchs cette saison à St. John's, et au collège, sa meilleure saison offensive lui a valu 25 points en 36 rencontres.

« J'aime empêcher l'autre équipe de marquer, c'est mon objectif principal en tant que défenseur. Et quand tu peux contribuer à l'attaque, c'est positif », résume-t-il, simplement.

Cela dit, le séjour de Hanley à Montréal jusqu'ici a aussi été marqué par cette présence en deuxième période, jeudi, au cours de laquelle les Red Wings ont inscrit deux buts en 12 secondes.

En temps normal, ce genre de présence aurait pu valoir au joueur en question une utilisation plus parcimonieuse dans le reste du match. Mais Hanley n'a pas sauté de tour, et a préparé deux buts du Tricolore en troisième période.

« Nous avons quatre défenseurs qui n'ont pas beaucoup d'expérience dans la LNH, a reconnu Therrien. Ça peut être difficile par moments, surtout quand il y a de la pression, mais nous n'avons pas le choix de les utiliser. Je veux voir comment ils vont réagir. Quand tu as un seul défenseur recrue, tu peux le cacher pas mal plus. Quand tu en as quatre sur six, c'est différent. »

Comme aucun des cinq défenseurs blessés n'est en voie de revenir au jeu, l'audition de Hanley se poursuivra samedi soir, à l'occasion de la visite des Rangers de New York au Centre Bell.

Ce sera un autre de ces duels au cours desquels le Canadien poursuivra ses expériences - par exemple, Michael McCarron sera de retour au centre, après un essai infructueux à l'aile, jeudi. Ces tests seront faits contre des Rangers en bonne position pour participer aux séries, mais qui souhaitent s'assurer l'avantage de la patinoire au premier tour.

Hanley, lui, aura une occasion de plus de prouver qu'il mérite un contrat avec l'organisation pour la saison prochaine. Évidemment, sa place en octobre prochain devrait être à St. John's plutôt qu'à Montréal, mais il ne nuira certainement pas à sa cause s'il prouve qu'il peut être fiable défensivement au niveau de la LNH.

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(1) Source : HockeyDB.com