Il suffit de parcourir les notes de presse pour voir à quel point Andrei Markov a marqué le Tricolore. Il est le troisième pointeur parmi les défenseurs de l'équipe. Sa prochaine mention d'aide lui permettra de rejoindre Guy Lapointe au 10e rang des passeurs dans l'histoire de l'équipe. Et en dépit de ses sérieuses opérations au genou, il doublera Patrice Brisebois, dans les prochaines semaines, au 11e rang pour le nombre de matchs disputés avec le Tricolore.

Mais ces jours-ci, ce sont les 37 ans de Markov que les amateurs voient.

Les revirements coûteux sont nombreux depuis quelques matchs. Celui dont il s'est rendu coupable, mardi soir, sur le premier but des Bruins de Boston, a fait mal à son équipe; une fois de plus, le Tricolore était en effet forcé de pratiquer du hockey de rattrapage.

Sa soirée difficile ne s'est pas limitée à cela. Il y a aussi eu cet avantage numérique pénible, en deuxième période, au cours duquel deux mauvais contrôles de rondelle à la ligne bleue ont forcé tout le monde à quitter la zone des Bruins. Et n'eût été l'intervention de Brendan Gallagher, Markov aurait aussi été responsable d'un dégagement refusé!

Dans le milieu des dépisteurs professionnels, personne n'est dupe. Markov a ralenti, et ses jours de défenseur de premier duo sont terminés.

«Un joueur devient "exposé" en raison de son âge, surtout quand vient le temps de jouer contre des joueurs de premier plan», a indiqué un recruteur consulté par La Presse

«Si le Canadien avait le luxe de pouvoir le placer sur un deuxième ou un troisième duo, il jouerait beaucoup mieux. Il y a des soirées qui sont difficiles parce qu'il ne suit plus. L'âge est un facteur important, mais ses blessures au genou aussi.»

Jusqu'ici cette saison, Markov a passé 75% de son temps à forces égales aux côtés de P.K. Subban. S'il fut une époque où le jeu assuré du vétéran russe profitait à Subban, c'est aujourd'hui l'inverse.

Selon le site Puckalytics, qui comptabilise le rendement de chaque joueur avec ses coéquipiers (le WOWY, «With You Without You»), Markov affiche un différentiel de tentatives de lancer de 53,2% lorsqu'il joue avec Subban. Lorsque ce dernier n'est pas sur la glace, son différentiel Corsi chute à 48,2%.

En comparaison, lorsque Subban joue sans Markov, son Corsi grimpe à 56,3%. D'une certaine manière, Subban en est venu à traîner Markov.

«On est rendu là»

Un autre éclaireur qui a souvent eu la chance d'observer Markov au fil des ans estime qu'il n'est pas au bout du rouleau - même si, de son propre aveu, il a moins épié le Canadien récemment.

«Je crois plutôt qu'il est fatigué mentalement, et c'est toujours plus difficile quand l'équipe traverse une tempête, explique ce second intervenant. Markov doit jouer moins, mais c'est un cercle vicieux, car il a un caractère boudeur: moins il est utilisé, plus il boude, et il devient alors impatient et son jeu se détériore.»

S'il y a une forme de fatigue, qu'elle soit physique ou psychologique, Markov sera le premier à profiter de la pause du match des Étoiles la semaine prochaine. Mais ce sera bien temporaire: à plus long terme, les options pour remplacer ses minutes d'utilisation sont limitées.

Le plus facile, question de l'économiser, serait de lui enlever du temps en avantage numérique. Or, non seulement ce sont des minutes beaucoup moins exigeantes qu'à égalité numérique, mais Markov continue d'être assez productif avec l'avantage d'un homme. 

Cette année encore, Andrei Markov est premier chez les défenseurs du CH en ce qui a trait au nombre de buts marqués par tranches de 60 minutes lorsqu'il est sur la patinoire (7,88).

Mais c'est là une bien mince consolation compte tenu des rigueurs du jeu à cinq contre cinq.

«Le gars essaie du mieux qu'il le peut, mais il n'est plus capable de tenir le rythme», ajoute le premier éclaireur, qui assure d'ailleurs que les autres entraîneurs-chefs prennent soin de faire remarquer les carences de Markov à leurs joueurs et les invitent à exploiter son manque de mobilité.

«Les coachs de la LNH sont des gars brillants, c'est sûr qu'ils mettent ça dans leur plan de match. Ils vont demander à leurs joueurs d'envoyer la rondelle dans le coin de la patinoire et d'essayer de le déborder par l'extérieur. On en est rendu là avec Markov.»