La Ligue de hockey junior majeur du Québec n'a jamais eu la réputation d'être une pépinière de défenseurs pour la Ligue nationale. Lors des 15 derniers repêchages, seulement 13 arrières se sont trouvé des postes dans la LNH.

Toutefois, les chances sont bonnes qu'on assiste cette semaine à une première dans l'histoire du circuit Courteau et que l'on voie trois défenseurs de la LHJMQ être repêchés en première ronde. Huit fois a-t-on vu deux défenseurs de la LHJMQ être choisis au premier tour, mais jamais trois.

Cette année, Jérémy Roy, Thomas Chabot et Jakub Zboril sont tous perçus comme d'excellents candidats pour être réclamés parmi les 30 premiers.

S'agit-il d'une simple anomalie ou bien du début d'une tendance?

Selon Paul Boutilier, qui a veillé sur Chabot et Zboril à titre de responsable du développement des défenseurs chez les Sea Dogs de Saint John cette saison, la façon dont se joue le hockey au niveau de la LNH est appelée à favoriser de plus en plus le style qu'on voit traditionnellement dans la LHJMQ.

«À mesure que le jeu s'accélère, on constate que les défenseurs sont les seuls joueurs qui ont encore temps et espace à leur disposition», souligne l'ancien défenseur des Castors de Sherbrooke (puis des Islanders de New York), qui fut lui-même repêché au premier tour en 1981.

«Tout le monde se défend en inondant les alentours du filet, de sorte que ceux qui ont le plus de chances de faire un jeu, ce sont les défenseurs. S'ils ne peuvent pas pratiquer ce genre de jeu-là, leur équipe en sera pénalisée. Ce n'est plus comme autrefois quand plusieurs défenseurs dans chaque équipe n'avaient pas à se soucier d'aller travailler en zone adverse.»

Cette idée rejoint celle exprimée récemment à La Presse par Bob Hartley, l'entraîneur-chef des Flames de Calgary, qui expliquait pourquoi ses défenseurs s'impliquent autant à l'attaque.

«Marquer des buts n'a jamais été aussi difficile, disait Hartley. Il y a cinq gars sur la glace; si tu ne donnes le feu vert qu'à trois d'entre eux, tu en as deux qui seront plus ou moins impliqués.»

Neuf défenseurs répertoriés

Le Québec n'a peut-être pas généré son lot de défenseurs intimidants et dominants en défense au fil des ans. Mais à une époque où la relance de l'attaque est aussi valorisée, on en est peut-être venu à considérer les arrières de la LHJMQ autrement.

«Ça avait été une année difficile l'an dernier en termes de sélections, mais là, qu'on ait la chance de voir trois défenseurs de la LHJMQ repêchés en première ronde est assez spécial, surtout dans une ligue qui est reconnue comme une ligue offensive», fait valoir le commissaire Gilles Courteau.

«Mais je n'ai pas de problème avec l'identité offensive de notre ligue. Je crois qu'avec la nouvelle tangente que prend la LNH, il y aura toujours une bonne place pour les joueurs ayant des habiletés. On dit que la LHJMQ développe de petits joueurs, mais quand on regarde le travail qu'a fait Tyler Johnson en séries éliminatoires, c'est extraordinaire et ça va en faire réfléchir plusieurs.»

Au-delà des trois espoirs les plus susceptibles d'être choisis au premier tour, c'est la quantité de défenseurs répertoriés par la Centrale de recrutement qui suscite l'étonnement.

«Je suis surpris par le nombre de défenseurs qui sont classés par la Centrale, il y en a 9 parmi les 100 premiers patineurs», relève un recruteur d'une équipe de l'Ouest.

Il y a bien sûr Zboril, Chabot et Roy qui ont des chances de passer un beau vendredi, mais les défenseurs Guillaume Brisebois et Nicolas Meloche risquent de ne pas attendre trop longtemps, samedi, avant d'être repêchés.

«Brisebois était perçu comme un choix de première ronde potentiel avant cette année, mais il n'a pas eu la saison à laquelle on s'attendait, explique un dépisteur. Il faut dire qu'il était toujours sur la glace avec un mauvais club; il faut en tenir compte. Peut-être que s'il avait joué pour Sherbrooke ou pour Shawinigan, son développement aurait été plus rapide...»

Quant à Meloche, c'est un défenseur complet - à la fois offensif, défensif et robuste - dont la saison a été quelque peu minée par une blessure à une main qui l'a forcé à rater 24 matchs et à subir une opération.