Si Daniel Brière a joué son dernier match dans la Ligue nationale le 11 avril dernier, il en gardera un souvenir impérissable.

L'Avalanche du Colorado l'a emporté 3-2 grâce à un but de Jarome Iginla à 34 secondes de la fin de la troisième période. Après la rencontre, les joueurs remettaient leur chandail de match à quelques partisans chanceux.

Brière a donné le sien, mais un peu à regret, ignorant encore s'il s'agissait de son dernier tour de piste. Quelques jours plus tard, il est entré en contact avec le partisan en question. Brière a repris son chandail de match, en échange d'un autre de ses chandails et de celui du joueur préféré dudit partisan. Cody McLeod, pour ceux qui tenaient à savoir.

Bref, tout a bien fini pour Brière, mais surtout, tout avait bien commencé ce soir-là.

Le numéro 48 a été annoncé dans la formation partante, un privilège qu'il n'avait pas obtenu depuis décembre. Aux côtés d'Iginla et de Matt Duchene, qui n'étaient pourtant pas ses partenaires de trio.

«Patrick Roy a démontré beaucoup de classe, a confié Brière à La Presse, vendredi matin. Je jouais au sein du quatrième trio et normalement, ce trio-là ne commence pas trop de matchs! Mais il m'a donné la chance d'être partant pour ce qui était peut-être mon dernier match. Pendant le match aussi, il m'a donné quelques présences avec Duchene et Iginla, il m'a employé quand c'était l'égalité en troisième, il m'a donné des chances. C'était vraiment très apprécié.»

«J'ai été égoïste»

Brière nous parlait depuis Philadelphie, sa terre d'adoption depuis son passage chez les Flyers. C'est là que ses trois garçons, âgés de 14, 15 et 16 ans, fréquentent l'école et jouent au hockey. Et c'est là que Brière habitait à l'année jusqu'à l'été 2013, quand les Flyers ont racheté son contrat et qu'il s'est retrouvé avec le Canadien.

L'éloignement a pesé lourd ces deux dernières saisons, et c'est notamment pour cette raison que Daniel Brière ne sait pas, aujourd'hui, à 37 ans, si on le reverra un jour sur une patinoire de la LNH.

«La grosse affaire, c'est de penser à ma famille, explique-t-il. Je viens de manquer deux saisons de leur hockey, deux années d'école où je n'étais pas là pour les aider. À un moment donné, tu dois prendre un pas de recul et analyser le tout. Je ne prendrai pas la décision seul. Je veux leur en parler, avoir leurs idées, leur feeling.

«J'aimerais jouer, j'adore encore la game, j'ai une passion pour le hockey. Mais il y a autre chose dans la vie. Je dois penser à trois petits bonshommes. J'ai été un peu égoïste les deux dernières années pour poursuivre mon rêve.»

Il y a ça, et il y a aussi l'aspect sportif. Loin de Philadelphie, le Gatinois n'a jamais pu retrouver sa touche offensive qui a fait sa renommée. Une récolte de 25 points à Montréal en 2013-2014 et seulement 12 cette saison à Denver. La situation était telle que Brière a été contraint à regarder une quinzaine de matchs depuis la passerelle, même s'il était en santé.

«Je suis réaliste. Je sais que si je reviens, il n'y a pas une équipe qui va me faire jouer avec son premier trio. Je devrai y penser, parler avec les équipes. Mais ça ne me stresse pas pour le moment. Quand on y sera, on y pensera.»

S'il devait poursuivre sa carrière, il aimerait aussi le faire «près de la maison», idéalement pas dans l'Ouest. «Mais je ne veux pas fermer de portes. Ça m'a toujours agacé de voir des joueurs qui prenaient leur retraite pour ensuite changer d'idée. Donc, je ne veux pas fermer de porte tant que je ne suis pas sûr de mon coup.»

Et le chiffre 1000?

Le plateau des 1000 matchs est évidemment un symbole fort. Brière en totalise actuellement 973. Serait-il déçu de fermer les livres aussi près du chiffre magique?

«Ça serait vraiment cool de dire que j'ai joué 1000 matchs, admet-il. Mais avec les deux lock-out, les matchs en séries et dans les mineures, je suis pas mal plus haut que 1000. Ça ne me stresse pas trop. Oui, c'est un beau chiffre, mais dans mon coeur, je l'ai déjà atteint.»

Il a en effet joué 973 matchs de plus que ce que bien des gens auraient prédit pour un joueur de 5'9.

«Je pense que j'ai été capable de prouver que j'avais ma place dans la ligue, après tout ce qui s'est dit sur moi, conclut Brière. Pour moi, c'est peut-être ce qui me fait le plus chaud au coeur, d'avoir fait ma place malgré ce que les experts pensaient quand j'avais 18, 19, 20 ans.»