Vladimir Tarasenko était peut-être un garçon discret à son arrivée avec les Blues de St. Louis, en 2012-2013, mais il n'y a rien de discret dans ce qu'il accomplit sur la patinoire. Le premier marqueur des Blues est en train de s'immiscer parmi l'élite de la LNH à la vitesse grand V.

À 23 ans et 70 jours, il est devenu le plus jeune joueur des Blues à atteindre le plateau des 30 buts depuis Brendan Shanahan, en 1991-1992.

«Quand tu récoltes en moyenne quatre tirs par match, tu te donnes de bonnes chances de marquer, observe l'entraîneur adjoint Kirk Muller. Surtout qu'il a un tir de la trempe d'Ovechkin ou de Brett Hull. C'est certes l'un des tirs des poignets les plus puissants de la ligue. Il peut le décocher en mouvement et, bien souvent, le gardien ne bouge même pas.»

Ce n'est pas banal d'être mentionné aux côtés de pareils francs-tireurs. Tarasenko s'inspire-t-il d'eux? Ou d'un autre ancien de la LNH?

Eh bien, non. Son inspiration, c'est son père Andrei, qui a été son entraîneur pendant deux ans et demi à Novosibirsk.

«Mon père a remporté trois championnats des marqueurs dans la Ligue de Russie», rappelle Tarasenko.

Il lui parle après chaque match, tout comme il parle à son grand-père. Pépé n'a pas joué dans les rangs professionnels, mais c'est lui qui a enfilé les patins aux pieds du jeune Vladimir lorsqu'il avait 5 ans.

«J'ai été élevé par mes grands-parents jusqu'à l'âge de 12 ans et je suis devenu très proche de lui», explique-t-il.

Le facteur russe

Le talent de Tarasenko sautait aux yeux des recruteurs, tant et si bien qu'il avait été classé au tout premier rang des espoirs européens en vue du repêchage de 2010.

Toutefois, le fameux «facteur russe», ce préjugé négatif à l'égard des joueurs russes né de la compétition offerte par la KHL, a frappé fort dans le cas de Tarasenko.

Il n'a été repêché qu'au 16e rang, après que les Blues - qui venaient de repêcher Jaden Schwartz deux rangs plus tôt - eurent offert David Rundblad aux Sénateurs d'Ottawa en retour de leur choix de premier tour. Quel vol!

Le «facteur russe» n'a pas sonné deux fois dans le cas de Tarasenko. Une fois suffisait amplement.

«J'ai entendu tellement de commentaires à l'égard des Russes et à propos de moi, des équipes qui me disaient: "on ne te fait pas confiance, pourquoi faudrait-il qu'on te fasse confiance?", etc. Je me demande ce qu'elles en pensent aujourd'hui, lâche Tarasenko.

«Les Blues, eux, m'ont fait confiance et j'en suis déjà à ma troisième année ici.»

On sent que Tarasenko avait mal digéré la chose, surtout qu'il est bien placé pour rappeler que la confiance ne doit pas être à sens unique.

«Une équipe de l'Association de l'Est m'avait promis qu'elle allait me repêcher et, à son tour, elle a décidé de ne pas le faire...»

Une menace à forces égales

Lorsqu'on est devant l'attaquant de 6'0 et 219 lb, l'épaisseur de son tronc frappe immédiatement. Il n'a pas toujours eu cette carrure, mais il a consciemment bâti son programme d'entraînement en fonction de la puissance.

« On ne veut pas que son poids nuise à sa vitesse ou à son endurance, mais c'est difficile de mettre ses pratiques en doute quand on regarde sa production », constate Muller en riant.

Chez les Blues, Tarasenko est régulièrement employé en avantage numérique, mais fait la majorité de ses dommages à forces égales. Avant les matchs d'hier, 25 de ses 31 buts avaient été marqués à égalité numérique, ce qui lui conférait le deuxième rang de la ligue à ce chapitre.

À ce titre, ses succès vont de pair avec ceux de Jori Lehtera, un centre finlandais qui avait évolué avec lui à Novosibirsk. Trois ans plus tard, un peu par la force de la pensée positive, les Blues espéraient que la chimie se recrée facilement. C'est exactement ce qui s'est produit.

Une dossier chaud

Les Blues ont vraisemblablement leur nouvelle vedette offensive. Il ne reste plus qu'à lui trouver une place dans la masse salariale de l'équipe.

Son contrat viendra à échéance après la saison, et Tarasenko sera en bonne position pour obtenir un contrat lui garantissant plus de 6 millions par saison. Le hic, c'est que les Blues ont déjà plus de 56 millions engagés auprès de seulement 15 joueurs et que le plafond salarial n'augmentera pas de façon significative. Le DG Doug Armstrong a beaucoup de monde à faire signer (dont le gardien Jake Allen), et pour donner à Tarasenko l'argent qu'il mérite, il devra se délester d'un contrat. Le nom de Patrik Berglund, qui coûtera en moyenne 3,7 millions jusqu'en 2017, est souvent évoqué comme une victime potentielle.

Les Blues ainsi que l'agent Mike Liut ont convenu d'entreprendre les négociations seulement après la saison. La valeur de Tarasenko ne peut qu'augmenter d'ici là, mais au moins, ça donne plus de temps à Armstrong pour manoeuvrer afin de libérer l'argent nécessaire.