«Pour nous, le gardien de but est le joueur le plus important. Il représente en quelque sorte 50% de l'équipe.»

Voilà la philosophie particulière des experts du hockey finlandais, tel qu'exprimée par Timo Bäckman, directeur général de la Fédération finlandaise de hockey sur glace. Ainsi, le joueur de centre du premier trio n'est pas la pierre angulaire, pas plus que le défenseur étoile. Le plus grand joueur, c'est le gardien de but.

Avec cette philosophie, pas étonnant que les gardiens finlandais soient prisés par les équipes de la Ligue nationale de hockey. Qu'on pense à Tuuka Rask, des Bruins de Boston, ou à Antti Niemi, des Sharks de San Jose, deux gardiens qui ont mené leur équipe à la finale de la Coupe Stanley.

Sept gardiens finlandais sont actifs dans la LNH, ce qui représente le quart des joueurs de ce pays qui évoluent dans la LNH. En comparaison, cette proportion est de 1 sur 16 pour les Canadiens.

Le facteur Upi

En Finlande, cet accent mis sur les gardiens remonte presque aux origines du hockey. Au début des années 50, les équipes avaient toutes une recette semblable pour gagner: ils mettaient leurs meilleurs joueurs en avant. Jusqu'au jour où une équipe de Rauma, dans le sud-ouest de la Finlande, a confié le filet au meilleur patineur de l'équipe et s'est mise à enfiler les victoires.

Ce joueur, Urpo Ylönen, a révolutionné le hockey en Finlande, raconte la revue The Atlantic dans un article intitulé «The Oracle of Ice Hockey». L'homme, communément appelé Upi (prononcer «Oupi»), a gravi les échelons, été le principal gardien de l'équipe nationale dans les années 60 et contribué à mettre en place le système national d'entraînement des gardiens, à la fin des années 70. Le trophée remis au meilleur gardien de Liiga porte aujourd'hui son nom.

Entre autres principes, Upi a appris aux gardiens de but à acquérir un style papillon plus mobile, plus réactif, avec des déplacements latéraux efficaces. Ses enseignements visent non seulement à permettre aux gardiens de bloquer le premier lancer, mais aussi à empêcher toute deuxième chance aux attaquants, soit en attrapant la rondelle, soit en la repoussant dans le coin de la patinoire.

Sous son influence, les équipes de tous les niveaux et de tous les âges comptent aujourd'hui un entraîneur des gardiens de but, une pratique qui a commencé au début des années 80. Et pour continuer à progresser, la Fédération paie maintenant un employé à temps plein pour améliorer la formation des gardiens de but.

Avantage Finlande

Le cumul de ces efforts a permis à la Finlande de doubler le Québec comme pépinière de gardiens de but de la LNH. Depuis les débuts de la LNH, 16% des joueurs venant du Québec ont occupé le devant du filet, contre 15% pour la Finlande et beaucoup moins pour les autres nations. Or, aujourd'hui, les gardiens finlandais sont plus nombreux que les Québécois, autant en nombre (7 contre 4) qu'en proportion du total de leurs joueurs (27% contre 9%).

Le Québec ne regarde toutefois pas la parade passer, assure le directeur général de Hockey Québec, Sylvain Lalonde. Il y a trois ans, l'organisation a mis en place une méthode spécifique d'entraînement des gardiens de but et, plus particulièrement, un programme de formation des entraîneurs de gardiens. Les équipes ne disposent toutefois pas d'un entraîneur de gardiens à temps plein, sauf dans la LHJMQ.

Hockey Québec espère que le Québécois Zachary Fucale, gardien de l'équipe junior canadienne, montrera la voie à suivre durant le tournoi annuel des Fêtes. Devant la Finlande, Fucale aura toutefois fort à faire, puisqu'il affrontera Juuse Saros, meilleur gardien du dernier tournoi, avec une moyenne de 1,57.

L'orgueil de Fucale et du Québec vaincront-ils la force de caractère de Saros et de la Finlande? À suivre.