Wayne Gretzky a joué 1487 matchs dans la Ligue nationale, pour quatre équipes différentes. Des coéquipiers, il en a connu.

Mais voilà que les joueurs toujours actifs dans la Ligue nationale se font de plus en plus rares. En fait, il en reste un seul, et il porte le numéro 20 sur un maillot bleu-blanc-rouge. Il s'appelle Manny Malhotra.

Promu dans la LNH dès l'âge de 18 ans, en tant que premier choix des Rangers de New York en 1998, Malhotra a côtoyé la Merveille lors de sa dernière saison dans la Ligue nationale.

Marc Savard faisait également partie de cette édition 1998-1999 des Rangers, mais son statut de joueur actif est strictement lié à sa situation contractuelle, lui qui n'a pas joué depuis 2010-2011 en raison d'une commotion cérébrale. Idem pour Chris Pronger, membre avec Gretzky des Blues de St. Louis de 1995-1996, sur la touche depuis le 19 novembre 2011.

Ne reste plus que Malhotra, 34 ans et encore en pleine santé. «Cette statistique me fait me sentir vieux!», lance-t-il la première fois que La Presse la lui évoque, le joueur étant visiblement au fait de la situation.

Dès le repêchage

Malhotra a vite réalisé qu'il avait abouti dans la même organisation que le meilleur joueur du monde. En fait, il l'a su quelques instants après que les Rangers l'eurent appelé dans ce qu'on nommait alors le Marine Midland Arena de Buffalo.

«Je passais dans le tunnel des médias pour donner des entrevues, et John Rosasco, le responsable des médias des Rangers, m'a dit que quelqu'un voulait me parler et m'a tendu son cellulaire. "Salut, c'est Wayne Gretzky, je veux juste te souhaiter la bienvenue dans l'équipe." John riait, il voyait mon sourire, c'était incroyable!»

«Wayne était tellement impliqué dans le hockey, c'était typique de sa part», raconte Rosasco, aujourd'hui vice-président principal, relations publiques, des Rangers.

Un souper au camp

À peine deux mois plus tard, Malhotra allait avoir de nouveau affaire au numéro 99. C'était au camp d'entraînement, le tout premier de Malhotra chez les pros. La scène s'est déroulée à Burlington, au Vermont.

«J'étais dans ma chambre et le téléphone a sonné. "Oui, Manny?" J'ai tout de suite reconnu la voix. "Salut, c'est Wayne Gretzky, je voulais juste savoir si tu voulais qu'on mange ensemble ce soir." J'étais un peu sans mots, mais j'ai aussitôt accepté! Il m'a dit d'inviter mon cochambreur et qu'on se retrouverait dans le lobby plus tard.

«On a pas mal jasé au souper. En fait, Wayne a jasé, moi j'étais trop impressionné, je n'ai rien dit! Mais c'était tellement cool. Tu pouvais voir qu'il était juste un gars ordinaire, terre à terre. Je n'étais juste pas capable de parler, c'était mon idole.»

Ce souper, auquel participaient quelques autres convives, dont Rosasco, Malhotra assure que Gretzky en a payé l'addition. On imaginerait mal le contraire!

Dans le vestiaire aussi

Cet encadrement s'est poursuivi pendant la saison. Malhotra a, par exemple, eu le privilège d'être voisin de casier de Gretzky dans le vestiaire des Rangers.

«La première fois que je suis entré dans le vestiaire, je cherchais ma place, alors je me suis informé à un préposé. Il m'a dit: "Juste là, à côté de Gretz. Il veut que tu sois à côté de lui."

«À mon premier match, il m'a demandé si j'étais nerveux. Je lui ai dit: "Oui." Il a dit: "Moi aussi!" Je me demandais pourquoi il disait ça. Évidemment, si le meilleur joueur du monde est nerveux avant un premier match, c'était normal qu'un gars de 18 ans le soit.»

Et si Malhotra s'est développé en joueur défensif efficace, c'est notamment grâce aux apprentissages faits lors de cette première saison.

«Dans un entraînement, on pratiquait la couverture défensive, et j'étais opposé à lui. Il s'est placé à côté de mon défenseur, donc je l'ai laissé s'en occuper. Je me retourne, Wayne n'est plus là. Après l'exercice, j'ai demandé à l'entraîneur si j'avais fait la bonne lecture. Il m'a dit: "Ce n'est pas grave, c'est Gretz. Ce n'est pas une vraie situation, oublie tout ça!"»

Dimanche soir, Malhotra est retourné là où tout a commencé pour lui, et là où il a participé à un des moments les plus marquants de l'histoire récente du hockey, le dernier match de la Merveille. Tout ça dans un Madison Square Garden qui lui est encore familier, même après les récentes rénovations.

«Tous les joueurs sont partis, mais le personnel de soutien est encore là, les préposés à l'équipement, les agents de sécurité, les responsables de la patinoire n'ont pas changé.»

Manque le 99. Mais à tout le moins, il reste des gens, comme Malhotra, comme les agents de sécurité, pour partager son souvenir.

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Photo Bernard Brault, archives La Presse

Wayne Gretzky avec les Rangers en 1998.

Les manies de Gretzky

En évoquant avec John Rosasco le souper auquel Malhotra fait allusion, on en vient à découvrir un côté intéressant de Wayne Gretzky.

«Je me souviens que c'était un lundi soir, raconte-t-il, parce qu'à la télévision, il y avait le Monday Night Football et les 49ers de San Francisco jouaient. Pendant le match, Wayne n'arrêtait pas de dire que les 49ers avaient changé leurs pantalons. C'était son genre d'accrocher sur ces petits détails. On n'avait pas de téléphones intelligents à l'époque, donc j'ai dû attendre au lendemain pour vérifier, et Wayne avait raison!»

Après vérification, les 49ers ont bel et bien joué un lundi soir de septembre 1998, le 14. Une victoire de 45-10 sur les Redskins de Washington.