De tous les joueurs des Blues de St. Louis, celui qui aura sans doute le plus de papillons dans l'estomac ce soir, à l'occasion du duel contre le Canadien, portera un masque et de grosses jambières.

C'est Jake Allen, un jeune homme de 24 ans au potentiel illimité, qui a grandi en tant que partisan du Tricolore. C'est lui, plutôt que le gardien numéro 1, Brian Elliott, qui défendra le filet des Blues.

Allen n'arrivera pas en territoire inconnu. Ancien portier du défunt Junior de Montréal, dans la LHJMQ, il connaît bien la passion que suscite le hockey en ville. Et non, il n'a pas appris ça en jouant à l'Auditorium de Verdun, domicile du Junior à l'époque...

«Le Junior donnait souvent des billets aux joueurs pour des matchs au Centre Bell, a raconté Allen après l'entraînement des Blues, hier après-midi à Montréal. Je n'ai pas beaucoup de souvenirs précis des matchs auxquels j'ai assisté, mais j'étais là quand Ryan O'Byrne a marqué dans son propre filet. Après le match, j'avais pris le métro pour rentrer chez moi et je me souviens que les partisans avaient crié son nom dans les wagons pendant 30 minutes! C'était assez fou.»

Natif de Fredericton, au Nouveau-Brunswick, Allen vient d'un fief vendu au CH. «C'est l'équipe la plus populaire là-bas, ils ont longtemps eu leur filiale à Fredericton, mon père aime le Canadien. C'est un peu la tradition au Nouveau-Brunswick.

«J'ai hâte au match. Il y aura l'hymne national, je vais regarder autour, j'aurai des papillons. Je rêve à ce moment depuis longtemps.»

Le meilleur, selon Corsi

Choix de deuxième tour des Blues en 2008, Allen a suivi le long parcours de développement qui attend bien des gardiens. Il a goûté à la LNH pour la première fois pendant la saison 2013 écourtée, mais il a passé toute la campagne 2013-2014 dans la Ligue américaine.

«Je savais que c'était une question de chiffres, puisqu'ils avaient déjà Brian et Jaro (Halak), et ensuite (Ryan) Miller, indique Allen au sujet de la dernière saison. J'ai joué une cinquantaine de matchs, c'était bon pour ma confiance et ça m'a aidé à avoir le poste cette saison.»

Visiblement, l'expérience en a valu la chandelle. Sa fiche de 33-16-3 et sa moyenne de 2,03 lui ont valu le trophée Aldege «Baz» Bastien, remis au meilleur gardien de la LAH. Et cette saison, il a remporté cinq de ses six départs, dont deux par jeu blanc, et présente une moyenne de 1,67 et une efficacité de ,933.

«À son âge, c'est le meilleur gardien que j'ai vu dans ma carrière jusqu'ici. Il a un grand potentiel», a estimé son entraîneur des gardiens, le Montréalais Jim Corsi.

«L'an passé, c'était un gardien dominant et je crois qu'il aurait eu sa place dans la LNH, a mentionné l'entraîneur-chef des Blues, Ken Hitchcock. Depuis deux ans, il est plus gros dans le filet, il a fignolé son jeu et ne se fie plus seulement à ses réflexes. Avec son attitude et ses capacités physiques, il pourrait devenir très bon.»

S'il le devient, on pourra parler d'un grand cru pour les Blues lors du repêchage de 2008. Cette année-là, ils ont d'abord réclamé le défenseur Alex Pietrangelo au 4e rang, en plus d'Allen au 34e rang et de Jori Lehtera, leur révélation cette saison, au 65e échelon.

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Pas touche!

Les Blues connaissent un départ intéressant avec une fiche de 12-5-1, et un des vecteurs de leur attaque est le trio surnommé «STL», celui de Jaden Schwartz (18 points), Vladimir Tarasenko (21 points) et Jori Lehtera (17 points). Or, les Blues ont marqué seulement 14 buts en 7 matchs à l'étranger cette saison, et 10 d'entre eux proviennent de ce trio, ce qui a mené à des discussions sur un réaménagement des forces.

Ken Hitchcock a semblé agacé en soulignant que le trio de Lehtera faisait face aux meilleurs éléments adverses à l'étranger, ce qui devrait permettre aux autres unités de se démarquer. Songe-t-il à démanteler le trio STL? «Je ne touche pas à ce trio. Même moi, je ne suis pas assez idiot pour faire ça!», a-t-il répondu du tac au tac.

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Corsi, l'homme derrière les chiffres

Ancien entraîneur des gardiens à Buffalo, Jim Corsi occupe cette saison les mêmes fonctions à St. Louis. Si le nom est familier aux oreilles des amateurs de hockey, c'est en raison de l'indice Corsi, un outil de statistiques dites avancées qui permet de mieux calculer la possession de rondelle.

Corsi est bel et bien à l'origine de cette statistique puisqu'il additionnait les tirs au but, les tirs hors cible et les tirs bloqués par des joueurs pour mesurer la charge de travail de ses gardiens et ainsi mieux gérer leur énergie. Des statisticiens ont simplement appliqué ce principe aux patineurs, pour calculer le nombre de rondelles dirigées vers chaque filet pendant qu'ils sont sur la patinoire.

Corsi assure n'avoir rien à voir avec cette mesure. «Mais c'est bien de voir qu'il y a plus de données disponibles pour l'analyse», a mentionné, en français, ce Montréalais d'origine italienne.