La défense gagne les championnats, dit le fameux adage sportif.

Pourtant, les attaquants sont généralement favorisés au repêchage lorsque vient le temps de trancher entre ceux-ci et des défenseurs de premier plan.

Les défenseurs mettent plus de temps à se développer, et les équipes veulent mettre la main sur des joueurs qui les aideront rapidement à se relancer, surtout avec un premier choix au total, par exemple.

Si on observe Victor Hedman depuis un an, par exemple, il est permis de se demander si l'écart entre sa valeur et celle de John Tavares ne s'est pas rétréci avec les années, malgré l'immense talent du centre des Islanders de New York. Idem avec Drew Doughty, des Kings de Los Angeles, par rapport à Steven Stamkos, du Lightning de Tampa Bay.

Tavares a été choisi au premier rang en 2009 par les Islanders; Hedman, au deuxième rang par le Lightning. Malgré les 320 points en 352 matchs en carrière de Tavares, les Islanders ont participé aux séries éliminatoires une seule fois au cours des cinq dernières saisons et ils n'ont pas franchi la première ronde à cette occasion. Tavares n'est pas à blâmer; il est plutôt mal entouré, et les Islanders cherchent toujours un défenseur de premier plan.

Hedman a mis du temps à se développer. Il n'a pas franchi le plateau des 30 points à ses 3 premières saisons, et certains membres de l'organisation se demandaient même si son potentiel offensif n'était pas limité, finalement.

Mais ce colosse de 6'6 a explosé avec 55 points en 75 matchs l'an dernier et il a dépecé la défense du Canadien, lundi, pour porter son total à 7 points en seulement 3 matchs, un sommet dans la LNH.

«Les fans vont acheter des billets pour aller voir jouer John Tavares, pas sûr qu'ils le feraient pour l'autre, a confié un recruteur interrogé hier. C'est peut-être plus serré aujourd'hui, mais j'ai toujours trouvé néanmoins que Tavares était dans une classe à part.»

Le constat est différent dans le cas de Doughty, repêché au deuxième rang en 2008 derrière Stamkos. «Ce qu'il y a d'impressionnant avec Doughty, c'est qu'il élève son jeu d'un cran dans les moments cruciaux comme les Jeux olympiques ou les séries éliminatoires, a mentionné un second recruteur. Je ne peux pas écarter un gars qui a déjà (gagné) deux Coupes Stanley malgré tout le talent de Stamkos. Pour Hedman par rapport à John Tavares, j'ai vu les deux à l'oeuvre cette année, et Tavares est parmi les cinq meilleurs joueurs de la LNH, tandis que Hedman est parmi les cinq meilleurs défenseurs.»

Prenez trois équipes dominantes: Chicago, Boston, Los Angeles. Elles ont toutes un défenseur de premier plan. Duncan Keith chez les Hawks, Zdeno Chara chez les Bruins et Drew Doughty chez les Kings.Chara, d'ailleurs, a ralenti depuis l'an dernier et il faudra voir comment les Bruins réagiront. Leur début de saison est d'ailleurs difficile. Quant aux Red Wings de Detroit, ils pleurent toujours la retraite de Nicklas Lidstrom.

Parmi les clubs de queue de classement depuis quelques années, on cherche encore le défenseur dominant chez les Sabres de Buffalo, les Hurricanes de la Caroline, les Panthers de la Floride et les Oilers d'Edmonton.

Remontons le fil de l'histoire. En 1991, les Nordiques de Québec ont repêché Eric Lindros au premier rang, avant de l'échanger dans une transaction célèbre. Au troisième rang, les Devils du New Jersey ont dû se «contenter» de Scott Niedermayer. Ils ont remporté deux Coupes Stanley avec lui, et Niedermayer en a gagné deux autres par la suite. Il compte déjà sa place au Temple de la renommée du hockey.

Deux ans plus tard, Alexandre Daigle semblait le choix unanime au premier rang, sauf peut-être pour une poignée de directeurs généraux, dont Pierre Gauthier, des Nordiques, qui lui préférait un certain Chris Pronger. On connaît la suite.

Le repêchage de 2006 n'a rien fait pour changer la tendance. Les Blues de St. Louis ont repêché au premier rang un défenseur de 6'4, Erik Johnson. Celui-ci a subi un an plus tard un bête accident en descendant d'une voiturette de golf (double déchirure ligamentaire à un genou), qui a retardé sa progression. Sans compter qu'un certain Jonathan Toews était encore disponible au troisième rang pour les Blackhawks...

«J'ai suivi les deux à leur année de repêchage, a mentionné le premier recruteur. Je n'ai jamais trouvé Erik Johnson exceptionnel avec la rondelle, et sa lecture du jeu n'était pas celle d'un joueur d'exception. Jonathan Toews était clairement le numéro un sur ma liste. J'ai été très surpris par ce choix, d'autant plus qu'il a été fait par Jarmo Kekalainen, l'un des meilleurs de sa profession.

«Tout revient au talent, conclut le recruteur. Tu dois opter pour le joueur le plus talentueux à tes yeux, peu importe la position.»